LA VESSIE NEUROLOGIQUE
JE ME FORME
PRISE EN CHARGE
Thierry Pennable* Pr Gérard Amarenco** Dr Nader Hadiji*** Stéphanie Hamonic****
*chef du service de neuro-urologie, hôpital Tenon (AP-HP), Paris
** chef de service de médecine physique et de réadaptation, Centre de l’Arche - Pôle régional du handicap, Saint-Saturnin (Sarthe)
***infirmière en service de médecine physique et de réadaptation, hôpital Raymond-Poincaré, Garches (Hauts-de-Seine)
Les troubles vésico-sphinctériens sont fréquents dans la plupart des maladies neurologiques ou chez les blessés médullaires. Ces troubles, regroupés sous l’expression « vessie neurologique », sont pris en charge en combinant un traitement médicamenteux ou chirurgical et des sondages intermittents visant à reproduire la vidange physiologique de la vessie. L’autosondage, pratiqué par le patient, est un élément clé de la qualité de vie et de l’autonomie pour la personne atteinte d’une vessie neurologique. La bonne pratique de ces sondages intermittents, le respect de leur fréquence et de leur régularité ainsi que des mesures simples d’hygiène ont aussi un impact sur la santé du patient, notamment en prévenant les infections urinaires et leurs complications potentiellement graves.
Une vessie neurologique est la manifestation, sur le plan vésico-sphinctérien, d’une pathologie neurologique, qu’elle soit centrale, dans l’AVC ou la maladie de Parkinson, médullaire, dans une paraplégie, ou périphérique, en cas de polynévrite. L’expression « vessie neurologique » désigne autant une vessie dont le fonctionnement est altéré que l’ensemble des dysfonctionnements vésico-sphinctériens associés aux troubles urinaires qui en découlent.
Causes d’une mauvaise vidange vésicale :
→ hypocontractilité vésicale : vessie atone, hypotonique ou hypoactive, qui ne se contracte pas, de grand volume ;
→ hypertonie sphinctérienne ;
→ dyssynergie vésico-sphinctérienne.
Causes d’une incontinence :
→ hypercontractilité vésicale : vessie spastique qui présente des contractions involontaires avec un volume urinaire normal ou abaissé ;
→ hypotonie sphinctérienne.
C’est le mécanisme le plus fréquemment rencontré dans la vessie neurologique. Elle peut entraîner une pollakiurie, une nycturie et, le plus souvent, des contractions intermittentes de la vessie provoquant des fuites ou des besoins soudains, impérieux et irrépressibles d’uriner (urgenturie).
L’hyperactivité vésicale est caractérisée par la survenue de contractions vésicales involontaires. Deux situations sont possibles :
→ si la synchronisation sphinctérienne est conservée, il y a des fuites urinaires involontaires. Par exemple : AVC, maladie de Parkinson, neuropathie diabétique, etc.(1) ;
→ s’il y a une dyssynergie vésico-sphinctérienne, la vidange complète de la vessie peut être interrompue par une fermeture du sphincter pendant la miction. Il y a alors un fort risque de reflux vésico-urétéral ; l’urine vésicale qui remonte dans l’uretère à contre-courant peut atteindre le rein. Par exemple : lésions médullaires supra-sacrées, sclérose en plaques (SEP), etc.(1)
Elle se caractérise par une incontinence urinaire à l’effort. Différents mécanismes sont possibles :
→ atteinte centrale par destruction ischémique étendue de la moelle épinière thoraco-lombosacrée, par exemple dans une chirurgie d’anévrisme ;
→ lésion complète du cône terminal entraînant une insuffisance sphinctérienne striée ;
→ syndrome de la queue de cheval(2) ;
→ atteinte périphérique par lésion des plexus hypo gastriques pelviens, par exemple dans l’amputation abdomino-pelvienne dans le cas d’un cancer, une hystérectomie, etc.
Souvent le premier symptôme d’une vessie atone, l’incontinence par regorgement est liée à une hypocontractilité, une non-contractilité du détrusor et/ ou une hypoesthésie vésicale. Elle se traduit par :
→ des fuites par « trop-plein » d’une vessie pleine en permanence, sous forme de « goutte-à-goutte » malgré la conservation de mictions ;
→ une incontinence prédominant souvent la nuit.
Plusieurs causes neuro-urologiques peuvent être à l’origine d’une vessie neurologique.
Causes neurologiques : traumatisme médullaire, spina-bifida ou myéloméningocèle, SEP, hernie discale, diabète, neuropathie périphérique, syndrome parkinsonien, AVC, etc.
Causes post-chirurgicales : chirurgie gynécologique, colorectale ou de l’incontinence.
Causes post-radiothérapie pelvienne, lorsque la radiothérapie a un effet délétère sur la moelle, sur un plexus nerveux ou des racines nerveuses.
Le spina-bifida et la myéloméningocèle, forme grave du spina-bifida, résultent d’une malformation du tube neural lors de la vie embryonnaire. Les dysfonctionnements vésico-sphinctériens sont fréquents et variables. La vessie est le plus souvent hypotonique, plus rarement hyper active ; le sphincter peut aussi être hyper ou hypoactif.
La sclérose en plaques, maladie neurologique dégénérative centrale et périphérique, est évolutive. La symptomatologie urinaire est variée et son évo lution diffère selon les personnes atteintes. Une hyper activité vésicale est fréquemment retrouvée et une dyssynergie vésico-sphinctérienne est également possible.
La maladie de Parkinson, pathologie neurodégénérative évolutive, entraîne souvent des troubles vésico-sphinctériens - lesquels ne sont pas toujours suffisamment considérés - le plus souvent avec une vessie hyper active qui provoque des fuites urinaires et des impériosités.
Le diabète peut entraîner une neuropathie diabé tique à l’origine de troubles vésico-sphinctériens parfois méconnus. La vessie est souvent hypoactive, acontractile et de grande capacité. La présence d’un résidu post-mictionnel favorise la survenue d’infections urinaires chez des patients qui y sont particulièrement sensibles. Les troubles urinaires doivent donc être dépistés et traités afin de préserver la fonction rénale.
Les signes cliniques, variés, dépendent de l’atteinte neurologique et du mécanisme spécifique de chaque vessie neurologique. « Compte tenu de la localisation des centres activateurs et inhibiteurs de la miction, le site de la lésion ne détermine pas forcément un type de dysfonction mictionnelle », précise le Pr Gérard Amarenco, chef du service de neurourologie de l’hôpital Tenon, à Paris.
Les symptômes se distinguent selon deux grandes catégories :
→ les fuites urinaires liées, soit à une vessie hyperactive entraînant des mictions impérieuses, soit à une insuffisance sphinctérienne responsable de fuites sans éprouver le besoin d’uriner ;
→ les rétentions d’urine liées à une vessie atone ou à une ouverture défectueuse du sphincter au moment de la miction.
En plus de l’examen clinique, qui reste fondamental, le diagnostic des troubles vésico-sphinctériens neurologiques repose sur :
→ un bilan rénal, avec un dosage de la créati nine dans le sang pour évaluer la fonction rénale, et un examen cytobactériologique des urines (ECBU) pour en vérifier la stérilité ;
→ un scanner pour rechercher la présence de calculs dans la vessie ou dans les reins, une dilatation des cavités rénales, et pour observer le fonctionnement des reins ;
→ des explorations urodynamiques pour évaluer le fonctionnement vésico-sphinctérien et les mécanismes physiopathologiques : la cystomanométrie qui enregistre les pressions intravési cales (volume et pression de la vessie hauts ou bas), la sphinctérométrie qui analyse les pressions intra-urétrales, et la débitmétrie qui quantifie la miction ;
→ de façon non systématique, des explorations électrophysiologiques avec enregistrement de l’activité électrique des nerfs et des muscles.
Les infections urinaires à répétition sont une complication majeure des vessies neurologiques avec un risque de pyélonéphrites récurrentes, voire de décès. Chez les blessés médullaires, l’infection urinaire est la première cause de morbidité et la deuxième cause de mortalité.
Les deux principales causes de l’infection urinaire sont :
→ une mauvaise vidange vésicale qui doit être corrigée par des autosondages intermittents ;
→ une vessie hyperactive réfractaire aux traitements, y compris lorsque le sondage intermittent est pratiqué.
→ Exemple de prise en charge de l’infection urinaire chez le patient neurologique en autosondage : les bactériuries asymptomatiques, signes d’une colonisation urinaire, très fréquentes avec le sondage intermittent, ne justifient pas un traitement antibiotique ni un examen cytobactériologique des urines. Des antibiothérapies répétées augmenteraient le risque de germes multirésistants sans diminuer la fréquence et la sévérité des infections urinaires symptomatiques. Les infections urinaires symptomatiques, et notamment fébriles, sont traitées par antibiothérapie et justifient des investigations ainsi qu’un avis urologique rapides.
Signes de l’infection urinaire : brûlures mictionnelles, urines troubles et malodorantes, fièvre, apparition ou exacerbation des fuites, fuites inhabituelles entre les sondages, exacerbation des épisodes d’hyperréflexie autonome (majoration de la spasticité chez le blessé médullaire), apparition de douleurs, hématurie.
Les infections urinaires à répétition présentent un risque de dissémination bactérienne et de pyélonéphrites pouvant entraîner une insuffisance rénale. Les hyperactivités vésicales sont les situations les plus à risque. En cas de dyssynergie vésico-sphinctérienne, la vessie hyperactive se contracte de façon non contrôlée. Le sphincter urétral n’étant pas ouvert, les urines peuvent alors remonter vers le rein sous la pression des contractions du détrusor, au risque de dégrader la fonction rénale à long terme.
Hydronéphrose avec reflux vésico-urétéral possible : elle se caractérise par une augmentation de volume du bassinet, des calices et du rein touché. Elle est due à la pression exercée par un grand volume d’urine sur la jonction vésico-urétérale.
Dysréflexie végétative dans les lésions médullaires hautes : elle est déclenchée par une distension vésicale aiguë due à la rétention urinaire. Ces dysrégulations du système nerveux autonome chez les blessés médullaires peuvent entraîner une hypertension potentiellement mortelle avec œdème pulmonaire, hémorragie intra crânienne, infarctus du myocarde, etc.
Le traitement d’une vessie neurologique combine en général des moyens mécaniques, comme le sondage intermittent, et des médicaments pour calmer les vessies hyperactives.
La chirurgie, elle, sera envisagée en cas d’efficacité insuffisante du traitement médical ou dans certaines indications.
La prise en charge est dictée par :
→ la préservation de l’appareil urinaire car la vessie neurologique constitue un facteur de risque vital uro-néphrologique ;
→ la qualité de vie de la personne qui souffre de troubles urinaires.
Elles peuvent aider les patients qui sont en mesure de retenir des volumes normaux d’urine dans la vessie. Ces thérapies combinent programmation des mictions dans la journée et manière de réagir en cas d’envie pressante.
Les anticholinergiques permettent de diminuer la contractilité du détrusor et, par conséquent, l’amplitude et la fréquence des contractions vésicales, ainsi que la pression intravésicale avec une augmentation de la capacité maximale vésicale.
Les différents anticholinergiques ont des effets similaires, et modestes, sur les symptômes urinaires(3). Leur efficacité maximale est atteinte après cinq à huit semaines de traitement :
→ oxybutynine : Ditropan et génériques en comprimé, PMS-Oxybutynin en sirop, Vesoxx en solution pour administration intravésicale ;
→ solifénacine : Vesicare et génériques en comprimé et en sirop ;
→ fésotérodine : Toviaz en comprimé à libération prolongé (LP).
→ Effets indésirables : sécheresse buccale, constipation, rougeur du visage, rétention urinaire, troubles de la vision, céphalées, confusion, anxiété. Ils sont plus fréquents chez les personnes âgées(3).
Les agonistes du récepteur adrénergique bêta-3 provoquent un relâchement du détrusor, à la différence des anticholinergiques qui, eux, entraînent une inhibition des contractions. Il améliore la fonction de remplissage vésical en stimulant les récepteurs bêta-3 adrénergiques de la vessie. Il existe un seul médicament, le mirabégron (Betmiga en comprimé LP).
→ Effets indésirables fréquents : infection urinaire, tachycardie, céphalées, sensation vertigineuse, nausées, constipation, diarrhée.
Les injections de toxine botulinique directement dans le muscle de la vessie par urétrocystoscopie. Pour le moment, l’autorisation de mise sur le marché de la spécialité Botox (toxine botulinique) indique le traitement de l’hyperactivité détrusorienne neurologique conduisant à une incontinence urinaire non contrôlée par un traitement anticholinergique chez les patients blessés médullaires et ceux atteints de sclérose en plaques utilisant l’autosondage comme mode mictionnel. Le traitement, efficace pendant six à neuf mois(3), implique des sondages intermittents permanents expliqués au patient avant la mise en route des auto sondages. Les injections localisées de toxine botulinique permettent d’éviter les effets indésirables des anticholinergiques.
Cette technique consiste à stimuler une racine nerveuse sacrée qui innerve la vessie par une électrode implantée chirurgicalement. Elle est proposée dans l’hyperactivité vésicale résistante aux médicaments anticholinergiques ou en cas d’intolérance à ces traitements.
La chirurgie est indiquée en dernier recours, notamment en cas d’impossibilité fonctionnelle de pratiquer un autosondage par voie urétrale. Il est alors possible de faire une dérivation au niveau de l’ombilic par la technique de Mitrofanoff en créant un conduit entre la vessie et la peau grâce à l’appendice ou à un morceau d’intestin grêle.
Un Mitrofanoff peut être associé à un agrandissement de la vessie hyperactive qui n’a pas répondu aux médicaments. Si l’agrandissement de la vessie et les autosondages sont impossibles, une dérivation urinaire de type Bricker avec ablation de la vessie peut alors être pratiquée. Un fragment d’intestin grêle est prélevé, auquel sont abouchés les uretères, l’une à une extrémité, l’autre fixée à l’abdomen pour réaliser une stomie. Le segment intestinal sert uniquement de conduit évacuateur ; il ne stocke pas les urines qui s’écoulent dans une poche d’urostomie.
L’insuffisance sphinctérienne se manifeste par une incontinence urinaire d’effort.
Il n’y a pas de solution pharmacologique utilisable en pratique clinique(1). Mais un intérêt est porté à certaines molécules :
→ les sympathicomimétiques, ou sympathomimétiques, pourraient augmenter le tonus urétral, telle la midodrine indiquée dans le traitement de l’hypotension orthostatique sévère dans les maladies neurologiques dégénératives avec dysautonomie avérée ;
→ certains antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN) qui augmenteraient la contraction du sphincter strié pendant la phase de remplissage, comme la duloxétine, molécule indiquée dans le trouble dépressif majeur, la douleur neuropathique diabétique périphérique ainsi que dans l’anxiété généralisée.
Les traitements chirurgicaux font appel à plusieurs techniques :
→ l’intervention de type TVT (TensionFree Vaginal Tape), qui consiste à positionner une bandelette synthétique sous l’urètre pour remplacer des structures de soutien défaillantes ;
→ la pose de ballonnets latéro-urétraux de part et d’autre de l’urètre. De par leur action par compression, ils permettent de faire obstacle à l’évacuation des urines ;
→ la pose d’un sphincter artificiel, forme de manchon gonflable commandé par une pompe pour vider la vessie, autour de l’urètre pour le comprimer et stopper les urines.
Le sondage intermittent est le traitement de référence de la rétention chronique d’urine. Les hétérosondages intermittents réalisés par un proche ou un soignant sont plus à risque infectieux et permettent moins d’autonomie que l’autosondage. À l’hôpital, les hétérosondages intermittents sont préférables au sondage à demeure car ils entraînent moins de risque d’infections et de complications locales.
Le cathéter sus-pubien est une alternative lorsque le sondage urétral est impossible. Une sonde à demeure est placée entre la vessie et l’abdomen, au-dessus de l’os pubien. Elle est reliée à une poche de recueil des urines.
Les mictions réflexes. La miction par « percussion », ou « percussions sus-pubiennes », consiste à donner de petits coups sur l’abdomen, entre le nombril et le pubis, pour déclencher le réflexe de contraction de la vessie. La miction par poussée abdominale est déclenchée par une pression sur l’abdomen qui remplace la pression que devraient exercer les muscles défaillants.
L’autosondage intermittent assure une vidange complète de la vessie. Environ quatre à six autosondages par jour permettent de reproduire la miction spontanée naturelle. Il diminue le risque d’infections urinaires et préserve l’appareil urinaire en réduisant les complications liées à la rétention d’urine. Il améliore la qualité de vie du patient en limitant les conséquences des troubles mictionnels et en favorisant l’autonomie.
→ L’autosondage intermittent permet la vidange de :
→ la vessie hypoactive, atone, à l’origine d’une rétention urinaire chronique ;
→ la vessie hyperactive « calmée » par un traitement de l’hyperactivité détrusorienne : toxine botulinique, anticholi nergique, neuromodulation des racines sacrées, etc.
En vidant régulièrement la vessie, les autosondages diminuent la fréquence des infections urinaires et leurs conséquences sur l’appareil urinaire à plus ou moins long terme(4). En cas de suspicion d’infection urinaire, la première règle est d’augmenter les apports hydriques et de réaliser un ou deux autosondages supplémentaires par jour.
Les sondes vésicales sont de longueurs, de diamètres et de formes variables. Elles sont destinées à être introduites dans l’urètre via le méat urinaire afin d’atteindre la vessie pour en vider son contenu. Les sondes vésicales sont stériles et à usage unique.
Les matériaux utilisés pour les sondes destinées aux sondages intermittents sont le plus souvent le PVC (polychlorure de vinyle), le Pobe (polyolefin based elastomers, sorte de plastique), le PUR (poly u réthane) ou le silicone. Les sondes en PUR ont en général le diamètre interne le plus grand.
La longueur de la sonde sera choisie en fonction de l’anatomie de l’urètre, de 7 à 25 cm pour une femme, 30 cm pour l’adolescent garçon, de 30 à 40 cm pour l’homme adulte.
Le diamètre extérieur est exprimé en unités Charrière (CH), une unité étant égale à un tiers de mil limètre. Généralement, pour un adulte, on utilisera une sonde CH 12 ou CH 14, soit d’un diamètre extérieur de 4 ou 4,7 mm. Les unités « French » (Fr) ou encore « French Gauge » (FG) sont parfois employées mais elles sont strictement synonymes de Charrière.
Le diamètre interne dépend du diamètre externe fixé par l’anatomie du patient et de l’épaisseur de la paroi de la sonde en fonction du matériau utilisé. Le diamètre interne a une incidence sur le débit et donc sur la durée du sondage intermittent.
L’embase ou l’embout, l’extrémité proximale de la sonde qui reste à l’extérieur du patient, est droite ou évasée, avec un godet coloré. Chaque numéro de Charrière correspond à une couleur d’embout : CH 8 (bleu), CH 10 (noir), CH 12 (blanc), CH 14 (vert), CH 16 (orange), etc.
L’extrémité distale introduite dans la vessie a des formes différentes (béquillée, olivaire, droite, plus rarement biseautée), avec un nombre et une position d’œil variable, petit trou par lequel l’urine passe dans la sonde, deux le plus souvent. La plupart des sondes ont une extrémité distale fermée, droite type Nélaton, ou béquillée type Tie mann (voir le schéma des extrémités distales des sondes vésicales ci-dessus). Seules les sondes de type Couvelaire ont un bout ouvert et biseauté, mais elles sont réservées au drainage des caillots.
La lubrification de la surface externe du corps de la sonde en contact avec l’urothélium varie selon les cas. Un agent lubrifiant peut recouvrir la sonde, être ajouté lors de la manipulation ou être instillé directement dans l’urètre pour :
→ diminuer les forces de frottement générées par l’introduction ou le retrait de la sonde qui peuvent être à l’origine de microtraumatismes au niveau de la muqueuse ;
→ éviter les incrustations et l’adhésion bactérienne.
Sondes sèches : sondes en PVC que le patient va enduire d’un lubrifiant (vaseline, huile silicone KY, gel de xylocaïne) au moyen d’une compresse avant l’introduction dans l’urètre. Sondes droites, utilisables uniquement chez les femmes, elles ont une longueur inférieure ou égale à 25 cm.
Sondes prélubrifiées : sondes en PVC siliconé ou en Pobe pré-enduites de gel lubrifiant non soli daire du corps de la sonde (paraffine officinale, gel polyacrylique inerte Lubragel, eau + glycérine, etc.) pour rendre la sonde glissante et diminuer le risque de friction lors de la pose. Pour les sondes droites ou béquillées, la lubrification du corps de la sonde est effectuée avant l’ouverture du conditionnement primaire.
Sondes autolubrifiées : elles sont pré-enduites d’un film hydrophile solidaire du corps de la sonde. Les premières générations nécessitent une courte immersion dans de l’eau ou du sérum physiologique. Les dernières générations sont quasiment prêtes à l’emploi après un temps pour l’activation du lubrifiant. Les experts les préconisent car leur utilisation aurait une action préventive sur les sténoses urétrales. Le revêtement, en gel de polyvinylpyrrolidone (PVP), fixe les molécules d’eau et diminue le coefficient de frottement de la sonde.
Sondes avec collecteur scellé : le collecteur, qui est scellé à la sonde, est vidangeable. Le volume maximum pouvant être collecté est supérieur ou égal à 700 ml.
Présentation en kit ou en set : la sonde est raccordée à une poche de recueil des urines préconnectée, de contenance variable et le plus souvent vidangeable.
Technologie « No Touch » : ce système permet d’éviter le contact avec la sonde grâce à une gaine ou un fourreau rétractable qui glisse ou se replie le long de la sonde en même temps que le patient l’intro duit dans l’urètre.
Ouverture facile de l’emballage pour le patient à dextérité réduite (exemple : fil d’ouverture).
Notes
1. Dr Bildstein C., Dr Quesnel A., « Incontinence urinaire et Neurologie : Introduction à la prise en charge des vessies neurologiques », Journées médicales havraises, 2018. En ligne sur : bit.ly/3tAMLd4
2. Pennable T., « Troubles et soins du patient paraplégique », L’Infirmièr.e, n° 18, mars 2022.
3. « Comment soigner l’incontinence urinaire ? », Vidal, mars 2020. En ligne sur : bit.ly/3HUDLUZ
4. Association française d’urologie, fiche info patient « Auto-sondage urinaire », mise à jour en novembre 2018. En ligne sur : bit.ly/3ITqFZH
Autres sources
• Centre de référence Spina Bifida - Dysraphismes, site constitutif de C-MAVEM, « Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) Spina Bifida - Dysraphismes », mars 2020. En ligne sur : bit.ly/3hP8PuX
• Schwartz J., « Prise en charge de la vessie neurogène », Revue Médicale Suisse, 2009 Dec;228:2453-6. En ligne sur : bit.ly/35GhnSq
• Raibaut P., Terrier A., Jacq C. et al., « Intérêt de l’auto-sondage en cas de rétention urinaire », Progrès en Urologie, 2008 Sept;18 (3):29-34. En ligne sur : bit.ly/3w5gY71
• Gauron C., « Moi, infirmière, comment je vois l’auto-sondage », conférence donnée lors du 41e Congrès de la Société interdisciplinaire francophone d’urodynamique et de pelvi-périnéologie (Sifud-PP). À voir sur : bit.ly/3sR6iqk
• www.urofrance.org propose en accès libre des fiches info patient sur les examens ou traitements qui peuvent être proposés dans le cas d’une vessie neurologique.
Dr Nader Hadiji, spécialiste en médecine physique et de réadaptation, chef de service de médecine physique et de réadaptation au Centre de l’Arche - Pôle régional du handicap, à Saint-Saturnin (Sarthe).
Est-ce que les traitements de la vessie neurologique peuvent interférer avec la maladie neurologique ou avec son traitement ?
Oui. Prenons le cas des anticholinergiques qui sont largement utilisés dans l’hyperactivité vésicale neurogène. L’interférence thérapeutique peut exister à plusieurs niveaux. Par une augmentation ou une modulation des effets anticholinergiques du traitement de fond, par exemple de la maladie de parkinson et un risque d’aggravation des symptômes neurologiques. Se posera alors la question d’opter pour de faibles doses de toxine botulinique injectées dans la vessie. Les anticholinergiques peuvent également aggraver des troubles cognitifs ou de la déglutition pouvant accompagner la maladie neurologique. Un autre exemple avec les alphabloquants, relaxants du sphincter urétral, utilisés pour faciliter la vidange et optimiser la contraction vésicale, surtout en cas d’impossibilité de sondages intermittents. Ce traitement peut majorer l’hypotension orthostatique observée dans diverses pathologies neurologiques, comme la sclérose en plaques ou la maladie de Parkinson.
La pathologie neurologique peut-elle influencer le traitement de la vessie neurologique ?
Prenons l’exemple d’une jeune patiente atteinte d’une sclérose en plaques évoluant par poussées, et dont la vessie hyperactive reste non contrôlée par la toxine botulinique avec une incontinence et/ou des mictions fréquentes. L’option thérapeutique à privilégier est une dérivation au niveau de l’ombilic par la technique de Mitrofanoff associée à un agrandissement définitif de la vessie. Il faut néanmoins prendre en compte le risque que la patiente puisse perdre la capacité fonctionnelle de s’autosonder par l’ombilic au cours de l’évolution de la maladie. Ce type de décision est pris en réunion pluridisciplinaire de neuro-urologie et avec l’accord de la patiente bien informée des alternatives thérapeutiques et de leurs objectifs. In fine, un hétérosondage par l’ombilic, par un aidant par exemple, sera plus facile et respectueux de l’intimité qu’un sondage par voies naturelles. Autre exemple avec la maladie de Parkinson et l’iatrogénie médicamenteuse associée. Nous privilégions dans ce cas des techniques non médicamenteuses comme la stimulation tibiale postérieure pour le traitement de l’hyperactivité vésicale neurogène.
Stéphanie Hamonic, infirmière en service de médecine physique et de réadaptation à l’hôpital Raymond-Poincaré, à Garches (Hauts-de-Seine).
Quel est le rôle de l’infirmière dans l’autosondage intermittent ?
Elle joue un rôle éducatif essentiel dans l’apprentissage de la bonne pratique de l’autosondage. L’objectif est d’aider le patient à être le plus autonome possible mais aussi le préparer à une bonne prise en charge de ses troubles urinaires. L’intérêt de l’autosondage intermittent propre pour la protection de l’appareil urinaire est rappelé au patient. Cela commence par l’observation des hétérosondages réalisés par l’infirmière, qui explique ce qu’elle fait, et se termine lorsque le patient peut s’autosonder et qu’il a pris conscience de l’importance de la fréquence et de la régularité des sondages. L’acquisition de la technique peut être assez rapide pour les patients qui sont dans l’acceptation de leur prise en charge, qui s’impliquent dans le soin, posent des questions, et qui agissent en interaction avec l’infirmière. Il nous faut toutefois insister sur l’importance de maintenir le lavage des mains et la « petite toilette » dans le temps pour prévenir une tendance à minimiser les règles d’hygiène à distance de l’hôpital.
Y a-t-il des différences entre les hommes et les femmes ?
C’est plus compliqué pour les femmes. La plupart du temps, les patientes arrivent à s’autosonder mais l’apprentissage est plus long. Il faut parfois faire un peu d’anatomie pour repérer le méat entre le clitoris et le vagin. Le trouver peut être compliqué en fonction de son aspect et de sa visibilité. Au début, il est possible d’utiliser un miroir fixé sur la jambe ou posé sur le lit pour repérer l’ouverture de l’urètre, avant que la patiente n’apprenne à repérer son méat au toucher. Les premiers autosondages sont réalisés au lit avant de passer au fauteuil. Chez les hommes, en revanche, l’apprentissage se fait d’emblée au fauteuil. Certaines patientes n’arrivent jamais à s’autosonder à cause de leur morphologie, dans certains cas d’obésité par exemple, quand elles ne peuvent pas atteindre leur méat. Les médecins peuvent alors proposer des alternatives chirurgicales.
Je cote à la nomenclature
Chapitre I, Soins de pratique courante, article 6, « Soins portant sur l’appareil génito-urinaire » :
• Cathétérisme urétral chez la femme : AMI 3.
• Cathétérisme urétral chez l’homme : AMI 4.
• Éducation à l’autosondage comprenant le sondage éventuel, avec un maximum de dix séances : AMI 3,5 par séance.
• Réadaptation de vessie neurologique comprenant le sondage éventuel : AMI 4,5.
Fréquence
Pratiquer un sondage toutes les quatre heures (cinq à six sondages par 24 heures) est préconisé et permet de ne pas dépasser un volume de 400 ml par sondage pour une diurèse quotidienne de 1,5 à 2 litres.
1 TECHNIQUE
L’autosondage intermittent, ou plus précisément « l’autosondage propre intermittent », est un acte propre et non stérile. La technique, simple, doit néanmoins être appliquée rigoureusement. L’éducation du patient est fondamentale.
Matériel
• Nécessaire pour la toilette et le lavage des mains (voir ci-après).
• Sonde à usage unique prélubrifiée.
• Sac de collecteur éventuel ou récipient de recueil des urines.
• Poubelle ou sac d’élimination des urines.
• Miroir (facultatif).
→ À savoir : les infirmières sont autorisées à prescrire les « sondes de drainage vésical intermittent ou permanent » en précisant le numéro de Charrière (CH), la longueur en cm, le matériau ou la marque, ainsi que le nombre de sondages par jour, par exemple 6 sondes par jour QSP 30 jours (QSP : « quantité suffisante pour ») suivis du nombre total de jours de prescription(1).
Déroulement
• Lavage des mains à l’eau et au savon ou, à défaut, avec une solution hydroalcoolique.
• Toilette du pourtour du méat avec des lingettes sans alcool. La toilette périnéale avec des antiseptiques à chaque sondage est à proscrire.
• Préparer la sonde et la poche de recueil des urines ou le kit de sondage.
• Installer le patient : le sondage peut être réalisé couché (en position demi-assise), assis (notamment en fauteuil roulant), sur ou au-dessus des toilettes, debout jambes demi-fléchies, etc.
• Introduire la sonde sans forcer dans le méat urinaire jusqu’à ce que l’urine coule. Chez la femme, le repérage du méat se fait au doigt ou éventuellement à l’aide d’un miroir.
• Quand l’urine a fini de couler, appuyer un peu sur le bas-ventre pour vider complètement la vessie.
• Retirer progressivement la sonde. Chez l’homme, recalotter la verge après le sondage.
• Quantifier les urines et noter si besoin.
• Jeter le matériel dans la poubelle ménagère.
• Se laver les mains.
2 À DIRE AU PATIENT
Incidents pendant l’opération
• Changer de sonde si elle tombe ou touche un objet, si elle glisse ou pénètre dans le vagin.
• En cas de présence de sang sur la sonde, ce qui est souvent lié à une irritation de l’urètre, ne pas forcer le passage. Si le problème persiste après quelques jours, en informer l’infirmière ou le médecin. Faire de même en cas d’allergie.
Prévention des infections urinaires
• Boire régulièrement, au moins 1,5 litre d’eau par jour.
• Faire un lavage des mains et une petite toilette intime avant chaque sondage.
• Utiliser une nouvelle sonde à chaque sondage.
• Remplacer systématiquement une sonde tombée à terre ou qui a glissé dans le vagin.
1. Mémento de la prescription infirmière, 15e édition, décembre 2021.
Trois types d’extrémité distale fermée :
→ la sonde Mercier, cylindrique béquillée avec deux œils latéraux, est particulièrement adaptée aux courbures de l’urètre masculin ;
→ la sonde Tiemann, béquillée olivaire, avec un ou deux œils latéraux, préconisée chez l’homme en cas de rétrécissement urètral ;
→ la sonde Nélaton, cylindrique droite avec un ou deux œils latéraux est très utilisée.
Source : Porphyre n° 536, octobre 2017