L'infirmière n° 022 du 01/07/2022

 

DONNÉES DE SANTÉ

JE DÉCRYPTE

LE MOIS EN BREF

Lisette Gries  

Neuf services de santé au travail interentreprises ont décidé de mutualiser leurs données afin de mener des études épidémiologiques et produire des indicateurs de référence. In fine, ces baromètres serviront à orienter les actions de prévention et les axes de suivi des travailleurs.

Lors du 36e Congrès national de médecine et santé au travail qui s’est tenu du 14 au 17 juin, neuf services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) ont annoncé la création d’un Observatoire national de santé au travail*. « L’objectif est de mettre en commun nos données pour avoir une meilleure connaissance des risques auxquels les travailleurs sont exposés et leur vécu au travail, explique le directeur du Centre interentreprises et artisanal de santé au travail (Ciamt), le Dr Vinh Ngo. Ainsi, nous pourrons mieux orienter nos actions en milieu de travail et adapter le suivi médical des salariés, mais aussi proposer des axes de prévention primaire en adéquation avec leur quotidien professionnel. » De premières données ont été publiées le 16 juin. « En comparant nos indicateurs, nous pouvons trouver les points de concordance et de discordance entre ce que déclarent les salariés et les employeurs, poursuit-il. Le regard et l’expertise des équipes sont aussi nécessaires. »

EMPLOYÉS, EMPLOYEURS ET DÉCLARATIONS

Ce premier baromètre s’appuie sur les données de sept SPSTI répartis sur cinq régions françaises. Plus de 163 000 salariés de près de 50 000 entreprises ont répondu à un questionnaire. Les employeurs se sont également prêtés au jeu des déclarations. L’échantillon ne se veut pas représentatif d’une situation nationale, mais il est pertinent au regard des populations suivies par les sept SPSTI.

Et plusieurs chiffres émergent. Un peu plus de la moitié des salariés déclarent être exposés à un facteur de risque biomécanique. La posture contraignante est d’ailleurs l’exposition la plus citée (44 %). La manipulation de charges lourdes ou de personnes est relevée par 27 % d’entre eux. Le deuxième facteur de risque tient aux horaires atypiques (32 %), avec 29 % des salariés qui déclarent travailler en équipe alternante, en horaires discontinus ou le week-end. Viennent ensuite le facteur physique (32 %) (bruit, intempéries, etc.) et l’exposition aux agents chimiques (29 %).

De leur côté, les employeurs placent aussi les facteurs de risque biomécaniques en tête (57 %). Cependant, les déclarations diffèrent pour les autres risques : les horaires atypiques ne sont cités qu’à 16 % et les agents chimiques à 21 %. Deux tiers mentionnent que leurs employés sont exposés à un risque d’accident.

« Grâce à des études de ce type, nous pouvons identifier les facteurs de risque, mais aussi les facteurs protecteurs de la santé des travailleurs, insiste Dr Vinh Ngo. Les services de santé au travail doivent faire leur révolution numérique. L’enjeu est de faire entrer la médecine du travail dans une logique plus intégrative. » Un prochain baromètre, plus élargi, sera publié dès l’automne.

* Ciamt, San.T.BTP, AST74, APST18, APST41, Gims, Sist, CMIE et Santra Plus.

Lire l’interview du Dr Vinh Ngo, espaceinfirmier.fr, le 23/06.