L'infirmière Magazine n° 391 du 01/03/2018

 

ROMAN

RENDEZ-VOUS

ZOOM

K. R.  

Sensible, poétique, touchant, désespéré… Cet ouvrage bouleverse. Un homme qui reprend connaissance d’abord dans une ambulance, puis dans le « calme étourdissant » d’un hôpital. Un patient épileptique qui, en raison de la chronicité de son mal, est un visiteur régulier des lieux et connaît ses rouages. « Viendront l’enquête médicale, les investigations, les tests en série, examens, prélèvements, injections, câbles et électrodes, questionnaires à noircir, rendez-vous à prendre, à jeun ou non, revenir et revenir… » Sa chambre est le théâtre des interactions humaines, nombreuses, éphémères et parfois contraires. Entre les bien-portants et les « allongés ». Entre les soignants, cette « armée aux chaussons qui couinent », conscients de leur rôle de « gardiens des douleurs » mais aussi parfois « cœur-de-beurre » face à la souffrance d’autrui. Entre le regard que l’on pose sur l’autre selon qu’on soit malade ou visiteur, dedans ou dehors, « parce qu’on n’existe pas à l’hôpital. C’est un sas hermétique. On vient te nourrir, changer ton eau et vérifier tes réflexes, mais tu te cognes au verre du gros aquarium. » Un monde où la langue du médical, « faite de noms savants et de chiffres, de latin et de variables à plusieurs décimales », juxtapose celle « de l’hypocrisie bien intentionnée […] amidonnée à la virgule » et qui « navigue entre le réel et l’espoir ». Dans cet ouvrage polyphonique, l’auteur donne la voix aux différents acteurs de la chaîne du soin. Et met en scène les souffrances intimes qui habitent chacun. Avec ce besoin urgent de dire ce « je ». Pour enfin exister.

Chambre simple, Jérôme Lambert, éd. L’Iconoclaste, 17 €