JE ME FORME
PRISE EN CHARGE
Thierry Pennable* Dr Marc Le Fort** Gaëlle Chopin*** Dr Pierre Rumeau****
*respectivement chef de service et infirmière du service de Médecine physique et réadaptation neurologique au CHU de Nantes
**hôpital de jour de Médecine gériatrique et télémédecine, et Centre ressource en escarres gériatriques à l’hôpital Purpan de Toulouse
L’escarre est une plaie d’origine ischémique. Elle est la plupart du temps consécutive à une hypoxie tissulaire provoquée par une compression excessive et prolongée des tissus mous entre un plan « dur » et une saillie osseuse. Les escarres, aussi appelées plaies de pression, correspondent à des zones de nécrose et d’ulcération des tissus mous dont la formation peut débuter en seulement deux heures. Trois types d’escarre sont distingués en fonction de la situation(1) :
→ l’escarre « accidentelle » liée à un trouble temporaire de la mobilité et/ou de la conscience ;
→ l’escarre « neurologique » liée à une pathologie chronique, motrice et/ou sensitive. Cette escarre est surtout localisée au niveau du sacrum ou du trochanter et présente un fort risque de récidive nécessitant une stratégie de prévention et d’éducation ;
→ l’escarre « plurifactorielle » liée au confinement au lit et/ou au fauteuil du patient polypathologique en réanimation, en gériatrie ou en soins palliatifs. Ses localisations peuvent être multiples.
La pression : dans le contexte de l’escarre, la pression s’entend comme une force exercée perpendiculairement entre un plan plus ou moins rigide et une proéminence osseuse. La compression des tissus mous (graisse, muscles, tissus fibreux, vaisseaux sanguins, vaisseaux lymphatiques et nerfs) entraîne une occlusion au niveau de la microcirculation vasculaire du tissu atteint, une ischémie et une hypoxie tissulaire. Si cette pression est très prolongée et/ou très forte, les lésions deviennent irréversibles et conduisent à une nécrose. Les principales localisations sont : le sacrum, les parties inférieure et postérieure de l’os iliaque (tubérosité ischiatique), les trochanters, les malléoles et les talons (voir le schéma p. 21).
Le cisaillement : il correspond à une force exercée de façon tangentielle entre les tissus superficiels, qui restent en contact avec les surfaces externes, et les tissus profonds, muscles et tissus sous-cutanés, tirés vers le bas par la gravité. C’est notamment le cas lorsque le patient se trouve sur un plan incliné. Le sacrum est la zone la plus souvent concernée lorsque le patient glisse alors qu’il est installé en position semi-assise dans son lit ou dans son fauteuil, avec le tronc relevé à plus de 30° (voir le schéma ci-dessous).
À noter que phénomènes de pression et cisaillement peuvent être associés.
En début de prise en charge, la description et l’évaluation des escarres sont indispensables à l’élaboration d’une stratégie de traitement et de soins : nombre, localisation, stade, mesures de la surface et de la profondeur, aspect de la peau périlésionnelle, douleur.
Durant la prise en charge, l’évaluation de l’évolution est nécessaire à la pertinence des décisions de traitement et à leur réajustement.
Parmi les différents systèmes permettant de décrire une escarre, la classification du National Pressure Ulcer Advisory Panel (NPUAP) est la plus utilisée. Elle distingue quatre stades de l’escarre selon l’étendue des lésions des tissus mous, le plus grave atteignant l’os (voir le schéma des quatre stades de l’escarre page précédente).
Les classifications anatomocliniques ne permettent pas de rendre compte de l’évolution de l’escarre et de la reconstruction des tissus. En pratique, le suivi doit rapporter(1) :
→ la couleur de la plaie et le pourcentage respectif des tissus selon leur couleur après nettoyage, au moyen d’une échelle colorielle (lire l’encadré « Évaluation colorielle de l’escarre » p. 22) ;
→ la peau périlésionnelle, qui influera sur le choix du pansement ;
→ la surface de la perte de substance mesurée avec une réglette millimétrée ou un calque ;
→ la profondeur mesurée avec un stylet et une réglette millimétrée ;
→ la topographie de la plaie via un schéma ;
→ la présence de signes cliniques d’une infection, érythème, chaleur locale, œdème, suppuration, odeur, qui justifient un prélèvement bactériologique pour guider la thérapeutique ;
→ la présence d’un contact osseux qui représente un facteur de gravité. Tout aspect d’os à nu au fond de la plaie est considéré comme une ostéite ;
→ la présence d’un décollement périphérique et d’une fistulisation ;
→ la douleur, qui doit être évaluée régulièrement : elle peut être continue ou liée aux soins (changements de position, mobilisations, réfection de pansement).
La prise en charge, globale et pluriprofessionnelle, doit tenir compte des risques concernant à la fois le patient et la plaie.
En l’absence de contre-indication, le repositionnement est recommandé pour toute personne porteuse d’escarre(s)(2). En réduisant la perfusion des tissus lésés, la pression maintenue sur une escarre retarde, voire empêche, sa guérison et peut entraîner une aggravation supplémentaire.
La fréquence et la durée des changements de position sont déterminées en fonction du patient (état général, état cutané, tolérance des tissus, niveau d’activité et de mobilité), du support de redistribution de la pression utilisé et des objectifs du traitement. En général, les changements de position sont effectués toutes les trois-quatre heures.
• Repositionner la personne en vérifiant que les pressions sont réduites ou redistribuées.
• Éviter tout positionnement du patient sur des proéminences osseuses sur lesquelles la peau présente un érythème persistant ne blanchissant pas sous une pression du doigt (escarre de stade 1).
• Éviter de soumettre la peau à des pressions et à des cisaillements.
• Utiliser des outils d’aide au transfert afin de réduire les frictions et les cisaillements.
• Surélever la personne et ne pas la faire glisser lors du repositionnement.
• Utiliser des techniques simples telles que l’alèse de positionnement.
• Respecter les principes de sécurité de la manutention manuelle pour assurer la sécurité de la personne et du soignant.
• Ne pas laisser le matériel de manutention sous le patient après utilisation, à moins que l’équipement soit conçu à cet effet.
• Éviter de placer la personne sur des dispositifs médicaux (tuyaux, systèmes de drainage, etc.)
• Ne pas laisser la personne sur le bassin de lit plus longtemps que nécessaire.
• Repositionner le patient, quel que soit le support utilisé.
• Position latérale avec une inclination à 30°, en alternant côté droit, dos et côté gauche.
• Position couchée, dans la mesure où le patient peut le tolérer et si son état de santé le permet.
• Éviter la position couchée sur le côté à 90° ou la position semi-allongée qui peuvent augmenter la pression.
• Encourager les personnes capables de se repositionner elles-mêmes à dormir dans une position latérale à 30-40° ou à plat, sauf contre-indication.
• Éviter ou limiter l’élévation de la tête du lit à 30°, qui expose le sacrum et le coccyx à des pressions et des cisaillements, sauf avis médical contraire ou pour des besoins d’alimentation et des problèmes digestifs. L’élévation de la tête du lit peut être médicalement nécessaire pour faciliter la respiration et/ou empêcher une pneumonie sur broncho-aspiration ou sur ventilateur. Dans ce cas, la position semi-assise est privilégiée.
• Positionner le patient de manière à éviter le glissement vers le bas du lit et la création de forces de cisaillement.
• Ne pas positionner le patient sur une zone du corps déjà endommagée ou rougie, en particulier si la rougeur ne blanchit pas.
La position assise est importante pour réduire les risques d’immobilité, favoriser la réhabilitation, faciliter l’alimentation et la respiration. Tout doit être fait pour éviter ou minimiser la pression sur l’escarre. Pour les patients porteurs d’escarre sur le sacrum/coccyx ou l’ischion :
→ limiter l’assise journalière à trois fois par jour pendant une heure maximum ;
→ faire prescrire un support de position approprié et/ou des techniques de positionnement ;
→ éviter une position entièrement droite en cas d’escarre ischiatique.
• Permettre au patient de se lever et de marcher le plus rapidement possible selon sa tolérance.
• Faire prescrire des séances de mobilisation active pour compenser la détérioration clinique souvent observée en cas d’alitement prolongé, et éviter des rétractions musculo-tendineuses aggravant le risque d’escarre par les positions vicieuses.
• Proposer un horaire de positionnement progressif au fauteuil selon la tolérance de la personne soignée et de la réponse de l’escarre.
• Augmenter l’activité dès que cela est toléré.
Un état de dénutrition altère toutes les phases de la cicatrisation et augmente le risque d’infection. Tout patient atteint d’une escarre doit bénéficier de l’intervention d’une diététicienne ou d’une équipe interprofessionnelle spécialisée en nutrition pour une évaluation complète de la nutrition(2), sachant que la prévalence de la dénutrition chez les personnes âgées varie de 4 à 10 % à domicile, de 15 à 38 % en institution et de 30 à 70 % à l’hôpital selon le critère de diagnostic utilisé(3).
• 30 à 35 kcal/kg de poids corporel par jour pour les adultes atteints d’escarre(s) et considérés à risque de dénutrition, ou chez les personnes âgées porteuses d’escarre(s).
• Suppléments nutritionnels à haute teneur en calories si les besoins nutritionnels ne sont pas couverts par l’apport alimentaire.
• Un apport nutritionnel par voie entérale ou parentérale peut être envisagé avec l’accord du patient si les apports oraux sont insuffisants(2).
• 1,25 à 1,5 g de protéines/kg de poids corporel par jour pour les adultes atteints d’escarre(s) et considérés à risque de dénutrition ou chez les personnes âgées porteuses d’escarre(s) pour un apport satisfaisant d’azote.
• Suppléments nutritionnels à haute teneur en protéines, en plus du régime habituel, si les besoins ne sont pas couverts par l’alimentation.
Lorsque les besoins nutritionnels des adultes porteurs d’escarre(s) de stade 3 ou 4 ou d’escarres multiples ne sont pas couverts avec les suppléments traditionnels à haute teneur en calories et en protéines, le recours aux suppléments à haute teneur en protéines, arginine et micronutriments est préconisé(2).
Il est recommandé d’encourager :
→ une alimentation équilibrée avec des aliments riches en vitamines et en minéraux ;
→ une consommation de suppléments riches en vitamines et en minéraux lorsque l’apport alimentaire est médiocre ou si les déficiences sont confirmées ou suspectées.
Les liquides servent de solvant pour les vitamines, les minéraux, le glucose et autres nutriments. Ils transportent les nutriments et les déchets dans le corps. Il est donc conseillé de :
→ fournir et encourager une consommation quotidienne de liquide adéquate, en cohérence avec les objectifs de santé et les comorbidités de la personne ;
→ surveiller le patient pour détecter une déshydratation, y compris le changement de poids, la turgescence de la peau, la diurèse, le sodium sérique élevé et/ou l’osmolalité sérique ;
→ fournir un apport hydrique supplémentaire aux personnes déshydratées qui présentent une température élevée, des vomissements, une transpiration profuse, des diarrhées ou des plaies très exsudatives.
Outre une évaluation à l’aide d’une échelle adaptée à la situation du patient, la douleur doit être appréhendée en tenant compte du vécu de ce dernier, de son état mental, du lieu et du moment du soin. Cette évaluation doit également prendre en compte le langage corporel et les signes non verbaux.
En cas de douleur continue, un traitement antalgique de fond pourra être instauré. L’Anaes(1) préconise d’y associer des mesures thérapeutiques non médicamenteuses : repositionnement/installation, relaxation, pansements permettant de réduire la fréquence de leur changement.
En cas de douleur lors de la réfection du pansement, il est possible d’administrer un antalgique per os au moins 1 heure avant le soin - 30 minutes pour un antalgique en IV -, ou d’utiliser du Meopa au moins 5 minutes avant le soin.
En cas de retrait douloureux du pansement, humidifier préalablement le dispositif avec du sérum physiologique. Éviter le retrait « sec » et rapide qui peut créer des lésions tissulaires. En cas de fragilisation de la peau périphérique, le pansement adhésif sera remplacé par une bande ou un filet de maintien.
Lors de la détersion : antalgiques de palier 3 ; application d’anesthésiques locaux ; substitution de la détersion mécanique avec des instruments par une détersion autolytique.
Le nettoyage, première étape importante dans la préparation du lit de la plaie, permet le retrait des fragments de tissus dévitalisés qui entraînent un risque infectieux important et empêchent une cicatrisation optimale, ainsi que des résidus de pansement. L’escarre est nettoyée à chaque réfection de pansement :
→ avec du sérum physiologique ou eau du robinet ;
→ au mieux au jet d’eau, en appliquant une pression suffisante pour nettoyer sans créer de dommages tissulaires ou d’apports bactériens dans le lit de la plaie ;
→ en gardant et en évacuant la solution pour réduire les risques de contamination croisée ;
→ en nettoyant et en séchant la peau périlésionnelle pour éviter la macération.
L’usage systématique des antiseptiques sur les plaies chroniques est fortement déconseillé. Ils sont délétères à la cicatrisation du fait de leur cytotoxicité envers des éléments cellulaires, et peuvent provoquer des résistances bactériennes locales. Leur usage est réservé au nettoyage d’escarre présentant des débris, une infection confirmée ou suspectée, ou s’il y a suspicion d’un haut niveau de colonisation bactérienne(2).
La détersion mécanique est indiquée dès l’apparition d’une nécrose dont l’excision fera évoluer la plaie vers le bourgeonnement. Pour le patient, différer une détersion mécanique indiquée ou allonger la durée de la détersion par le choix d’une détersion autolytique revient à reporter la cicatrisation de la plaie et à allonger la durée des souffrances morales et/ou physiques pour le patient.
La détersion s’effectue du centre vers les berges car c’est une plaie de pression dont l’effet se manifeste d’abord en profondeur. La lésion primitive, en forme de cône, se trouve au centre, alors que la nécrose est plus superficielle en périphérie. Le débridement de la nécrose ne doit provoquer ni douleur ni saignement. La douleur, qui peut être liée au soin, peut être le signe d’une aggravation de la plaie (inflammation, infection, etc.).
Un soin propre à réaliser avec précaution : la détersion est généralement considérée comme un soin propre, mais le risque de déclencher une bactériémie étant présent, un lavage avec un antiseptique est recommandé avant d’intervenir avec un bistouri dans le cas d’une escarre :
→ de stade 4 ;
→ localisée sur l’articulation d’un orteil ;
→ sacrée malodorante, suintante, avec un abcès.
Certains pansements actifs (voir ci-après) renforcent la détersion enzymatique naturelle en maintenant un milieu humide et en retirant les débris nécrosés ainsi que la fibrine.
Le recours à la détersion chirurgicale est nécessaire en cas(4) :
→ de nécrose tissulaire importante ;
→ d’infection ;
→ d’exposition des axes vasculo-nerveux, des tendons ou des capsules articulaires ou de l’os ;
→ de bactériémie ou septicémie à point de départ de l’escarre.
→ Attention : la chirurgie est contre-indiquée chez la personne âgée porteuse d’escarres plurifactorielles ainsi que chez le patient en fin de vie.
• Escarre propre de stade 2 où le pansement ne risque pas de s’enrouler ou de fondre.
• Escarre de stade/catégorie 3 non infectée et peu profonde.
• En association à un pansement de comblement dans l’escarre profonde dans le but de remplir l’espace mort.
• Pour le débridement autolytique si la personne n’est pas immunodéprimée.
• Pansement secondaire pour l’escarre traitée avec des alginates ou autre pansement de comblement qui restera dans le lit de la plaie pour une longue période (entre 3 et 5 jours).
• En cas de nécrose sèche.
• Escarre peu profonde et très peu exsudative.
• En traitement des lits de plaie secs.
• Escarre douloureuse.
• Hydrogel en plaque pour l’escarre superficielle et mal délimitée et/ou sur les zones corporelles sur lesquelles le pansement risquerait de se déplacer.
• Hydrogel amorphe pour l’escarre non infectée en phase de granulation.
• Hydrogel amorphe pour l’escarre profonde et délimitée et/ou sur les zones corporelles où le pansement risque de se déplacer.
• Escarre fibrineuse.
• Escarre cliniquement infectée lorsqu’il y a un traitement simultané approprié de l’infection.
• Escarre modérément à fortement exsudative.
• Escarres de catégorie/stade 2 exsudative et de catégorie/stade 3 peu profonde.
• Mousse à gélification pour l’escarre fortement exsudative.
• Escarre cliniquement infectée ou fortement colonisée. Ne plus utiliser ce type de pansement lorsque l’infection est contrôlée.
• Escarre à haut risque d’infection.
Escarres de stades 2 et 3 si pas d’allergie au miel.
Escarre moyennement à fortement exsudative, en l’absence d’insuffisance rénale, d’antécédents de dysfonctionnement thyroïdien, d’hypersensibilité connue à l’iode, de grossesse ou allaitement, de traitement par lithium.
• Comme surface de contact avec la plaie pour éviter les traumatismes lors des changements de pansement.
• En prévention des blessures des tissus périlésionnels quand ceux-ci sont fragiles ou friables.
Escarres de catégories/stades 3 et 4 qui ne cicatrisent pas.
Notes
1. Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (Anaes), conférence de consensus « Prévention et traitement des escarres de l’adulte et du sujet âgé », novembre 2001. En ligne sur : bit.ly/3zdVaF5
2. European Pressure Ulcer Advisory Panel (EPUAP), « Prévention et traitement des escarres : guide de référence abrégé », 2e édition, 2014. En ligne sur : bit.ly/3g1ExVL
3. Haute Autorité de santé (HAS), « Diagnostic de la dénutrition de la personne âgée », mars 2020. En ligne sur : bit.ly/2TEQbNp
4. Dossier « Les escarres », Revue francophone de cicatrisation, volume 1, n° 3, juillet 2017.
Autres sources
• Haute Autorité de santé, fiche de bon usage des technologies médicales « Les pansements : indications et utilisations recommandées », avril 2011, mis à jour en janvier 2013. En ligne sur : bit.ly/3w5r4BJ
• HAS, fiche de bon usage des technologies de santé « Traitement des plaies par pression négative (TPN) : des utilisations spécifiques et limitées », janvier 2011, mis à jour en janvier 2013. En ligne sur : bit.ly/2hdOVwz
• Association francophone des soins oncologiques de support (Afsos), « Escarres : prévention et prise en charge », mis à jour le 16 décembre 2016. En ligne sur : bit.ly/34ZZsCa
• Société française de l’escarre, « Check-list pour la prévention des escarres en période de Covid ». Différentes fiches, pour le domicile, les services de médecine/gériatrie, de réanimation, et les Ehpad/USLD. En ligne sur : bit.ly/3563M2V
• Omedit Normandie, « Guide d’aide pour la prescription de pansements ». En ligne sur : bit.ly/2TaSd7X
• Palmier S., Garulo M., Plaies et cicatrisation : guide pratique pour les IDE, Éditions Lamarre, 2016.
Événements, organismes
• Congrès conjoint de la Société française et francophone de plaies et cicatrisations (SFFPC) et l’Association européenne de la gestion des plaies (EWMA), à Paris, les 26 et 27 octobre 2021 en virtuel et du 1er au 3 février 2022. Plus d’informations sur : bit.ly/3vbehfH
• Journées armoricaines plaies et cicatrisation les 23 et 24 septembre, à Rennes. Plus d’informations sur : bit.ly/3iAvOv8
La prévention doit être adaptée à chaque patient selon le risque auquel il est exposé. Des échelles ont été créées pour mesurer ce risque, dont les plus utilisées sont :
• l’échelle de Norton, qui compte 5 critères (condition physique, état mental, activité, mobilité et incontinence) mais n’inclut pas l’état nutritionnel ;
• l’échelle de Braden comportant également 5 critères dont la nutrition, le degré d’humidité de la peau, les facteurs mécaniques comme la friction et le cisaillement ;
• l’échelle de Waterlow, avec 11 critères parmi lesquels l’âge et le sexe, ou des mécanismes intrinsèques (déficits neurologiques, insuffisance de perfusion des tissus), à privilégier en réanimation.
Ces échelles ne se substituent pas à l’observation du patient et des signes cliniques.
La classification « noir-jaune-rouge » est un modèle simple qui peut être utilisé pour toutes les plaies (hors brûlures). La couleur de la plaie informe sur le stade de la cicatrisation et permet de déterminer les objectifs thérapeutiques des soins. Une plaie présentant plusieurs couleurs (mixte) implique de traiter d’abord le facteur le plus dérangeant : les tissus nécrosés (noir) et la fibrine (jaune).
1. La phase noire révèle la présence de tissus nécrosés, généralement secs, empêchant la plaie de cicatriser. Des signes d’inflammation sont possibles.
Le traitement consiste en un débridement de la nécrose (de préférence avec un bistouri).
2. La phase jaune correspond à une plaie exsudative qui peut être le signe d’une infection.
Le traitement vise à nettoyer, au moyen d’une curette et de pansements absorbants, l’excès d’exsudat, lequel constitue un foyer de bactéries empêchant la guérison.
3. La phase rouge est un signe indiquant que le bourgeonnement s’opère.
Le traitement consiste à protéger le tissu de granulation vulnérable de l’assèchement et des dégâts mécaniques.
Les pansements sont adaptés pour entretenir un microclimat humide stimulant la guérison.
4. La phase rosée correspond à l’étape d’épidermisation de la plaie, laquelle se recouvre d’un épithélium fragile. Elle se distingue de la phase précédente granuleuse par un aspect nacré.
Gaëlle Chopin, infirmière intervenant dans le programme d’ETP du service de Médecine physique et réadaptation neurologique, CHU de Nantes (Loire-Atlantique).
« Le traitement de l’escarre chez une personne paraplégique peut justifier des semaines d’alitement. Ces temps d’immobilisation, qui peuvent être considérés comme “drastiques” par le patient, doivent être expliqués et mis en balance avec les conséquences et les risques d’une cicatrisation qui se prolongerait. Cette mesure repose sur une règle de base : plus le patient alité est installé “à plat”, meilleure est la répartition des appuis. Cet alitement forcé n’est donc pas négociable même s’il est très difficile à accepter pour un patient relativement autonome quand il est au fauteuil. Compte tenu des contraintes imposées par ce traitement des escarres, la prévention revêt un caractère primordial dans un tel contexte. C’est pourquoi les patients sont régulièrement informés des mesures de prévention par les équipes des services, avec le souci de se projeter dans l’avenir à domicile. Ils peuvent aussi bénéficier du programme d’ETP dont l’objectif est de les rendre experts en matière de prévention des escarres. Même si toutes les situations du domicile ne peuvent pas être anticipées, à l’exemple du repas de famille qui s’éternise et prolonge la durée d’un appui préjudiciable… »
Selon une enquête de la Société française de l’escarre (SFE)(1), lors de la première vague de Covid, le risque d’escarre a doublé chez les patients Covid-19. Elle a été de 17,8 % dans les unités de réanimation (vs un pourcentage national de 8,6 % en moyenne en hôpital), où les patient, pris en charge en décubitus ventral (DV), ont été particulièrement exposés. Ces derniers ont concentré tous les facteurs aggravants : déshydratation, malnutrition, infection, diarrhée, perte de la mobilité, hypoxie, grande fatigue. La SFE préconise, entre autres, d’être attentif au DV (positionnement plus de 16 heures par jour) : zones à risque (visage, torse, poitrine, parties génitales, cou/genoux, face dorsale des pieds) et aux dispositifs médicaux. Ces derniers doivent être positionnés au-dessus et non sous le patient.
1. Webinaire « Escarre et Covid ». En ligne sur : bit.ly/35a3kkb
Dr Pierre Rumeau, hôpital de jour de Médecine gériatrique et télémédecine, Centre ressource en escarres gériatriques, hôpital Purpan de Toulouse (Haute-Garonne).
« Les hôpitaux de jour spécialisés dans le traitement des plaies chroniques sont très peu nombreux, en effectifs insuffisants et souvent écartelés entre plusieurs missions. Seule la télémédecine, dans le cadre d’un réseau, permet de mitiger ce bilan pessimiste en permettant :
- à l’infirmière libérale (Idel) et au médecin traitant de trouver le bon interlocuteur ;
- aux experts de mieux “customiser” le soin grâce aux échanges avec l’Idel et le médecin traitant, mais aussi avec la famille ;
- de réaliser des interventions ponctuelles en hospitalisation de jour avec un suivi mieux coordonné avec les Idels ;
- d’instaurer une coordination qui facilite les examens paracliniques et les avis ponctuels de spécialistes, avec une meilleure réactivité des experts en cas d’infection ou d’évolution locale défavorable.
Il est donc important que les infirmières libérales connaissent les actes d’accompagnement par la téléconsultation et les cotent, mais aussi qu’elles n’hésitent pas à les proposer au médecin traitant ou aux spécialistes lorsqu’ils sont en difficulté avec une plaie à domicile. Il faut savoir que cet acte n’a pas besoin de prescription médicale. Un acte de téléconsultation avec cotation associée, coté par le médecin, fait foi.
La téléconsultation permet également de proposer l’adressage d’un patient à un centre de cicatrisation spécialisé en escarres, ou mieux, à un réseau de plaies et cicatrisations, par exemple dans le cas d’une escarre qui se creuse ou qui ne s’améliore pas au bout de trois semaines. L’infirmière à domicile devra se méfier plus particulièrement des plaies atypiques qui surviennent hors des zones d’appui chez une personne ayant des antécédents de cancer ou d’importants problèmes vasculaires, a fortiori si celle-ci est autonome pour ses déplacements. Dans ce cas, un diagnostic médical est indispensable. »