Chaque année, les Idels doivent transmettre à l’administration fiscale leur « 2035 ». Ce document récapitule les opérations comptables professionnelles de l’année. Pour ne pas être prise au dépourvu, mieux vaut s’organiser sur l’année.
La déclaration fiscale professionnelle 2035 doit être établie par toutes les personnes physiques ou morales qui déclarent leurs revenus dans la catégorie des Bénéfices non commerciaux (BNC). Les infirmières libérales (Idels) sont donc concernées par cette démarche. Cette liasse fiscale leur permet d’informer l’administration fiscale de leur bénéfice, donc, de la base imposable qu’elles vont retranscrire sur leur déclaration de revenus. Une fois la 2035 établie, elles doivent remplir leur déclaration sociale des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (DSPAMC) sur le site Net-entreprises afin de communiquer à l’Urssaf et à la Carpimko leurs revenus, et recevoir les régularisations de charges.
Remplir le formulaire 2035 demande un certain temps. Les professionnelles de santé libérales doivent donc s’y prendre suffisamment à l’avance afin de respecter la date butoir et ainsi bénéficier, en cas de contrôle, des règles de la procédure contradictoire. Dans ce cadre, il appartient à l’administration de prouver l’erreur s’il y en a une, contrairement à la procédure d’imposition d’office qui s’applique en cas de dépassement de la date butoir. Lorsque la libérale décide d’effectuer elle-même sa comptabilité, elle doit disposer d’un logiciel comptable, lequel est souvent inclus dans son logiciel de facturation. L’infirmière, ou son expert-comptable si elle en a un, reprend alors chaque ligne du relevé bancaire du compte professionnel pour le recopier dans le logiciel comptable.
« Tous les montants au débit et au crédit doivent être retranscrits », souligne David Hivin, expert-comptable. C’est la différence entre les recettes et les dépenses qui détermine le bénéfice non commercial, à savoir le revenu net avant impôt sur le revenu.
Pour s’assurer qu’aucune recette ou dépense n’a été omise, il est nécessaire de procéder à des rapprochements entre la comptabilité et les relevés bancaires (pointage et identification des différences). « Lorsqu’elles font appel à nos services, nous demandons aux infirmières libérales de nous envoyer, chaque trimestre, l’ensemble des pièces dont nous avons besoin, fait savoir l’expertcomptable. À celles qui effectuent leur comptabilité elles-mêmes, nous leur conseillons de respecter ce rythme également. »
Pour déclarer ses dépenses dans la 2035, la soignante doit posséder tous les justificatifs. Et, dans l’idéal, pour une saisie optimale, ils doivent être classés dans l’ordre du relevé bancaire. « Le travail de l’expert-comptable consiste à vérifier que pour chaque dépense, l’Idel nous a fourni un justificatif, rapporte David Hivin. Lorsque ce n’est pas le cas, nous le demandons à l’Idel et si elle n’en dispose pas, alors nous ne mentionnons pas la dépense. » Au cas où une dépense sans justificatif serait déduite dans la 2035, la professionnelle encourt un redressement et des majorations pouvant aller jusqu’à 40 % si la mauvaise foi est prouvée. En cas de contrôle, les justificatifs des dépenses peuvent être demandés par l’administration fiscale.
Les Idels doivent donc respecter un temps de conservation des pièces justificatives :
→ dix ans pour les dépenses professionnelles ;
→ toute la durée d’utilisation des investissements dont l’infirmière est propriétaire et faisant partie de son patrimoine professionnel (voiture, ordinateur) ;
→ sans limitation de temps pour les bordereaux de remise de chèques, les relevés bancaires, les souches de chéquier, les contrats de bail, les contrats de location, les tableaux d’emprunt des biens professionnels, l’agenda de tournée.
Dans le cadre de ses missions, l’expert-comptable a une obligation de moyens et non de résultats. « Nous faisons au mieux au regard des documents qui nous sont communiqués par nos clientes, indique David Hivin. Si une erreur est constatée par l’administration fiscale, l’expertcomptable prend en charge les majorations, car nous avons une assurance en responsabilité civile qui permet de couvrir ce type de risque. »
S’il n’y a pas de liste exhaustive des dépenses pouvant être déduites des revenus, outre l’existence d’un justificatif, l’administration fiscale considère toutefois que deux règles doivent être respectées.
La dépense doit avoir été effectuée dans l’intérêt de l’activité professionnelle.
« Cette notion est très large et c’est là qu’entre en jeu l’appréciation de la professionnelle qui effectue la déclaration », explique David Hivin. Ainsi, par exemple, les vêtements civils ne sont pas considérés comme une dépense dans l’intérêt de l’activité professionnelle. Seules le sont la blouse, la surblouse, la charlotte, etc., soit tout ce que l’Idel va utiliser pour réaliser son travail. Les repas peuvent être déduits, mais à condition que l’infirmière ne puisse pas rentrer chez elle, notamment si elle est en tournée. C’est le cas également si elle déjeune au restaurant avec des partenaires, des collègues, son avocat ou son expert-comptable, donc dans un cadre en lien avec son activité professionnelle.
Parmi les autres dépenses déductibles, toujours à condition qu’elles soient liées à l’activité professionnelle : les frais de déplacement (voiture, scooter, moto, vélo, trottinette, transports en commun), le matériel informatique, les assurances (RCP, voiture, local, prévoyance, cotisation loi Madelin), les frais de téléphone et d’Internet, le loyer du cabinet, les frais de formation pour son métier ou pour une reconversion, les honoraires des professionnels auxquels l’Idel fait appel pour son activité (avocat, expert-comptable).
Dans les dépenses sont également pris en compte les investissements ou immobilisations, c’est-à-dire un bien durable dont l’infirmière est propriétaire. Dans ce cas, la déduction n’intervient pas en une seule fois, mais est échelonnée dans la durée. C’est pourquoi la tenue d’un registre des immobilisations et amortissements est obligatoire.
La dépense doit être raisonnable dans son montant et/ou en quantité. Cette notion, abstraite, relève là aussi de l’appréciation de la personne qui effectue la déclaration et de l’administration fiscale en cas de contrôle. « C’est aussi le rôle de l’expert-comptable d’apprécier la déductibilité des dépenses, fait savoir l’expert-comptable. Les Idels qui remplissent elles-mêmes leur 2035 peuvent avoir tendance à déduire des dépenses que l’expert-comptable ne déduirait pas, ce qui peut poser problème en cas de contrôle. »
Chaque année, en mars, la Caisse primaire d’assurance maladie (Cpam) des professions médicales et paramédicales envoie leur relevé Snir (système national inter-régimes) aux libéraux. Ce document, qui récapitule l’ensemble des encaissements de l’année en lien avec les télétransmissions effectuées, facilite la saisie des données pour la 2035.
Attention, l’Idel qui n’envoie pas sa 2035 avant la date butoir, fixée chaque année courant mai, encourt une majoration de 10 % sur le montant du bénéfice à l’impôt sur le revenu ainsi que des intérêts par jour de retard. Elle peut aussi écoper d’une amende par feuillet non déposé.
Jusqu’à présent, les professionnels libéraux devaient adhérer à un organisme de gestion agréé (OGA), chargé du contrôle de vraisemblance et de cohérence des déclarations de leurs adhérents, qui effectuait un premier ciblage des éventuels fraudeurs. Les professionnels non adhérents voyaient donc leur résultat imposable majoré de 25 %.
Le développement de l’informatisation de la comptabilité a conduit le Gouvernement à revoir cette pratique. La loi de finance pour 2021 prévoit la disparition progressive de cette majoration de 25 % du résultat imposable pour les non-adhérents à un OGA. Une suppression qui va s’étaler jusqu’aux résultats imposables au titre de 2022.