HYGIÈNE
SUR LE TERRAIN
MON QUOTIDIEN
Cécile Blanchet-Richardot* Karen Ramsay**
*Pédicure-podologue
Il est important de bien distinguer le type de sabots que l’on porte au quotidien. À l’hôpital, si certains ont opté pour des sabots en résine type Crocs®, la grosse majorité des soignants portent des sabots en plastique, trouvés dans le commerce à petit prix, et qui ne présentent pas la même technicité que la “vraie” Crocs® », prévient Cécile Blanchet-Richardot, pédicure-podologue libérale et membre du CHSCT(1) de l’hôpital où elle exerce. S’il est rare que la direction d’un hôpital autorise le port des sabots et l’inscrive dans son règlement intérieur, elle le tolère(2). En revanche, en cas d’incident, il n’est pas certain que cela puisse être reconnu comme accident du travail (voir encadré) car ce mode de chaussage n’est pas conforme aux règles d’hygiène et de sécurité. Léger, silencieux, confortable, offrant un bon amorti, un lavage et une désinfection faciles, le sabot peut présenter des avantages – que réfute une étude américaine (voir encadré). En revanche, il est peu adapté à l’usage hospitalier, « en raison des nombreuses ouvertures, de la matière qui ne protège pas des risques chimiques et biologiques ou de la chute d’objets coupants ou pointus », poursuit Cécile Blanchet-Richardot. D’autant plus, ajoute-t-elle, que le pied – peu maintenu – a tendance à s’étaler et à se déformer : « Les soignants ont adopté ces sabots car, malgré les longues heures en position debout, ils restent légers et confortables…? mais ce genre de chaussure ne maintient pas assez le pied. Cependant, il n’est pas prouvé que les lombalgies dont pourraient souffrir les soignants soient davantage dues au port des sabots de type Crocs®?, qu’aux troubles musculo-squelettiques liés à leur activité professionnelle. » Son conseil ? Adapter sa chaussure à son poste de travail. « Par exemple, les IDE des urgences devraient être chaussées de façon à pouvoir courir de façon sécuritaire en situation d’urgence… alors qu’au bloc, il est indispensable d’avoir des sabots fermés autoclavables », note la pédicure-podologue.
1- Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
2- La Suède, le Canada, les États-Unis, l’Autriche et le Royaume-Uni ont décidé d’interdire le port des sabots dans leurs hôpitaux pour des raisons sanitaires et de sécurité.
→ « L’inadaptation des sabots à toutes les morphologies de pied conduit souvent les soignants à utiliser leurs propres chaussures. Si un accident (coupure, écrasement, brûlure) se produit, l’employeur peut dénier sa qualité d’accident de service car l’agent portait des chaussures inadaptées, contraires à sa politique d’habillement (que la prime de chaussure ait effectivement été versée ou non). Donc, si l’employeur propose un ou deux modèles de chaussures, cela peut justifier que l’agent utilise ses propres sabots. En revanche, si une large gamme lui est proposée, il va falloir prouver qu’aucun des modèles existants ne lui convient… En cas d’accident en portant des sabots “personnels”, il faudra, pour le soignant, prouver que le matériel fourni par son employeur (ici le sabot) est inadapté à sa condition physique (ou à ses fonctions propres). Et il aura préalablement alerté son cadre ou sa hiérarchie de cet inconvénient, de préférence avant l’accident… », conseille Renaud de Laubier, avocat en droit de la santé, droit public et gestion des risques médicaux.
→ Éviter les modèles avec des trous d’aération : gare aux chutes d’objets coupants ou pointus ou à l’écoulement de fluides biologiques ou de liquides.
→ Porter des chaussettes pour éviter les frottements et réduire le risque de champignons.
→ Préférer les sabots en résine à ceux en plastique.
→ Utiliser la bride arrière pour maintenir davantage le pied.
→ En changer régulièrement car l’amorti a tendance à s’affaisser avec le temps et à provoquer une déformation du pied.
→ Avoir une deuxième paire : question d’hygiène et de confort !
→ → Utiliser les surchaussons, particulièrement dans le cadre du bloc opératoire, en néonatalogie ou en services de soins de suite.
→ Consulter un pédicure-podologue en cas de problème.
« Les Crocs® ne conviennent pas à un usage quotidien », a expliqué Megan Leahy, podologue américaine, au HuffingtonPost(1), expliquant que ces sabots « ne soutiennent pas assez le talon. Quand celui-ci est instable, les orteils ont tendance à se recroqueviller pour retenir la chaussure, ce qui peut provoquer des tendinites », auxquelles s’ajoutent des risques de « déformation d’orteils, des problèmes d’ongles, des cors ou des callosités », ajoute la spécialiste. Seules les personnes souffrant d’œdème excessif des jambes ou des chevilles ou celles ayant la voûte plantaire très élevée pourraient trouver un bénéfice dans le port quotidien de ces chaussures, a précisé Alex Kor, président de l’Académie américaine de podologie.