ALIMENTATION
SUR LE TERRAIN
MON QUOTIDIEN
MATHILDE GIBEAUX* HÉLÈNE COLAU**
*MEMBRE DE L’ASSOCIATION FRANÇAISE DES DIÉTÉTICIENS NUTRITIONNISTES
À l’hôpital ou en Ehpad, il n’est pas rare que des visiteurs apportent quelques friandises, voire des repas complets, à leur proche hospitalisé. « Cela arrive constamment, confirme Mathilde Gibeaux, diététicienne nutritionniste intervenant dans une clinique francilienne. Il y a deux cas de figure : soit le médecin en fait la demande, afin d’aider une personne qui a du mal à manger, soit la famille prend l’initiative. » Dans le second cas, les professionnels de santé doivent faire preuve de pédagogie et rappeler les règles en vigueur, d’ordre sanitaire et nutritionnel. Celles-ci varient énormément d’un établissement à l’autre : certains hôpitaux refusent catégoriquement les aliments venus de l’extérieur quand d’autres font la différence entre les denrées “inoffensives”, comme les produits secs, et celles à haut risque d’intoxication. Les plus problématiques étant les protéines animales (viande, poisson, produits laitiers), qui risquent de se détériorer si elles ne sont pas conservées correctement. « En général, les familles respectent nos conseils dans la mesure où on leur explique que c’est ce qu’il y a de mieux pour la santé de leur proche », assure Mathilde Gibeaux. Les soignantes peuvent être amenées à rappeler les bonnes pratiques : les produits frais doivent être apportés dans une glacière, puis vite consommés. Concernant les restrictions d’ordre diététique, des entorses peuvent être admises si le patient est dénutri, par exemple. Mais les infirmières doivent en référer au médecin, seul habilité à en décider. « La souplesse est le maître-mot, rappelle Mathilde Gibeaux. Pour un anniversaire, on peut parfois envisager de donner un peu de gâteau à un patient diabétique. Mais en le plaçant au bon moment du repas, pour ne pas trop faire grimper la glycémie. Pas question de mettre sa santé en danger ! »
→ Le plus souvent, les familles qui apportent de la nourriture le font pour des raisons culturelles ou religieuses. « Certains patients peuvent refuser la viande qu’on leur propose, si bien qu’ils mangent essentiellement des omelettes ou des œufs durs, pointe Mathilde Gibeaux. Ce n’est pas une alimentation très variée : dans ce cas, il est donc préférable d’autoriser leur famille à apporter de la viande casher ou halal. » En outre, la dimension éminemment culturelle du repas a un effet non négligeable sur le moral de certains patients. « On avait une dame âgée qui ne mangeait pratiquement rien, se souvient la diététicienne. Puis on s’est rendu compte qu’elle s’alimentait avec plaisir dans le jardin, avec sa famille, qui lui apportait de la nourriture asiatique. » Des cas qui justifient une certaine souplesse de la part des soignants.
→ Informer les familles qu’elles doivent prévenir le personnel lorsqu’elles apportent des denrées.
→ Placer les plats cuisinés et les produits frais dans des boîtes hermétiques, les étiqueter en indiquant le nom du patient et la date de reìception.
→ Stocker les boîtes dans le réfrigérateur (entre 0 °C et + 3°C).
→ Respecter la durée de stockage : un jour pour les plats cuisinés, jusqu’à la date limite de consommation pour les produits frais industriels.
→ Noter dans le dossier patient les plats consommés extérieurs au service restauration.
→ Laver les boîtes au lave-vaisselle après usage.
→ Vérifier régulièrement les denrées stockées par les patients dans leur chambre et jeter tous les produits dont les bonnes conditions de conservation n’ont pas été assurées.
Normes vétérinaires et sanitaires À l’hôpital, comme dans les structures médico-sociales, la fonction restauration doit respecter les normes vétérinaires et sanitaires européennes. Mais il n’existe aucune réglementation spécifique concernant les denrées venues de l’extérieur. Chaque établissement applique donc sa propre politique, plus ou moins stricte, souvent expliquée dans le livret d’accueil remis aux patients à leur arrivée - essentiellement basée sur le respect de l’hygiène (voir « Bonnes pratiques »).
Règles nutritionnelles Celles-ci sont, elles, partout les mêmes, et le diététicien nutritionniste de la structure en est le garant. « Il existe de nombreux régimes particuliers : pauvre en glucides pour les diabétiques, sans résidus, sans sel…, détaille Mathilde Gibeaux. Nous devons particulièrement sensibiliser les familles de ces patients. »
En pratique Pour aider les soignantes à s’y retrouver, certains établissements disposent d’un logiciel où les spécificités alimentaires de chaque patient sont détaillées : régime, mais aussi textures, portions, éventuellement allergies et même préférences. Elles peuvent s’y référer afin de renseigner les membres de la famille sur ce qu’il est possible d’apporter ou non.