L'infirmière Magazine n° 402 du 01/03/2019

 

RENCONTRE AVEC

CARRIÈRE

PARCOURS

LISETTE GRIES  

« Les gens arrivent ici après un épisode aigu. La plupart ne récupèreront pas toutes leurs capacités fonctionnelles. Ils traversent une forme de deuil : à nous de les accompagner dans ce cheminement »

Cela fait presque vingt-cinq ans que Chantal Richard exerce au sein du centre de rééducation et de réadaptation d’Alsace du nord (Cerran), à Morsbronn-les-Bains (Bas-Rhin), et pourtant, quand on lui demande ce qu’elle souhaite pour la suite de sa carrière, elle répond dans un sourire : « Continuer à travailler ici ! » Au sein de son service de neurologie, les patients qui ont fait un AVC et ceux atteints d’une sclérose en plaques (SEP) sont les plus nombreux. Mais elle rencontre également des tumeurs cérébrales, des traumatismes crâniens sévères, des pathologies neuro-dégénératives, etc. « Nous avons beaucoup de personnes âgées, mais les personnes qui font des AVC jeunes sont de moins en moins rares », remarque-t-elle.

→ L’écoute au cœur du soin. Ce qui lui plaît tant dans cet environnement de travail ? « L’approche particulière qui découle des longs séjours dans le service. » En effet, les hospitalisations de plus d’un an ne sont pas rares. Les soins relationnels ont donc toute leur place, et ce dès les premiers jours, quand les patients réalisent les conséquences à long terme de leur état de santé. « Les gens arrivent ici après un épisode aigu. La plupart ne récupèreront pas totalement leurs capacités fonctionnelles. Ils traversent une forme de deuil : à nous de les accompagner dans ce cheminement », explique Chantal Richard.

Que ce soit avec les patients ou avec leur famille, une écoute de qualité est donc au cœur de la relation de soin. « Notre objectif, c’est qu’ils parviennent à vivre autrement, ajoute-t-elle. Il faut aussi apprendre à gérer notre propre déception quand ils ne récupèrent pas autant qu’on l’espérait. » Dans ce processus, les patients et leurs proches peuvent compter sur la finesse de l’IDE. « Il faut pouvoir les accompagner lors de leurs baisses de moral, les motiver quand c’est nécessaire, tout en tenant compte de leur fatigue, explique-t-elle. Une partie de notre travail est d’ailleurs de les amener à prendre ces aspects en compte spontanément. » Pour nouer des relations de confiance avec ses patients, Chantal Richard dispose d’un autre atout de taille : elle parle alsacien. « Certains sont beaucoup plus à l’aise en dialecte qu’en français. Je peux aussi traduire pour les médecins qui ne sont pas dialectophones », se félicite-t-elle.

→ Pathologies associées. Pour préparer le retour à domicile des patients, l’équipe pluridisciplinaire (formée de médecins, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, orthophonistes, psychologues et neuro-psychologues) s’appuie sur des projets thérapeutiques discutés toutes les semaines. Un outil informatique partagé permet également de suivre la progression globale de chaque malade. Les soins infirmiers sont intégrés à ce parcours : pansements, administration de traitements, prélèvements sanguins, oxygénothérapie… « Nous devons en outre prendre en charge toutes les pathologies associées : nutrition entérale ou parentérale, sondes naso-gastriques, glycémies capillaires, sondages urinaires, détaille l’IDE. Et comme les patients arrivent chez nous de plus en plus tôt après leur épisode aigu, on reste très vigilant quant aux complications et aux urgences. »

Chantal Richard participe régulièrement à des formations, en interne ou à l’extérieur, sur les protocoles, les outils, les évolutions du métier. Grâce à l’une d’elles, elle est devenue référente en éducation thérapeutique du patient (ETP) pour les auto-sondages chez les personnes atteintes de SEP. « L’ETP est un outil important dans l’évolution des patients vers l’autonomie », remarque-t-elle. Une autre formation suivie dès 2009 lui permet d’assurer le tutorat des étudiantes en stage dans son service. Là encore, nul doute que ses qualités relationnelles sont précieuses. « Certaines stagiaires sont depuis devenues des collègues », sourit-elle.

MOMENTS CLÉS

1987 : diplômée IDE, démarre en chirurgie orthopédique au CH de Haguenau (67). Effectue aussi des remplacements en libéral.

1992 : travaille comme IDE en santé au travail en entreprise.

1994 : retrouve l’hôpital et l’orthopédie au centre de rééducation et de réadaptation d’Alsace du Nord (Cerran), à Morsbronn-les-Bains (67).

1995 : rejoint le service de neurologie du Cerran à sa création.