L'infirmière Magazine n° 404 du 01/05/2019

 

PATIENTS DIABÉTIQUES

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SANDRINE LANA  

Évoquée lors du congrès de la SFD(1), la « diabulimia » est un trouble alimentaire préoccupant chez les diabétiques de type 1.

Le diabète de type 1 se combine parfois avec un trouble du comportement alimentaire appelé « diabulimia ». Le patient adop?te une attitude qui consiste à réduire au maximum ses doses d’insuline ou à les omettre en vue de perdre du poids. Un comportement qui n’a rien d’exceptionnel : « Près d’un patient sur deux tentera un jour une privation d’insuline », énonçait d’emblée Sylvain Iceta, psychiatre, lors d’une conférence sur le sujet au congrès annuel de la Société française du diabète(1).

Ce trouble alimentaire, qui touche particulièrement les jeunes femmes et les adolescents, peut apparaître à tout âge et concernerait entre 3 et 10 % des troubles alimentaires chez les diabétiques. Acidocétose, hyperglycémie constante, déshydratation… les conséquences de la privation d’insuline sont graves et peuvent, à long terme, entraîner des complications comme la rétinopathie et des néphrites. D’où l’importance d’un repérage précoce de la « diabulimia ». « Les premiers jours après le diagnostic du diabète comptent beaucoup pour son dépistage », indique Sylvain Iceta. Les soignants doivent être vigilants à certaines prédispositions, comme la prise de poids à l’instauration du traitement, un IMC élevé, une estime de soi basse. « Il s’agit bien d’une anorexie mentale chez les DT1. Ces patients estiment être des mauvais patients et veulent surcontrôler leur poids », poursuit le psychiatre. Des signes doivent interpeller comme « la pratique de sport excessive, la perte de poids inexpliquée, les cheveux ou les poils secs, les menstruations perturbées, l’envie de vomir. La boulimie est deux fois plus élevée chez les DT1 et l’hyperphagie boulimique concerne 12 à 55 % des patients. »

Solutions multiples

Pour aider à sortir de cet état de mal-être et de surcontrôle de son corps, la prise en charge doit être pluriprofessionnelle. La psychothérapie et la pleine conscience sont des outils à ne pas négliger.

Pour Nicolas Sahuc, diététicien et diplômé en éthique de la santé, « il faut mettre en place des soins « diet’ét(h)iques » au lieu des pratiques nutritionnelles habituelles. Dans le diabète, on se focalise beaucoup sur le corps du patient dans son fonctionnement, sa physiologie, alors qu’il faudrait davantage parler de l’impact d’un aliment sur le corps ! Au lieu d’avoir une attitude moralisatrice qui juge le patient, on pointerait un dysfonctionnement. »

Les deux spécialistes sont unanimes : il faut éviter les applications de contrôle du poids et des calories dépensées, rappelant qu’il s’agit de données théoriques, donc trompeuses. Mieux vaut définir avec son patient « où il place son 0 », autrement dit son poids s’il n’avait pas de trouble. « Cela permet d’annuler la peur de prendre du poids et d’amener à changer son comportement », selon Nicolas Sahuc.

Une TCC du quotidien

Lors du congrès, une communication est revenue sur l’expérience des ateliers d’alimentation en pleine conscience, faisant partie des thérapies cognitives et comportementales (TCC) proposées aux personnes souffrant de troubles alimentaires à l’AP-HM. En incitant le patient à manger en pleine conscience, c’est-à-dire en étant à l’écoute de ses sensations et non de manière automatique, les soignants travaillent à renforcer les comportements adéquats ou éviter les comportements inadaptés. « C’est une thérapie ancrée sur le “ici et maintenant” », explique le Dr Audrey Begu, médecin nutritionniste au CHU de La Timone. Une évaluation clinique et psychologique en amont et après la thérapie est programmée. « Il y a un gros travail effectué sur l’acceptation de soi, de ses émotions et de ses pensées », poursuit-elle.

1 - Le congrès annuel de la Société française du diabète (SFD) s’est tenu à Marseille, du 26 au 29 mars.

PREUVES SCIENTIFIQUES

Tous les régimes ne se valent pas

Devant l’essor des nouveaux régimes alimentaires, le Dr Léopold Fezeu, médecin épidémiologiste à Paris-XIII Nord, et Karine Barre, chercheuse, ont interrogé la littérature scientifique sur l’efficacité du placebo des régimes alimentaires. Leurs résultats font ressortir des niveaux de preuves scientifiques inégaux sur l’influence de tel ou tel régime.

L’alimentation végétalienne donne par exemple « peu de preuves convaincantes » sur la réduction du diabète, tandis qu’il existe des « preuves probables » que manger de la viande, notamment transformée (hors volaille), augmente le développement du diabète. Par ailleurs, il existe peu de résultats à long terme sur l’efficacité des régimes hypoglycidiques et hyperlipidiques, parfois plébiscités par les diabétiques. D’après les études, le régime méditerranéen est le mieux adapté à la réduction du diabète.

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