FIN DE VIE ET DIGNITÉ - Ma revue n° 008 du 01/05/2021 | Espace Infirmier
 

L'infirmière n° 008 du 01/05/2021

 

DROITS DU PATIENT

JE ME FORME

JURIDIQUE

Jean-Charles Scotti  

avocat au barreau de Marseille jcs@scotti-avocat.fr

Un patient en fin de vie m’oppose le respect de sa dignité pour faire valoir son droit au refus des soins. Comment dois-je comprendre cette notion ?

Nombre d’articles du Code civil et du CSP font référence à la dignité comme principe directeur des soins. Ainsi, l’article 16 du Code civil énonce que « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. » Selon l’article L 1110-2 du CSP, « la personne malade a droit au respect de sa dignité », et selon l’article L 1110-5, « toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté ». Enfin, l’article L 1110-10 indique que « les soins palliatifs sont des soins actifs et continus. […] Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage ».

Ainsi, du point de vue du patient en fin de vie, sont attentatoires à sa dignité tous les soins disproportionnés et voués à l’échec qui le transformeraient en objet thérapeutique. Une notion que l’on peut déduire de l’article L 1110-5-1 du CSP : « Les actes mentionnés à l’article L 1110-5 ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu’ils résultent d’une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient. » Il s’agit là d’une obligation, si l’on considère les sanctions confirmées par la jurisprudence(1) qui retient un défaut de soin attentif à la dignité comme une faute soignante à part entière.

RÉFÉRENCES

1. • Absence de soins palliatifs (Cour administrative de Bordeaux, 13 juin 2006, Marie X. contre le CH Gabriel Martin, n° 03BX01900). Face à l’état de souffrance et la pathologie d’un patient, l’absence de traitement antalgique a aggravé ses souffrances physiques ; cela constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l’établissement à l’égard des ayants droit pour préjudice moral.

• Soins palliatifs perturbés (Cour administrative de Lyon, 17 juin 2008, CH Mâcon, n° 05LY01052). Alors qu’une patiente avait commencé à recevoir des soins palliatifs après transfert vers une unité spécialisée, elle a continué d’être transportée, malgré la précarité de son état, trois fois par semaine vers l’hôpital de Mâcon, distant d’une vingtaine de kilomètres, pour y subir des dialyses ; l’hôpital, qui n’allègue ni n’établit qu’il n’aurait pu prendre en charge l’intéressée jusqu’à son décès malgré l’absence d’unité de soins palliatifs, a fait subir à l’intéressée des souffrances importantes et inutiles, dans des conditions incompatibles avec les objectifs assignés à de tels soins ; la responsabilité du centre hospitalier est engagée à l’égard du mari pour préjudice moral.