L'infirmière Magazine n° 397 du 01/10/2018

 

RENCONTRE AVEC

CARRIÈRE

PARCOURS

S.M.  

Le plaisir, c’est de voir un enfant évoluer positivement, malgré les difficultés et les douleurs que ses parents ont pu vivre. C’est aussi de constater qu’une jeune famille accepte notre aide.

À 10 ans déjà, je voulais être puéricultrice. Parce que j’avais observé dans les cours des crèches et là où on s’occupait d’enfants, que les adultes les forçaient à faire des choses, les grondaient inutilement ou trop violemment. J’avais décidé que je voulais m’occuper d’eux même si, à l’époque, je ne savais pas qu’il fallait faire infirmière et puéricultrice pour ça. » Aussi loin qu’elle s’en souvienne, Frédérique Porcher, qui exerce aujourd’hui comme puéricultrice au centre parental (« Ici, on dit comme ça, car on peut aussi accueillir des couples et que, de toute façon, on s’occupe forcément des papas aussi », précise-t-elle), a donc toujours voulu s’inscrire dans la prévention, l’éducation à la santé, l’écoute et l’attention. Elle a découvert l’exercice en centre maternel après un arrêt d’activité de près de quinze ans. « À l’époque, je ne voulais pas retourner vers le soin technique. » La mère de famille avait envisagé de postuler en milieu scolaire.

→ À l’écoute des angoisses. Mais une annonce au centre maternel Ti An Ere (la Maison du lien, en breton) a tout changé. « Je n’avais pas d’attente particulière, si ce n’est de faire mon métier avec passion et de servir les enfants. » Son établissement - associatif - accueille dixsept familles dont deux couples, avec leurs enfants ou dans l’attente d’un accouchement. Après avoir travaillé dix ans à l’hôpital, Frédérique Porcher découvre un secteur vraiment différent : le médico-social. « On passe beaucoup de temps en réunion, en observation, en réflexion. Le temps n’est vraiment pas le même qu’en établissement de soins. » L’équipe est composée d’auxiliaires de puériculture et d’éducateurs, avec qui il faut apprendre à travailler, et de quelques temps partiels de psychologue et de pédiatre. Cependant, elle est la seule professionnelle de santé présente en permanence sur des horaires de jour. « J’ai dû m’imposer, avec mon approche peu portée sur la médication, plus encline à écouter les angoisses d’une jeune fille qui me parle de ses mots de tête, plutôt que sur l’antalgique automatique. »

→ Liberté et autonomie. La puéricultrice est aussi l’une des rares dans l’équipe à exercer un rôle transversal, alors que les auxiliaires et éducateurs ont chacun un enfant ou un parent en référence. Assez libre de l’organisation de sa journée, l’IDE a donc pu apporter sa petite touche personnelle, en faisant découvrir les médecines douces à ses jeunes patientes. « Nous avons également noué un lien avec le kiné voisin, vers lequel les jeunes mamans se dirigent facilement après la naissance. Et puis, quand on est la seule soignante, on est le référent santé de tous, mères et enfants. » Son rôle principal demeure l’éducation à la santé dans la perspective du bien-être de l’enfant et l’observation du lien.

Mais elle accompagne également les consultations du pédiatre lorsqu’il est dans les murs. « J’oriente aussi la maman vers le soin en extérieur dont elle pourrait avoir besoin. Je joue un rôle de médiatrice avec la maternité, les sages-femmes, je m’assure que celles qui ont besoin d’un traitement le prennent, je prépare la femme enceinte à son rôle futur… »

Un panel d’activités très large, qui plaît toujours autant à la puéricultrice, au bout de quatorze ans. « C’est la première fois que je reste aussi longtemps dans un poste », observe-t-elle. Preuve s’il en est que l’activité la satisfait pleinement. « Et puis le plaisir, c’est de voir un enfant évoluer positivement, malgré les difficultés et les douleurs que ses parents ont pu vivre, explique Frédérique Porcher. C’est aussi de constater qu’une jeune famille accepte notre aide. » Ce qui ne va pas de soi pour tout le monde, les rapports initiaux avec les entrants pouvant être marqués par la défiance, l’incompréhension, voire l’agressivité. « Je ne le prends jamais pour moi, je sais que c’est l’expression d’une souffrance, note-t-elle. Et puis quand, enfin, on voit que tout va dans le bon sens, et que l’enfant s’épanouit, c’est un vrai bonheur. »

MOMENTS CLÉS

1981 : Diplômée d’État. Premier poste à l’hôpital de Saint-Tropez (Var), en chirurgie générale puis aux urgences.

1985 : Diplôme de puéricutrice à Nice, puis exercice libéral à Paris.

Fin 1986 : Départ pour Tahiti et premier poste de puéricultrice en néonatalogie, puis en maternité.

1991 : Quitte l’hôpital pour s’occuper de ses trois enfants.

2004 : Entrée au centre parental de Rennes, un établissement géré par l’Asfad (Association pour les familles en difficulté).

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