L'infirmière n° 008 du 01/05/2021

 

PARTAGE D’INFORMATIONS

J’EXERCE EN LIBÉRAL

FORMALITÉS

Laure Martin  

En tant que professionnelles libérales, les infirmières ont des obligations à respecter concernant l’utilisation des données de santé. Il en va de la sécurité des informations concernant leurs patients.

La transformation numérique du système de santé porté par le ministère et l’Agence du numérique en santé (ANS) repose notamment sur le déploiement d’outils et de services. Des évolutions qui nécessitent d’intégrer dans sa pratique, si ce n’est déjà fait, les obligations en termes de sécurité des données et d’identitovigilance.

UNE MESSAGERIE SÉCURISÉE

Exit l’usage de WhatsApp et autres applications non sécurisées. Résultats d’examens, diagnostic, antécédents, etc., les Idels ont l’obligation d’utiliser une messagerie sécurisée pour tout échange avec les autres professionnels de santé et les usagers dès lors qu’il s’agit de communiquer sur les données de santé concernant les patients. Ces informations personnelles sont considérées comme sensibles et protégées par la loi. Tout professionnel de santé est donc tenu de respecter le cadre juridique qui régit l’échange de ces données ainsi que leur hébergement. D’autant plus depuis l’entrée en vigueur, en mai 2018, du Règlement général sur la protection des données (RGPD). Par conséquent, un professionnel qui persisterait à échanger par SMS ou à utiliser une messagerie non sécurisée prend le risque de voir sa responsabilité engagée et de s’exposer à des poursuites si des éléments à caractère personnel étaient dévoilés. Pour choisir sa messagerie sécurisée, la meilleure option s’offrant aux Idels est de faire appel à l’un des opérateurs présents dans l’espace de confiance MSSanté. Ce système regroupe l’ensemble des opérateurs de messagerie qui se sont engagés à respecter, de manière contractuelle, les exigences de sécurité et d’interopérabilité (compatibilité des systèmes de messagerie entre eux) définies par l’ANS, gestionnaire de l’espace de confiance, ainsi que le RGPD. Le recours à une messagerie sécurisée permet également de faciliter les échanges, notamment entre professionnels de santé et du social, de la ville et de l’hôpital, et concourir, de fait, à une meilleure coordination des soins.

L’IDENTIFICATION DES USAGERS

Les erreurs d’identification aux conséquences parfois dramatiques devraient ne plus être qu’un lointain souvenir, ou presque. Obligatoire depuis le 1er janvier 2021 pour référencer les données de santé, l’utilisation de l’INS (identité nationale de santé) permet de fiabiliser le référencement des données de santé et administratives des usagers. Ce qui pour effet de faciliter l’échange et le partage des données entre acteurs, contribuant ainsi à améliorer la prise en charge et la sécurité des soins. L’INS se compose d’un numéro (NIR ou NIA*) associé à cinq traits d’identité : nom de naissance, prénom, date de naissance, sexe et lieu de naissance (code INSEE). L’implémentation de l’INS dans les systèmes d’information de santé relève de la responsabilité des industriels éditeurs de logiciels de santé. Mais il revient aux professionnels de santé de s’inscrire dans une démarche d’identitovigilance en veillant notamment à bien renseigner dans leur système informatique les cinq traits d’identité pour chacun de leur patient. Ils se doivent donc de contrôler au moins une fois ces éléments en consultant les bases de données nationales de référence. C’est le cas pour les Idels, même si elles prennent en charge leurs patients depuis plusieurs années, afin qu’ils aient le statut d’identité qualifiée. En effet, certaines personnes ne se font pas appeler par leur nom ou prénom d’état civil. De fait, lors de l’échange automatisé par des systèmes d’information, cela peut induire des erreurs si l’on n’a pas veillé auparavant à ces questions d’identitovigilance.

Concrètement, il suffit pour l’Idel de se connecter, grâce à sa carte de professionnel de santé, au téléservice INSi mis en œuvre par l’Assurance maladie. Il permet de récupérer l’INS d’un usager et de vérifier la conformité de celle enregistrée dans sa base ou envoyée par un tiers avec les bases de données de référence.

* NIR : numéro d’inscription au répertoire national des personnes physiques.

NIA : numéro d’identifiant en attente.

Savoir +

→ Page d’information MSSanté : bit.ly/3dsuOoI

→ Site de l’Espace de confiance MSSanté : https://mssante.fr

→ Les services raccordés à Pro Santé Connect : bit.ly/3fJdmiO

Des outils à connaître et à mettre en œuvre

L’identification et authentification électronique

La carte de professionnel de santé (CPS) garantit l’authentification forte des professionnels de santé, dont les infirmières libérales, lors de chaque connexion à un système d’information de santé. Une fois détenteur d’une e-CPS, il est affilié à Pro Santé Connect. Cet outil lui permet, en s’authentifiant une seule fois, d’être relié à une cinquantaine de services nécessitant une identification forte : le dossier médical partagé (DMP), la MSSanté ou encore le bouquet de services pro. Les infirmières libérales sont toutes éligibles à la carte e-CPS, à partir du moment où elles disposent d’un numéro Adeli. En novembre 2020, environ 20 000 e-CPS actives étaient en circulation. L’objectif est d’atteinte 100 000 e-CPS activées à l’été 2021.

Le dossier médical partagé

Le DMP permet de répondre aux exigences de sécurité nécessaire au stockage et au partage des données de santé. Depuis fin 2018, les Idels sont habilitées à en ouvrir pour leur patient, à les alimenter et à les consulter. Mais la pratique n’est pas encore totalement entrée dans les mœurs. D’ici 2022, ce sera l’ENS qui assurera l’articulation de l’ensemble de ces fonctionnalités. Dès son ouverture, tous les acteurs de santé concernés pourront inscrire dans le DMP le volet de synthèse médicale (VSM), les comptes rendus de biologie et d’imagerie ainsi que la lettre de liaison de sortie incluant le compte rendu d’hospitalisation. La loi d’Accélération de la simplification de l’action publique (Asap) prévoit l’élargissement de l’accès en consultation et en alimentation aux DMP aux professionnels et structures sociales et médico-sociales

LE CARNET DE BORD DE MARIE-CLAUDE DAYDÉ, infirmière libérale

[Cotation]

Nous suivons un patient de 93 ans atteint d’une carcinose avec des localisations osseuses, en soins palliatifs, et le bilan de soins infirmiers que nous avons effectué relève d’un BSC. Nous intervenons le matin et le soir et facturons alternativement le forfait le matin. Peut-on coter la majoration coordination infirmière (MCI) avec le forfait ? Peut-on la facturer lorsque l’on ne facture que le déplacement ?

La MCI peut en effet être cotée chez ce patient puisque cette majoration de coordination infirmière concerne les pansements lourds et complexes et/ou les soins palliatifs à domicile. Dans ce dernier cas, la majoration s’applique, qu’il s’agisse d’actes ou de séances de soins. Dans le cas présent, si une seule professionnelle facture le forfait, chaque infirmière va, à l’occasion de son intervention, facturer ses actes techniques, ses déplacements ainsi que les majorations pouvant être facturées en plus du forfait (dimanches, fériés, nuits selon le cas), dont la majoration coordination infirmière dans cette situation. Donc, le matin seront facturés BSI + MCI + déplacement, et le soir MCI + déplacement en ajoutant les actes techniques (en AMX) s’il y en a.

[À propos de…]

LA GESTION DES URGENCES EN VILLE

Adapter le parcours de soins des patients ayant recours aux urgences fait l’objet d’une expérimentation, avec rémunération d’un forfait de réorientation, visant à désengorger les urgences hospitalières et à solliciter le bon interlocuteur au bon moment. Nous le constatons régulièrement, les urgences, « conçues à l’origine pour prendre en charge les patients requérant un plateau technique complet, sont devenues des lieux d’accueil et de traitement pour tous les patients ». L’idée est donc de réorienter certains patients vers des structures alternatives adaptées (centres médicaux d’urgentistes libéraux, maisons médicales de garde, maisons de santé, organisations dans le cadre des CPTS…) pouvant répondre aux soins non programmés. Il importe que l’offre soit visible et bien identifiée, pour que patients et professionnels s’en saisissent. Par ailleurs, le développement des services d’hospitalisation de jour permet d’écourter les séjours en structure hospitalière, notamment en cancérologie. Mais il faut savoir que les Idels peinent souvent à trouver un lit d’accueil le week-end pour ces patients, car les services de jour sont fermés et parfois sans relais, renvoyant les patients aux urgences « générales » ! Dommage !