ACCUEILLIR UN STAGIAIRE DANS LES RÈGLES DE L’ART
RESSOURCES HUMAINES
J’EXERCE EN LIBÉRAL
RÉGLEMENTATION
Recevoir un étudiant en soins infirmiers (ESI) en cabinet libéral ne s’improvise pas. Pour que l’ESI comme l’infirmière y trouvent leur compte, mieux vaut anticiper cette rencontre.
Les Instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) encouragent les cabinets d’Idels à accueillir les étudiants en soins infirmiers (ESI) en stage. « Ces terrains de stage sont très intéressants pour nos étudiants, car les Idels ont de plus en plus de soins très spécifiques et techniques à effectuer au domicile des patients tels que la prise en charge d’une chimiothérapie ou des plaies complexes », souligne Florence Girard, présidente de l’Association nationale des directeurs d’écoles paramédicales (Andep) et directrice de l’Ifsi d’Ussel (Corrèze). Et d’ajouter : « Les ESI sont d’ailleurs nombreux à nous demander des stages en libéral et je les favorise, aussi parce que ce mode d’exercice représente l’avenir de la profession, avec l’augmentation de la prise en charge des pathologies chroniques. » Dans les cabinets de groupe, les étudiants peuvent être amenés à travailler avec plusieurs Idels, leur offrant une vision plus large de l’exercice du métier. « C’est un bon moyen pour eux de découvrir le rôle clé des Idels dans la coordination des soins », soutient Michèle Appelshaeuser, présidente du Comité d’entente des formations infirmières et cadres (Cefiec) et directrice de l’Ifsi Epsan de Brumath (Bas-Rhin).
Le stage en cabinet libéral peut se dérouler au cours des trois années de formation, même si en général, la deuxième ou la troisième année sont privilégiées. Dans le Grand Est, les Ifsi se sont entendus pour offrir la possibilité d’un stage en libéral, de cinq ou dix semaines, aux étudiants de troisième année, ayant déjà validé quatre compétences. « Selon nous, un stage auprès d’une Idel implique de la part de l’ESI, une maîtrise d’un certain nombre d’actes, afin que cela ne soit pesant ni pour lui, ni pour l’Idel qui l’accueille », souligne Michèle Appelshaeuser.
Pour recevoir un ESI en stage, le cabinet doit être agréé. Le référentiel de formation des ESI (arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’État d’infirmier), prévoit que les lieux de stage doivent être choisis en fonction des ressources qu’ils peuvent offrir aux étudiants. Un stage va donc être reconnu « qualifiant » dès lors que le maître de stage se porte garant de la mise à disposition des ressources et des activités permettant un réel apprentissage.
Pour être agréé, le lieu de stage doit élaborer une charte d’encadrement avec les Ifsi partenaires, formalisant les engagements des deux parties. « Sur notre territoire, nous avons élaboré, en inter-Ifsi, une charte d’encadrement que nous avons fait valider par l’agence régionale de santé (ARS) », fait savoir Michèle Appelshaeuser.
Les lieux de stage doivent également élaborer un livret d’accueil comportant :
→ des éléments d’information nécessaires à la compréhension du fonctionnement du lieu de stage : type de cabinet, population soignée, pathologies traitées, etc. ;
→ les situations les plus fréquentes devant lesquelles l’étudiant pourra se trouver ;
→ les actes et activités qui lui seront proposés ;
→ les éléments de compétences plus spécifiques qu’il pourra acquérir ;
→ la liste des ressources offertes à l’étudiant dans le stage ;
→ les modalités d’encadrement : établissement d’un tutorat nominatif, prévision d’entretiens à mi-parcours et d’entretiens d’évaluation ;
→ les règles d’organisation du stage : horaires, tenue vestimentaire, présence, obligations diverses.
L’accueil d’un ESI implique forcément de la bonne volonté car « l’encadrement demande du temps et un investissement personnel », reconnaît Michèle Appelshaeuser. « Nous avons des retours de certains étudiants, nous informant que des Idels refusent qu’ils réalisent certains actes car ils sont trop longs », regrette Florence Girard. Pour éviter ce type de situation, fluidifier le déroulement du stage et assurer l’apprentissage, il est conseillé, à l’arrivée de l’ESI, d’évaluer son niveau de compétences, de connaissances et son savoir-faire. « De cette manière, l’Idel peut savoir dans quoi elle s’engage et s’organiser en conséquence, prévient Florence Girard. Si elle sait que l’ESI n’a jamais accompli tel ou tel acte, elle peut alors lui demander, pendant la tournée, de bien l’observer en train de le réaliser, faire ensuite un débrief, avant de lui laisser l’opportunité de l’effectuer à son tour. » Dès que l’ESI réalise un nouveau geste, il est également intéressant d’en parler juste après son exécution, afin de l’évaluer, pour lui permettre de s’améliorer si nécessaire. « Il est important d’insister sur la bonne compréhension de l’ESI au regard de la situation d’un patient, donc de profiter des cas cliniques pour s’assurer de l’acquisition des compétences et des connaissances », insiste Florence Girard. C’est dans ce cadre qu’il peut construire son raisonnement clinique. Bien entendu, l’accueil d’un stagiaire implique aussi de prévenir la patientèle en amont. « Il est difficile de leur imposer la présence d’un étudiant sans un minimum de préparation », conseille Michèle Appelshaeuser.
L’Idel qui accueille le stagiaire devient son tuteur. Dans un cabinet de groupe, un seul tuteur doit être identifié même si l’ESI est amené à effectuer les tournées avec plusieurs Idels. Dans ce cas particulier, pour l’évaluation, « l’ensemble des paramédicaux doivent mettre en commun leurs appréciations ou les noter sur un cahier pour les transmettre au tuteur », fait savoir Florence Girard.
La formation au tutorat de stage est d’ailleurs fortement recommandée. Elle est utile pour mettre à niveau les connaissances des Idels sur la formation des ESI, les attendus, la compréhension des acquis de l’étudiant et l’usage du portfolio. Ce document, qui représente le fil conducteur du parcours d’apprentissage de l’ESI, est indispensable dans le cadre du stage, car il permet de détenir une vision globale de son cursus. Grâce aux grilles de synthèse, le formateur responsable du suivi pédagogique établit les bilans semestriels. Il sert également à effectuer le bilan de fin de formation car il est renseigné simultanément par l’étudiant et le tuteur lors de l’entretien d’évaluation de fin de stage.
Les Idels sont encore peu nombreuses à suivre cette formation, notamment parce qu’elles doivent venir sur leur temps de repos pendant quatre jours. Cependant, les organismes de formation prennent financièrement en charge ces journées.
Dès lors que les Idels acceptent un étudiant en soins infirmiers (ESI) en stage, elles doivent respecter un certain nombre de règles. En voici quelques-unes :
- Ne pas laisser un étudiant seul chez un patient : « Il arrive que des Idels laissent du temps à un ESI pour effectuer des soins techniques et qu’elles cherchent à rattraper ce temps sur la suite de leur tournée, en le laissant seul au domicile d’un patient, pour effectuer des soins de nursing, rapporte Florence Girard, présidente de l’Association nationale des directeurs d’écoles paramédicales. C’est totalement interdit, l’ESI devant toujours se trouver sous la supervision de l’Idel. »
- Respecter les 35 heures par semaine : les ESI ne peuvent travailler plus et la convention de stage doit préciser l’organisation des horaires. Les Idels doivent donc être attentives à l’amplitude journalière, « car ce n’est pas parce qu’elles travaillent plus de 10 heures par jour qu’elles peuvent en demander autant aux ESI, d’autant plus que leur vigilance va être moindre », alerte Florence Girard. Aussi, certains ESI sont prêts à effectuer de nombreuses heures cumulées de stage afin de disposer d’un plus grand nombre d’heures de repos consécutives. « Les étudiants doivent toutefois faire preuve d’une certaine souplesse, en raison des particularités de l’exercice libéral », tempère Michèle Appelshaeuser, présidente du Comité d’entente des formations infirmières et cadres.
- Ne pas compter sur la voiture personnelle de l’ESI : seul le véhicule de l’Idel doit servir à la réalisation de la tournée.