PATRIMOINE PATIENT - DONS ET LEGS - Ma revue n° 015 du 01/12/2021 | Espace Infirmier
 

L'infirmière n° 015 du 01/12/2021

 

JE ME FORME

JURIDIQUE

Jean-Charles Scotti  

avocat au barreau de Marseille jcs@scotti-avocat.fr

Un patient en fin de vie, que je suis depuis plusieurs années, souhaite me faire un legs pour me remercier de mes soins et des liens affectifs qui nous lient aujourd’hui. Puis-je l’accepter ?

Toute libéralité nécessite un consentement à la fois du disposant et du gratifié. La règle va de soi en matière de donation, puisqu’il s’agit d’un contrat. Elle s’applique également au testament, bien qu’il s’agisse d’un acte unilatéral. En effet, si le consentement du légataire n’est pas nécessaire à la validité du legs, il conditionne son efficacité : si le légataire renonce au legs, celui-ci sera caduc. Pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d’esprit (article 901 du Code civil). L’insanité d’esprit du disposant au moment de la donation ou du testament est sanctionnée par la nullité de la libéralité. Il existe des incapacités absolues à recevoir une donation. Il s’agit pour l’essentiel des donations et legs au profit des personnes morales (société, groupement, établissement de santé, association, etc.).

Selon l’article 909 du Code civil, « les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci ». Ainsi, l’incapacité de recevoir un legs est conditionnée à l’existence, au jour de la rédaction du testament, de la maladie dont est décédé le disposant, peu importe la date de son diagnostic. La notion de « dernière maladie » est difficile à apprécier lorsqu’il s’agit de pathologie chronique ou du développement d’une maladie ancienne : la jurisprudence recherche alors le début de la période d’aggravation finale. En cas de contestation judiciaire, les juges du fonds doivent vérifier que la libéralité a bien été consentie au cours de la maladie qui a été fatale au disposant. Peu importe, en revanche, la date du diagnostic de la maladie qui peut être postérieure à l’établissement de la libéralité. Dans cette logique, sont nuls les deux legs établis par la pensionnaire d’une résidence pour personnes âgées au profit d’une employée de cet établissement(5).

  • 5. Nullité des dons faits par un résident d’un Ehpad (CA Bordeaux 29-2-2000 n° 97-1869 : Dr. famille 2000 comm. 120 par B. Beignier).