L'infirmière Magazine n° 394 du 01/06/2018

 

ZIMBABWE

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Héloïse Rambert  

Après un mouvement de grève entamé pour protester contre leurs conditions de travail, des infirmières ont dû y mettre fin en raison des menaces de licenciement du gouvernement.

La souffrance au travail ne connaît pas de frontières. Au Zimbabwe, des milliers d’infirmières ont repris le chemin du travail le 23 avril dernier, après une semaine de grève très conflictuelle avec les autorités. Le 16 avril, quelque 15 000 infirmières du secteur public avaient initié un mouvement social, à la suite des médecins, pour réclamer de meilleurs salaires et dénoncer le manque d’équipements et de médicaments.

Elles n’ont, pour le moment, pas réussi à se faire entendre. D’après leur syndicat, elles attendent de futures négociations avec le gouvernement du nouveau président Emmerson Mnangagwa.

« Les infirmières sont retournées au travail alors que leurs revendications n’ont pas été résolues », a reconnu Enoch Dongo, porte-parole de l’Association des infirmières du Zimbabwe (Zina), auprès de l’Agence France-Presse (AFP). Pire : elles ont eu à subir les foudres du gouvernement, qui a réagi très violemment à leur initiative, qu’il a jugée « politiquement motivée » et « déplorable », arguant qu’il avait débloqué 17 millions de dollars de fonds destinés à améliorer leurs salaires.

Licenciement immédiat

Dès le lendemain du début du mouvement, de peur que la grève ne se propage à d’autres secteurs, le vice-président, Constantino Chiwenga, a annoncé le licenciement des grévistes. « Dans l’intérêt des patients et pour sauver des vies, le gouvernement a décidé de licencier toutes les infirmières en grève avec effet immédiat », a-t-il déclaré dans un communiqué. Avant d’ajouter que des IDE au chômage et à la retraite seraient recrutées pour remplacer toutes celles qui seraient licenciées.

Face à ces provocations, des dizaines d’infirmières ont manifesté dans le centre d’Harare, la capitale du Zimbabwe. Elles ont été rejointes par des citoyens révoltés par cette décision de licenciement abusif, au son du slogan « Bring back our nurses » (« Rendez-nous nos infirmières »), repris sous forme de hashtag sur le réseau social Twitter. La Zina avait déposé un recours en référé pour obtenir l’annulation des licenciements annoncés, avant d’y renoncer, sans plus d’explications.

En revanche, aucun licenciement n’a eu lieu. De retour dans les centres de santé, la charge de travail des infirmières s’est, elle, décuplée. À Parirenyatwa, le plus grand hôpital d’Harare, elles ont dû gérer de longues files d’attente de patients.

Emmerson Mnangagwa, qui a succédé à Robert Mugabe à la tête du pays après avoir dirigé le coup de force contre ce dernier en novembre 2017, a fait de la relance de l’économie l’une de ses priorités. Une politique très critiquée.