Grande oubliée des plans cancer, la vie sexuelle des patients doit être prise en compte, même si la crainte de la mort prime sur tout souci intime.
Si diminuer l’impact du cancer sur la vie personnelle constitue bien l’un des dix-sept objectifs du Plan cancer 2014-2019, les conséquences de la maladie sur la vie intime et sexuelle des patients passent aujourd’hui encore complètement sous silence. Dès 2010 pourtant, la blogueuse Catherine Cerisey évoquait le sujet, regrettant le peu d’informations sur cette question et suscitant de nombreuses réactions
Pour autant, quelques oncologues commencent également à se former à la sexologie via des diplômes universitaires et on commence à parler de « sexo-oncologie ». « J’ai le sentiment qu’une certaine forme de médicalisation de la vie intime du malade se met en place, se méfie Giovanna Marsico, directrice de la plate-forme web cancercontribution.fr. La question est simplement de préserver la qualité de vie de la personne malade. Dans certains centres de lutte contre le cancer où les soins de supports sont développés, il devient possible d’être accompagné par un psychologue ou sexologue. Les infirmières, à qui les patients confient plus aisément qu’aux médecins leurs difficultés personnelles, peuvent être des médiatrices ». Selon une enquête de l’Association française des soins de support (AFSOS), un tiers des patients estime que la sexualité n’est pas (ou plus) leur préoccupation, un tiers présente des troubles dont le traitement est très facile et accessible et un dernier tiers souffre de troubles plus complexes pour lesquels néanmoins des solutions existent. Toutefois, dans le même temps, « demeure la timidité de parler de quelque chose de très privé à son médecin et aussi la crainte de lui faire perdre du temps, explique Giovanna Marsico. Le patient se sent presque coupable d’aborder cette sphère de sa vie, redoutant de ne pas se montrer capable de repositionner les choses importantes ».
Cause ou conséquence, dans les faits cet aspect du support est encore largement délégué aux associations de patients qui s’y sont investies, essentiellement celles qui s’adressent aux femmes atteintes de cancer du sein. « Les soins de support ne s’intéressent pas encore énormément à la sexualité, estime la psychologue Catherine Adler. Quand il est vrai, qu’au sein de l’hôpital, des psychologues prennent en charge ces questions, une fois les traitements terminés, les femmes ne savent pas où aller ». Catherine Adler travaille pour l’association Étincelles destinée aux femmes touchées par le cancer. Elle y reçoit des patientes en consultation d’onco-psychologique et anime des groupes de paroles de femmes et de proches. « Dans les groupes de paroles pour les conjoints, je souhaite qu’ils viennent seuls afin qu’ils s’expriment librement, explique-t-elle. Pour autant, ils ne viennent pas spontanément et sont souvent poussés par leur femme. En outre, quand je les interroge sur l’impact de la maladie sur la sexualité du couple, la plupart répondent que telle n’est pas leur priorité, alors même qu’ils sont dans l’angoisse de perdre leur compagne ». Selon les associations de patientes, les séparations provoquées par l’apparition de la maladie seraient relativement peu fréquentes. « C’est exceptionnel que l’homme s’en aille dans ces moments, témoigne Catherine Adler. Quand cela se produit, c’est que le couple était déjà en crise depuis longtemps ou alors qu’il s’agit de couples très jeunes ou de fraîche date ». Parfois, c’est la femme malade qui décide de s’éloigner de son conjoint « si elle ne s’aime plus et ne veut plus se placer dans la séduction ».