EFFETS INDÉSIRABLES
SUR LE TERRAIN
MON QUOTIDIEN
BRIGITTE MILPIED-HOMSI* SANDRINE LANA**
*DERMATOLOGUE, HÔPITAL SAINT-ANDRÉ, CHU BORDEAUX
Vous portez un masque en permanence depuis près de deux mois (au moins !). On rougit, ça gratte, et en plus, le lavage vous assèche les mains durablement… « Avec le port du masque, on a observé des lésions d’irritation au niveau de l’arête nasale, indique le Dr Milpied-Homsi, dermatologue au CHU de Bordeaux. À force de se pincer le masque sur le nez, de petites rougeurs et des squames peuvent survenir. On peut aussi voir apparaître de l’acné rosacée à cause de la chaleur sous le masque et des pustules. » Que faire ? Privilégier le minimalisme : « Si vous portez un masque toute la journée, inutile d’appliquer un fond de teint ou des crèmes grasses. À la place, privilégiez une crème hydratante légère, non comédogène. J’aime aussi l’utilisation d’eau thermale tamponnée à l’aide d’un coton ou mouchoir en papier. » On peut, comme l’a expérimenté une infirmière, passer un trombone dans les lanières élastiques de son masque pour les retenir à l’arrière du crâne, afin de diminuer l’irritation derrière les oreilles.
En prévention, il faut privilégier des crèmes non parfumées et des eaux thermales à pulvériser et à tamponner délicatement. Si l’irritation est bel et bien installée, utilisez une crème légère apaisante, émolliente ou cicatrisante, juste aux endroits sensibilisés par le frottement, comme l’arête du nez ou l’arrière des oreilles.
Au niveau des mains, les lavages répétés augmentent les agressions. « De plus, les bio-nettoyants utilisés à mains nues sont de grands pourvoyeurs d’irritations. Ils sont malheureusement recommandés pour le nettoyage des surfaces », poursuit le DrMilpied-Homsi. Dans les savons, le problème réside dans la présence des tensio-actifs. Parfaits pour enlever les salissures des mains, ils y décapent également le sébum naturellement présent.
→ Sous un masque, éviter le maquillage ainsi que les crèmes parfumées (allergènes). En cas de mains abîmées et de port prolongé de gants, pensez aux gants de coton lavables à glisser sous ceux en caoutchouc, vendus en pharmacie.
→ En cas de mains souillées, ne jamais utiliser de savon antiseptique (Hibiscrub…).
→ Attendre que les mains soient bien sèches avant d’enfiler des gants et éviter le port de gants plus de trente minutes d’affilée.
→ Limiter les activités de ménage, de bricolage ou de jardinage, qui pourraient traumatiser vos mains.
→ Porter des gants lors de la manipulation de produits irritants (liquide vaisselle, détergents…).
→ Le rinçage des mains est essentiel pour éviter les irritations. Le temps de rinçage doit être deux fois plus long que celui de lavage. Une dose de savon suffit.
→ Les solutions hydroalcooliques (SHA) sont mieux tolérées par la peau que les savons, contrairement à ce que l’on en pense, indique la Société française de dermatologie. Elles sont à privilégier dans les services de soins.
→ Les SHA ne doivent pas être utilisées sur des mains souillées mais bien pour se les désinfecter entre chaque soin, après avoir touché un patient ou son propre visage.
→ Ne pas laver les mains au savon et utiliser la SHA en même temps.
→ Les irritations dues à l’usage des SHA arrivent en général sur des mains déjà abîmées. Si c’est le cas, il est préférable de privilégier un pain surgras ou un syndet doux à la place du savon classique.
→ La solution ne doit pas piquer si elle est employée sur des mains saines.
→ Après avoir testé une crème émolliente, il peut être nécessaire de consulter un dermatologue ou la médecine du travail si une dermite d’irritation persiste.
Quels signes ? Les principaux signaux sont des sensations de brûlure, de cuisson ou de démangeaison de la peau, des rougeurs et/ou de fines desquamations. Souvent, ces signes apparaissent sur le dos des mains et entre les doigts et peuvent atteindre ensuite l’ensemble de la main et du poignet.
Quelles complications ? Si le problème persiste, cela peut faire le lit d’une allergie de contact. Elle apparaît là où la peau est en contact avec une molécule chimique qu’elle ne supporte pas car elle s’est sensibilisée à cette molécule. Il faut alors vite la traiter car si elle s’installe, elle ne disparaîtra pas et la désensibilisation n’est pas possible.
Quel traitement ? La prescription d’une crème à la cortisone pourrait être utile, voire des tests cutanés afin de trouver les molécules chimiques de l’environnement professionnel ou du domicile potentiellement allergisantes. En prévention, appliquer des crèmes émollientes en dehors des périodes de travail, pour éviter l’interaction avec la SHA (au moins trois fois par jour).