Dans un avis rendu mardi 13 septembre, le Comité consultatif national d’éthique ouvre la voie à une aide active à mourir avec des conditions strictes. Il plaide par ailleurs pour que les soins palliatifs deviennent une priorité.
C’est un avis inattendu, en rupture avec ses prises de position antérieures, qu’a rendu le Comité consultatif national d’éthique (CCNE)(1) : « Il existe une voie pour une application éthique d’une aide à mourir, à certaines conditions strictes, avec lesquelles il apparaît inacceptable de transiger », énonce-t-il. L’instance reconnaît les avancées législatives de ces vingt dernières années des droits des personnes en fin de vie, notamment celles de la loi Claeys-Leonetti de 2016, mais elle estime que si « le cadre juridique actuel est satisfaisant lorsqu’un pronostic vital est engagé à court terme », il n’apporte pas toujours une réponse dans certaines situations où celui-ci est engagé à moyen terme. Le CCNE les définit précisément. Il s’agit de personnes adultes souffrant de maladies graves et incurables, provocant des douleurs physiques ou psychiques réfractaires dont le pronostic vital est engagé à moyen terme, ou encore en situation de dépendance à des traitements vitaux dont l’arrêt n’entraîne pas de décès à court terme. D’autres garde-fous, éthiques, seraient à prendre en compte si l’on devait légiférer. Par exemple, la demande d’aide active à mourir « devrait être exprimée par une personne disposant d’une autonomie de décision au moment de la demande, de façon libre, éclairée et réitérée ». Et la suite donnée à la volonté exprimée devrait être tracée et argumentée.
Cependant, l’aide active à mourir ne saurait être le seul axe de réflexion et d’action. Les soins palliatifs doivent être une « priorité » des politiques de santé publique, estime le CCNE. Et de déplorer une mise en œuvre très insuffisante de la législation en vigueur « sur le territoire (…) mais aussi dans l’ensemble des établissements (hôpitaux, Ehpad, domiciles) », selon les propos d’Alain Claeys, coauteur de la loi Claeys-Leonetti, rapportés par APM News. Le CCNE pointe « un décalage » entre l’appropriation du droit relatif à la fin de vie et son application. Les directives anticipées notamment restent insuffisamment promues « auprès du public comme des professionnels ». En matière de soins palliatifs, il ne s’agit pas tant de légiférer mais plutôt de renforcer les moyens financiers alloués à ces derniers pour un accès plus équitable. Le CCNE recommande par ailleurs « le développement effectif d’une discipline universitaire (idéalement interdisciplinaire) ». Déjà créée en 2016, elle serait restée « à l’état fictif » indiquent les auteurs de l’avis. Un rapport de la Cour des comptes sur les soins palliatifs est attendu d’ici à juin 2023 par l’Assemblée nationale afin de dresser un état des lieux précis. Espérons qu’il ne reste pas lettre morte.
1. Avis 139 - Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité, CCNE. En ligne sur : bit.ly/3UoE2XR