CONVAINCRE LES PROS

Pour les différents conférenciers qui ont mené des études sur la couverture vaccinale contre la grippe, le constat de départ est le même : les soignants ne sont pas assez nombreux à se soumettre à l’injection hivernale. « Il faut un taux de vaccination autour de 40 % pour lutter efficacement contre les grippes nosocomiales », a souligné Bruno Lina, professeur de virologie et chef de service aux Hospices civils de Lyon⁽²⁾.

Or, la plupart des services en sont loin, même ceux qui prennent en charge des patients fragiles (gériatrie, pneumologie, néonatalogie, etc.) Plusieurs établissements ont alors décidé de mettre en place des campagnes de communication et de vaccination. En recoupant les différentes contributions, il est possible de faire émerger des éléments qui garantissent le succès de ces initiatives.

Informer et s’adapter

En premier lieu, une meilleure information sur la dangerosité de la grippe permet de faire comprendre l’intérêt de la vaccination. « Près de 75 % des répondants ont une vision erronée de la surmortalité liée à la grippe », regrette Catherine Metais, infirmière hygiéniste, qui a mené une étude auprès des personnels du CH Sud Seine-et-Marne. Au centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) de Lausanne (Suisse), les messages de sensibilisation s’affichent dans les couloirs, mais aussi sur Internet. « Notre service d’appui multimédia a produit neuf films d’animation, diffusés sur notre Intranet ainsi que sur les réseaux sociaux, qui ont été largement visionnés et partagés », s’est félicité Philippe Bressin, cadre hygiéniste de l’établissement⁽³⁾.

Ensuite, organiser des temps de vaccination adaptés aux horaires des services augmente le nombre de soignants vaccinés. « La vaccination sur place, gratuite et à la demande, est un des facteurs de réussite », a noté France Borgey, médecin hygiéniste au CHU de Caen, qui a mené une étude sur onze Ehpad. Au CHUV, des stands ont été installés en novembre, devant les vestiaires, de 6 h à 7 h 30, et devant la cafétéria pendant les heures de déjeuner. « Nous pouvons aussi compter sur plus de cent délégués vaccinaux, habilités à vacciner leurs collègues au sein des services », a précisé Philippe Bressin. En Seine-et-Marne, la majorité des personnels vaccinés l’ont été par la médecine du travail ou par un collègue.

Implication de la direction

Enfin, quand la hiérarchie s’implique, cela encourage les soignants à se faire vacciner. « Le médecin coordinateur et la direction de l’Ehpad peuvent ainsi afficher clairement qu’ils sont vaccinés », a suggéré France Borgey. Autre façon de motiver les soignants : les obliger à porter un masque s’ils ne sont pas vaccinés. Au final, ces efforts portent leurs fruits : dans les Ehpad suivis par France Borgey, le taux de vaccination est passé de 27,6 % en 2013-2014 à 46,1 % en 2017-2018. Au CHUV, près de 50 % du personnel a été vacciné en 2018-2019 contre 29,5 % en 2011.