L'infirmière Magazine n° 414 du 01/04/2020

 

ÉDITORIAL

HÉLÉNE TRAPPO  

RÉDACTRICE EN CHEF

À la vitesse où se propage l’épidémie, je n’ose penser à la situation, lorsque vous recevrez ce numéro, des médecins, infirmières, aides-soignants, auxiliaires de vie, aides à domicile… tous plongés dans un scénario catastrophe depuis déjà quelques semaines. Tous frappés de plein fouet par une crise sanitaire sans précédent, certes, mais aussi victimes de ce que l’on peut appeler un cafouillage, quand ce n’est pas de l’amateurisme ! Les discours peu clairs et peu convaincants sur le port des masques, ajustés au contexte de pénurie plus que sur des données probantes, sont emblématiques des incohérences de cette gestion de crise. Comment tenir dans la durée quand on part « au front » avec la peur au ventre, parce que l’on ne dispose pas des protections nécessaires, notamment en secteur libéral, en Ehpad, en psychiatrie, ou encore parce que l’on n’est pas suffisamment formé à la prise en charge de patients atteints de Covid-19 ? Comment rester indemne quand on se trouve confronté à des décès en masse, à ce que l’on nomme froidement « la priorisation de l’accès aux soins critiques dans un contexte de pandémie », traduisez la nécessité d’effectuer des choix tragiques devant l’impossibilité de soigner tous ceux qui peuvent l’être ? Malgré cela, les témoignages que l’on peut recueillir dans les médias, sur les réseaux sociaux, montrent le courage, la détermination admirable des soignants, bien là tant qu’ils sont encore debout pour combattre l’épidémie. Mais leur mise en danger à tous les niveaux, physique, psychologique, n’en reste pas moins inacceptable. Viendra l’heure des explications et ce ne sera pas possible pour nos dirigeants de ne pas tenir compte de tout cela. Après un an de grève et une crise sanitaire, les soignants devront enfin être entendus. Et pas de quoi applaudir. Ce sera légitime.