L'infirmière Magazine n° 415 du 01/05/2020

 

POLITIQUE SANTÉ

ACTUALITÉS

FOCUS

ADRIEN RENAUD  

Durant les mois de mars et avril, Emmanuel Macron, Édouard Philippe et Olivier Véran ont rivalisé d’ingéniosité pour annoncer des mesures financières en faveur d’un système de santé gravement secoué par le coronavirus.

La santé n’a pas de prix, mais elle a un coût. Cet adage bien connu prend un sens tout particulier pour un gouvernement qui se trouve confronté, avec le Covid-19, à « la plus grave crise sanitaire qu’ait connue la France depuis un siècle », selon les mots du Président dans son allocution du 12 mars. Et qui dit crise exceptionnelle dit réponse du même acabit, y compris sur le plan financier.

« Huit milliards d’euros sont prévus pour les dépenses exceptionnelles de santé pour faire face à l’épidémie », a ainsi annoncé Édouard Philippe, à l’issue du conseil des ministres du 15 avril. Des mesures qui doivent permettre « d’investir dans l’achat de matériel et de masques pour près de quatre milliards, et de financer les mesures pour le personnel soignant », a-t-il précisé.

C’est probablement cette seconde partie du plan gouvernemental qui a été la plus commentée. « Nous verserons une prime, exempte de tout prélèvement social ou fiscal, de 1 500 € à tous les personnels qui gèrent la crise du Covid-19 dans les hôpitaux des départements les plus touchés, ainsi qu’aux personnels des services ayant accueilli des patients Covid dans les départements moins touchés, a indiqué le Premier ministre. Et pour tous les autres personnels des hôpitaux ne bénéficiant pas du taux maximal tel que je viens de le décrire, nous verserons 500 €. »

Réactions mitigées

Les réactions à l’annonce des huit milliards gouvernementaux sont cependant restées mitigées. « Méfiance entre les discours et la réalité », s’est par exemple exclamé, à propos de la prime de 1 500 €, Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI-CFECGC) dans un communiqué.

« Il est difficile de ne pas saluer cette aumône », a de son côté estimé le collectif Interurgences, ajoutant aussitôt que la prime en question ne réglait en rien les revendications portées par le mouvement depuis plus d’un an : augmentation des salaires, ouvertures de lits et recrutement de personnel.

L’effort consenti par le gouvernement n’est pourtant, à son échelle, pas négligeable. Pour en juger, il faut comparer les huit milliards promis à l’ensemble des dépenses de santé financées par la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2020, qui s’établissaient à 206 milliards d’euros. L’augmentation de l’Objectif national de dépenses d’Assurance maladie (Ondam) passerait, du fait des dépenses exceptionnelles, de 2,5 à 7 %, a estimé Olivier Véran à l’issue du conseil des ministres.

Un plan (d’investissement) sur la comète ?

Mais surtout, les annonces gouvernementales ne se sont pas arrêtées aux huit milliards. En déplacement à l’hôpital de Mulhouse, le 25 mars, Emmanuel Macron avait en effet promis pour l’après-pandémie « un plan massif d’investissement » pour l’hôpital et une « revalorisation de l’ensemble des carrières ». Depuis, cependant, peu de détails et aucun chiffre ne sont venus donner corps à la promesse présidentielle. Il faut dire que l’incertitude sur le contexte économique de l’après-crise est totale. Le Premier ministre tablait, dans son allocution du 15 avril, sur une contraction du PIB de l’ordre de 8 %, ce qui devrait mécaniquement peser sur les recettes fiscales et sur celles de l’Assurance maladie. Le déficit public devrait par ailleurs, selon Édouard Philippe, monter à 9 % du PIB, et la dette devrait s’élever à 115 % du PIB. On peut donc légitimement se demander si, dans ces conditions, le gouvernement aura les moyens de financer ses promesses mirobolantes.

SÉCURITÉ SOCIALE

Un PLFSS rectificatif courant 2020

Le directeur général de la Caisse nationale d’Assurance maladie (Cnam), Nicolas Revel, a estimé le 15 avril dernier, lors d’une audition par la commission des affaires sociales du Sénat, qu’il était trop tôt pour introduire un Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) rectificatif. « Qu’il y ait un PLFSS rectificatif courant 2020 me paraît évident », a-t-il indiqué, cité par l’agence APMNews. Mais il a ajouté que ce dernier ne pourrait selon lui intervenir « que lorsque l’on aura un peu stabilisé quelques éléments de moindre dépense et de sur-dépense ».