L'infirmière n° 029 du 01/02/2023

 

JE ME FORME

BONNES PRATIQUES

Christian Dupont*   Nicolas Dumortier**  


*infirmier de suivi de parcours patients centre hospitalier universitaire Cochin, Assistance publique-Hôpitaux de Paris
**Iade, centre hospitalier de Quimper.

PRÉSENTATION

La localisation de l’extrémité d’un cathéter le définit et oriente son indication. Plus la veine est proche du cœur, plus son diamètre interne et le débit sanguin sont importants. Lorsque l’extrémité d’un cathéter est située au niveau de la veine cave supérieure ou inférieure, le débit sanguin est égal ou supérieur à 2 litres/minute : il est alors possible d’injecter tous les traitements intraveineux (y compris ceux qui sont toxiques pour l’endothélium veineux), sans créer une thrombose chimique. Ces veines ont également un diamètre important et permettent, à condition que le diamètre du cathéter soit inférieur ou égal au tiers du diamètre de la veine hôte, de prévenir le risque de thrombose veineuse mécanique en réduisant la gêne de l’écoulement du flux sanguin et de prélever aisément du sang via le cathéter (1,2).

Le cathéter périphérique long, le Midline et le Picc-line sont insérés dans une veine périphérique du bras, systématiquement pour les deux derniers. Cependant leur longueur diffère et seule l’extrémité du Picc-line (cathéter central à insertion périphérique) atteint la veine cave supérieure. Utilisés comme un Picc-line, les deux autres dispositifs exposent le patient au risque de thrombose et perdent plus facilement leur perméabilité.

Les cathéters périphériques longs (CPL), appelés aussi mini-Midlines, munis ou non d’un prolongateur intégré, mesurent entre 6 et 15 cm. Ils sont insérés sur l’avant-bras ou - en utilisant l’échoguidage pour la ponction - sur le bras, et peuvent être montés sur une aiguille guide ou par la technique de Seldinger indirecte. Les cathéters périphériques longs permettent la ponction de la veine sous échoguidage. Leur extrémité, située plus haut dans le bras, favorise théoriquement une augmentation de leur temps d’implantation (de 7 à 14 jours environ).

Les Midlines (photo 1), munis ou non d’un prolongateur intégré, de diamètre variable (de 2 à 5 French ou Fr), monolumières ou bilumières, mesurent entre 16 et 25 cm. Insérée par échoguidage, leur extrémité est située dans la veine axillaire - parfois dans la première portion de la veine sous-clavière (voir infographie ci-contre). Le Midline sans prolongateur intégré a l’apparence d’un cathéter veineux périphérique court ou long ; son design ne permet pas de clamper le cathéter au moment du changement de la ligne de perfusion. La connexion aseptique avec un prolongateur court muni d’un clamp en facilite l’utilisation. Un Midline avec un prolongateur intégré peut rester implanté un mois.

Les Picc-lines (photos 2 et 3). Comprise entre 50 et 60 cm, leur longueur doit être ajustée à l’anatomie du patient, ce qui nécessite, pour la quasi-totalité des fournisseurs, de les couper. Sa durée d’implantation est très variable. L’abord veineux recommandé pour un traitement de longue durée reste le cathéter à chambre implantable, envisageable à partir d’une prescription de 3 mois. Il existe des Picc-lines à 1, 2 et 3 voies (pour injections simultanées de médicaments incompatibles). Les diamètres standards sont 4 Fr, 5 Fr et 6 Fr. Le diamètre varie également avec le nombre de voies.

Le Picc-line peut être doté d’une valve bidirectionnelle intégrée ou non (lire encadré « Savoir + » p. 14 et voir photo 4 p. 16)

Il existe des cathéters longs, Midlines et Picc-lines en polyuréthane haute pression, compatibles avec l’injection à haute pression (300 à 325 psi) et un débit élevé (5 ml/s) de produits de contraste en radiologie.

Le débit et la pression maximale d’injection sont systématiquement indiqués, soit sur le prolongateur, soit sur le raccord Luer, soit sur le clamp.

LE CHOIX DU CATHÉTER

La possibilité d’insertion par échoguidage des CPL, Midlines et Picc-lines permet une large utilisation de ces trois types de cathéters. Ils sont notamment indiqués chez les patients dont les veines sont difficiles à ponctionner, comme en cas d’obésité.

Le choix va dépendre :

→ de la veinotoxicité du traitement (pH et osmolarité extrêmes, toxicité cutanée en cas d’extravasation), de sa durée et de la fréquence de son administration ;

→ de la fréquence des prélèvements sanguins car la perméabilité des cathéters longs et Midlines s’altère plus rapidement qu’avec un Picc-line ;

→ de la possibilité d’utiliser le capital veineux superficiel du patient ;

→ du contexte de soin (lieu du soin, existence de protocole de coopération entre professionnels de santé, etc.)

En résumé, avec un Picc-line, il est possible d’administrer tous les traitements de manière répétée et de faire des prélèvements sanguins tout au long de son implantation. Avec un cathéter long et un Midline, seuls les traitements à osmolarité et pH compatibles avec injection sur veine périphérique sont réalisables. La possibilité de prélèvements sanguins est aléatoire sur cathéter long ; par le biais du Midline, elle devient aléatoire après 7 jours d’insertion. Pour les traitements vésicants/nécrosants (ex. : les antimitotiques), la nutrition parentérale, un Picc-line est recommandé.

LA POSE

Les précautions prises pour la pose d’un Picc-line répondent aux exigences d’un acte invasif à haut risque septique. L’acte peut être réalisé dans une salle à empoussièrement maîtrisé (bloc opératoire), en salle de radiologie interventionnelle, en unité de réanimation. Un cathéter long ou un Midline doivent être également insérés avec un maximum d’asepsie, toutefois, la pose peut être réalisée au chevet du patient.

Pour le personnel non médical, il est possible de poser ces cathéters sous repérage échographique. La loi le leur permet dans le cadre d’un protocole de coopération qui doit être adapté à chaque spécialité ou corps de métier (lire encadré ci-dessus).

UTILISATION DES CATHÉTERS

Une fois le cathéter mis en place, le rôle infirmier consiste à réaliser les soins dans les conditions d’asepsie optimale et à effectuer une surveillance journalière.

Les indicateurs de bon fonctionnement d’un cathéter sont :

→ la présence de reflux veineux ;

→ une injection du traitement sans résistance, un débit de perfusion non ralenti ;

→ l’absence de douleur en dehors et durant l’utilisation ;

→ l’absence d’œdème du bras ou de comblement du creux sus-claviculaire du côté de l’insertion du cathéter ;

→ l’absence de signe local ou général d’inflammation ou d’infection.

Toute anomalie lors du renseignement de cette liste doit être expliquée pour savoir si le cathéter peut être utilisé sans risque ou non (voir plus loin les complications).

Précautions générales :

→ Quel que soit le type de cathéter, une hygiène efficace des mains par friction hydroalcoolique (FHA) doit être systématiquement réalisée avant toute manipulation de la ligne de perfusion et avant d’enfiler les gants stériles pour la réfection du pansement de cathéter, le raccordement de la ligne principale de perfusion ou toute autre manipulation au plus près du pavillon de raccordement du cathéter. Les manipulations des sites d’injection (robinet, valve bidirectionnelle) doivent être effectuées après FHA et avec des compresses stériles imbibées d’antiseptique alcoolique.

SOINS ET MANIPULATIONS DE LA LIGNE

Injection. Il est fortement recommandé d’utiliser exclusivement des seringues dont le diamètre du corps est égal ou supérieur à celui d’une seringue de 10 ml afin d’éviter les ruptures de cathéter par surpression. Toute injection doit être immédiatement suivie d’un rinçage efficace du cathéter.

Prélèvement sanguin. Il est possible sur tous les cathéters en respectant une asepsie rigoureuse et en rinçant en fractionné avant et après le prélèvement. Cependant la perméabilité des cathéters longs et de Midline peut parfois être aléatoire à distance de l’insertion ; ce qui n’est pas le cas avec le Picc-line.

VALVE BIDIRECTIONNELLE

Une valve bidirectionnelle n’est pas une valve antisiphon ni une valve antiretour. Elle est « un dispositif médical permettant un accès direct à la voie veineuse. La valve est ouverte par la connexion d’un embout Luer mâle (seringue, prolongateur, perfuseur) et autorise alors l’injection comme l’aspiration - d’où l’appellation « bidirectionnelle » - puis se referme lors du retrait de l’embout Luer mâle. Initialement conçues pour limiter l’usage des aiguilles (needleless system) sur les sites d’injection en élastomère dans le cadre de la prévention des accidents d’exposition au sang, les valves bidirectionnelles prennent progressivement la place de bouchons obturateurs au niveau des accès aux voies veineuses centrales et périphériques. »(4)

Avant la connexion, la surface de percussion de la valve doit être impérativement désinfectée en frictionnant au moins 15 secondes avec des compresses stériles imprégnées d’alcool à 70 % v/v. La connexion s’effectue une fois que l’antiseptique appliqué est sec. De manière pratique, la valve bidirectionnelle est renouvelée durant la réfection du pansement transparent, tous les huit jours.

Il existe deux types de valves bidirectionnelles selon leur comportement au retrait de l’embout Luer :

→ avec flush positif, c’est-à-dire qu’« au retrait de l’embout Luer, un volume variable de liquide est expulsé de la valve vers la voie veineuse empêchant un reflux de sang à l’extrémité du cathéter »(4) ;

→ sans flush positif, c’est-à-dire que « le retrait de l’embout Luer entraîne le reflux d’un volume de liquide, reflux qui va être transmis à l’extrémité du cathéter provoquant l’aspiration d’un volume plus ou moins important de sang dans la lumière du cathéter » qui peut altérer sa perméabilité.

Selon le type de valve utilisée, voici la technique de déconnexion à suivre :

→ avec une valve sans flush positif et une valve dite neutre, il convient de clamper la voie puis de déconnecter l’embout Luer ;

→ avec une valve à flush positif, il convient de déconnecter l’embout Luer et de clamper.

Quand le cathéter n’est pas utilisé, il convient de clamper car en cas de défaillance du matériel, c’est la seule parade au reflux sanguin et à l’embolie gazeuse.

RINÇAGE DE LA LIGNE

Un rinçage de la ligne est effectué après injection ou perfusion ou prélèvement sanguin(5). Plutôt qu’un rinçage, terme plus approprié pour désigner l’administration d’un liquide afin d’injecter le résidu de médicament contenu dans la tubulure et le cathéter, celui de nettoyage conviendrait mieux. Le processus pour décrocher les particules (sang, résidus médicamenteux, etc.) accrochées sur la paroi interne d’une ligne de perfusion et d’un cathéter est le suivant :

→ injecter avec une seringue dont le diamètre du corps est celui d’une seringue de 10 ml, 10 fois 1 ml de NaCl isotonique en marquant une pause d’un quart de seconde entre chaque poussée. La poussée du pouce sur le piston ne doit pas être violente mais comparable à la pression qu’il exerce lors de la réalisation d’une injection intraveineuse directe. À l’image du nettoyage d’un sol avec un balai, c’est la multiplication des forces de friction qui nettoie la surface, non la forte pression exercée ;

→ si le produit injecté est visqueux (produit sanguin labile, produit d’opacification radiologique, par exemple), refaire une injection de 10 ml de NaCl isotonique en suivant le même mode opératoire peut être nécessaire.

PANSEMENTS (9,10,11)

Il convient de distinguer le pansement en postopératoire immédiat de celui effectué en routine.

Le pansement en postopératoire fait par l’opérateur qui vient d’insérer le cathéter, s’il ne dépose pas de colle biologique sur le point d’insertion pour éviter les saignements, a pour but de maintenir, protéger le cathéter et d’absorber les saignements éventuels. Ce pansement doit être refait dans les 48 heures qui suivent l’insertion (photos 5).

Le pansement de routine ou d’entretien a plusieurs objectifs. Il doit prévenir :

→ les infections par la désinfection de la peau, du site d’insertion et du matériel qui seront protégés sous le pansement ;

→ le déplacement accidentel du cathéter par l’utilisation de fixation sans suture ;

→ la mobilisation accidentelle du dispositif par traction sur la ou les lignes de perfusion ;

→ la prise en charge tardive de complications en permettant une surveillance pluriquotidienne du site d’insertion sans retirer le pansement.

Le renouvellement du pansement de routine est réalisé toutes les semaines si on utilise un pansement stérile transparent semi-perméable et tous les quatre jours si on utilise un pansement opaque. En cas de décollement et/ou de souillure, le pansement doit être refait le plus tôt possible. Le pansement de routine est un soin stérile qui comprend la désinfection de la peau après retrait du fixateur, la mise en place d’un nouveau fixateur et d’un pansement protecteur (lire aussi « Le pansement du Picc-line et du Midline en pratique »).

L’INSTALLATION DU PATIENT

C’est un des éléments principaux de ce soin stérile. Dépourvu de toute fixation sur la peau du patient, le cathéter doit pouvoir reposer sur une surface plane et non mobile. Si un changement de ligne veineuse est nécessaire et si les injections peuvent être interrompues un moment, préférer une réfection de pansement sans ligne veineuse. Ceci afin d’éviter la mobilisation accidentelle du cathéter et donc le déplacement de son extrémité dans une zone à risque de thrombose (photo 6).

LES ANTISEPTIQUES

Sur peau saine, il est recommandé d’utiliser des antiseptiques alcooliques à large spectre avec rémanence de type chlorhexidine à 2 % alcoolique - la question sur l’emploi indifférencié de la concentration à 0,5 % n’est pas clairement tranchée - ou povidone iodée alcoolique. L’antiseptique utilisé doit contenir au moins 70 % d’alcool. Lorsque la peau est abîmée, après s’être assuré que le cathéter peut bien être utilisé sans risque infectieux, il convient de se renseigner si un antiseptique aqueux à base de povidone iodée à 10 % peut être utilisé. L’utilisation d’un antiseptique coloré, peu apprécié par certains patients, facilite pourtant le repérage de la zone désinfectée.

LES FIXATEURS

Les fixateurs sans suture sont à l’origine des dispositifs médicaux créés pour prévenir les accidents d’exposition au sang d’où leur dénomination de sutureless. Parmi ceux-ci, il existe des fixateurs de courte et de moyenne durée (Statlock, photos 7 et 8, et Grip-Lock, pour citer les plus usités) et de longue durée (SecurAcath, photo 9).

Les fixateurs de courte et de moyenne durée se déclinent en deux types de dispositifs :

→ le premier comprend un système qui enserre la connectique du cathéter par un clip (ex. : Statlock) ou par une encoche rigide ouverte latéralement sur laquelle on rabat une bandelette adhésive (ex. : 3M Picc-CVC Securement) ou encore par un socle avec empreinte préformée et spécifique ou non au type de cathéter utilisé et recouverte par un rabat englué ou non dont la fermeture est verrouillée par une fixation scratch (ex. : Grip-Lock) ; ce maintien de la connectique est collé sur un socle adhésif qui vient lui-même se coller sur la peau du patient. Certains fabricants fournissent le fixateur et le pansement (ex. : 3M Picc-CVC Securement) ;

→ le deuxième type de fixateur de courte et de moyenne durée est une ou des bandelettes qui fixent la connectique sur la peau et un pansement en deux parties, renforcé pour éviter que la tubulure d’extension du cathéter ne soulève le pansement et le décolle (ex. : Sorbaview, photo 10).

Ces dispositifs, assez simples, méritent quelques explications car leur emballage est le plus souvent dépourvu de notice d’utilisation et leur manipulation, alors que le cathéter reste sans fixation aucune et peut accidentellement sortir de la veine, est délicate (lire encadré « trucs et astuces », p. 21).

Le SecurAcath (photo 9)(12), fixateur de long terme, prévient la mobilisation accidentelle du cathéter durant la réfection du pansement. Il enserre le cathéter dans une gouttière qui se clippe, elle-même reliée à une petite ancre en métal inoxydable qui est glissée sous la peau par le point d’introduction du cathéter. Elle reste le temps d’insertion du cathéter et ne nécessite pas de renouvellement comme les fixateurs adhésifs précités. Durant le pansement, le SecurAcath doit être mobilisé pour éviter les adhérences cutanées, sources de douleurs locales quand le cathéter bouge. À condition d’être formé à sa manipulation, l’infirmier est habilité à retirer le SecurAcath.

CHOIX DU PANSEMENT

Il est recommandé d’utiliser des pansements transparents semi-perméables stériles. Les pansements à bords tissés et siliconés évitent le décollement des bords dus aux frictions répétées des vêtements. Il n’est pas inutile de rappeler que le pansement transparent peut protéger d’une éclaboussure minime et accidentelle mais pas du jet que représente la prise d’une douche lors de l’hygiène quotidienne. Le pansement n’étant pas étanche, il convient de se doucher uniquement l’hémicorps inférieur ou d’employer des dispositifs de protection étanche de type manchon imperméable ou pansement Secuderm. Les pansements en deux parties renforcent le maintien du cathéter en contrant l’effet « pied de biche » généré lors de tractions brusques et intempestives sur la tubulure qui sort par-dessous le pansement.

LA SÉCURISATION DE LA LIGNE DE PERFUSION

Il est nécessaire de trouver avec le patient des solutions pratiques pour que l’habillage et le déshabillage quotidien ne soient pas des moments à risque de mobilisation accidentelle de la ligne de perfusion et donc du cathéter. Des manchons textiles comme le Tubifast peuvent être utilisés. Il faut noter qu’aujourd’hui une gamme de vêtements confortables et esthétiques, adaptés à la vie quotidienne des patients porteurs de cathéters brachiaux et à la réalisation des soins est disponible.

RETRAIT

Légalement, une infirmière peut retirer un cathéter central à condition qu’un médecin puisse intervenir dans les meilleurs délais en cas de problème(13). Pour cette raison, une infirmière libérale, seule au domicile du patient, ne peut pas retirer un Picc-line. Le plus simple est de contacter le médecin traitant du malade pour lui demander de réaliser le geste - voire de l’informer des modalités pratiques de retrait en lui commentant une vidéo préalablement envoyée par courriel (photo 11). Bien sûr, cela se planifie le plus tôt possible. L’infirmière libérale est autorisée par contre à retirer un Midline dans les mêmes conditions que pour un cathéter périphérique court.

Le retrait du cathéter périphérique long, du Midline et du Picc-line est absolument indolore. Le déroulement de l’acte est le suivant :

→ le patient est allongé. Son bras forme un angle de 90° par rapport au torse ;

→ le fixateur est retiré et l’opérateur, protégé avec des gants non stériles, tire délicatement sur le cathéter. En cas de résistance, il tourne celui-ci entre le pouce et son index pour libérer un dépôt de fibrine pris dans une valvule. Si la résistance perdure, remettre un pansement de protection et demander un doppler veineux à la recherche d’une thrombose ou d’une endothélialisation possibles. Ces deux dernières complications sont extrêmement rares mais doivent être envisagées en cas de problème ;

→ une fois le cathéter totalement extrait, comprimer le point d’insertion avec une compresse stérile sèche durant une à deux minutes selon l’hémostase du patient ;

→ désinfecter le site d’insertion et mettre un pansement sec qu’il convient de garder une heure ;

→ s’assurer, en comparant la longueur tracée par le poseur, que l’intégralité du cathéter a bien été récupérée ;

→ dire au patient qu’il pourra retirer le pansement dans une heure et qu’il n’est pas nécessaire de le renouveler, qu’il peut se laver et se doucher, qu’il doit contacter l’infirmière en cas de signes locaux d’inflammation et/ou de douleur ou tension dans le bras, signes d’une altération de la perméabilité de la veine cathétérisée. Rare mais possible, elle requiert la réalisation d’un doppler.

Au fur et à mesure des insertions de Midlines ou Picc-lines, des cicatrices punctiformes apparaissent. Pour éviter cela, il convient de ne pas exposer au soleil la zone concernée durant une année.

En cas de mise en culture de l’extrémité du cathéter (suspicion d’infection), le soin est réalisé avec des gants stériles. Avant le retrait du cathéter, le point d’injection et son pourtour sont désinfectés afin d’éviter de contaminer l’extrémité du dispositif sur la peau lors du retrait.

ENTRETIEN SI LE CATHÉTER N’EST PAS CONTINUELLEMENT PERFUSÉ

Il est recommandé de vérifier le retour veineux et immédiatement de rincer les Midlines et les Picc-lines monolumières une fois par semaine avec 10 ml de NaCl isotonique injectés en fractionné, en même temps que le renouvellement du pansement transparent et de la valve bidirectionnelle. Le rinçage des Picc-lines multilumières ne fait pas consensus car les études manquent. Aussi, il semble raisonnable de rincer deux fois par semaine le cathéter quand le diamètre des lumières internes est inférieur à celui d’un cathéter de 4 Fr en polyuréthane. La même remarque vaut pour les cathéters longs et les Midlines.

TRAÇABILITÉ

La traçabilité des actes et surveillance est une obligation légale mais surtout un soin de grande utilité pour le patient et le soignant car il renseigne sur les actions à entreprendre (ex. : la réfection du pansement), sécurise la prise du relais (ex. : ne pas injecter dans la circulation un verrou thrombolytique ou antibiotique), renseigne sur les performances du cathéter (ex. : reflux veineux présent et pas de résistance à l’injection). Enfin, la traçabilité de la date de pose, du retrait et du motif de retrait (fin de traitement ou complication) permet de savoir si le cathéter a rempli sa mission jusqu’au bout et ce qu’il convient de faire pour améliorer la situation ou en vue d’un futur traitement.

L’INFORMATION DU PATIENT

L’infirmière doit s’assurer que le patient sait gérer son cathéter au quotidien (durant l’habillage et le déshabillage, la douche, etc.), dépister une éventuelle complication et quoi faire en cas de problème (geste à réaliser immédiatement, numéro de téléphone à contacter). L’information doit être utile, claire, adaptée et personnalisée. Elle ne doit pas être anxiogène pour le patient (ex. : des informations contraires lui sont données ou les possibles complications lui sont expliquées de manière catastrophique, sans solution).

COMPLICATIONS

L’obstruction est la complication la plus fréquemment rencontrée. La désobstruction mécanique par la « pop technique » (désobstruction mécanique en exerçant des séquences répétées d’aspirations-injections douces avec une seringue de 10 ml remplies avec 2 ml de Na Cl isotonique) est efficace mais elle ne retire pas les dépôts sur la surface interne des parois. Donc, quoi qu’il en soit, un protocole de restauration de la perméabilité du cathéter par thrombolytique (urokinase(14) ou altéplase) est nécessaire. En l’occurrence, l’héparine, inefficace, ne doit pas être utilisée pour prévenir ou traiter une occlusion du cathéter.

L’infection. La survenue de signes locaux (rougeur, écoulement purulent au point d’insertion, œdème) et généraux (fièvre, frissons, douleur à l’injection) d’une possible infection doit être quotidiennement surveillée par le soignant et le patient lorsqu’il est à son domicile.

La thrombose veineuse. Les signes suivants doivent faire penser à un problème thrombotique : un bras œdématié (comparer la circonférence des bras en la mesurant avec un mètre ruban) et/ou un comblement du creux sus-claviculaire (pour les Picc-lines) ; l’apparition d’une circulation collatérale superficielle ; un bras engourdi, tendu ; une perte de perméabilité du cathéter ou une disparition du reflux veineux persistante et non résolue par thrombolytique (photo 14).

Autre signe évocateur d’un problème de thrombose veineuse ou de sténose ou d’une fausse route du cathéter : un écoulement à partir de son point d’insertion qui oblige à une réfection quotidienne voire pluriquotidienne du pansement (photos 5). Une radiographie sans injection de produit de contraste (en présence d’un Picc-line) renseigne sur le bon positionnement de l’extrémité. Quel que soit le type de cathéter, l’examen de référence en cas de suspicion de thrombose est le doppler veineux. Le médecin envisagera ou non un traitement par héparine de bas poids moléculaire suivie d’une évaluation à distance.

Les lésions cutanées dues au pansement Ces cathéters nécessitent constamment d’être protégés par des pansements adhésifs, plus ou moins agressifs pour la peau (photo 15). Il convient d’identifier en amont les patients à peau fragile et d’utiliser les pansements les plus respirants et les moins agressifs. Il faut surtout attendre que l’antiseptique soit complètement sec avant d’appliquer le pansement et ne pas le poser en tension sur la peau.

Pour conclure, l’utilisation de ces dispositifs médicaux nécessite un apprentissage et de la rigueur pour éviter qu’elle soit la source de nouveaux problèmes pour le patient. Ces cathéters sont un moyen d’offrir une réponse plus adaptée à ses besoins.

* Cet article fait suite à la publication de « Cathéter veineux périphérique court et patient adulte », L’infirmièr.e n° 13, octobre 2021.

RÉFÉRENCES

  • 1. Pittiruti M., Van Boxtel T., Scoppettuolo G., et al. “European recommendations on the proper indication and use of peripheral venous access devices (the ERPIUP consensus): A WoCoVA project”, The Journal of Vascular Access, 2021;0(0). doi:10.1177/11297298211023274
  • 2. Sharp R., Carr P., Childs J., et al., “Catheter to vein ratio and risk of peripherally inserted central catheter (Picc)-associated thrombosis according to diagnostic group: a retrospective cohort study”, BMJ Open, 2021;11(7). doi: 10.1136/bmjopen-2020-045895
  • 3. Art. L. 4011-1 du code de la santé publique.
  • 4. Lurton Y. « Valves bidirectionnelles », p. 131, in Guide pratique des chambres à cathéter implantables, 2e édition, Lamarre, 2019.
  • 5. Guiffant G., Merckx J. et Flaud P. Perfusion : lignes et cathéters. Bien choisir et utiliser les dispositifs, Arnette, 2015.
  • 6. Caparas Jona V., Hu Jian-Ping, “Safe administration of vancomycin through a novel midline catheter: a randomized, prospective clinical trial”, J Vasc Access, 2014;15(4): 251-256. doi : 10.5301/jva.5000220
  • 7. Ryder M. et al., “Investigation of the role of infusate properties related to midline catheter failure in an ovine model”, Am J Health Syst Pharm, 2020 Aug 7;77(16):1336-1346. doi: 10.1093/ajhp/zxaa175
  • 8. Longuet P. et al. “Preparing and administering injectable antibiotics: How to avoid playing God”, Médecine et maladies infectieuses, 2016 Jul;46(5):242-68. doi: 10.1016/j.medmal.2016.01.010
  • 9. Société française d’hygiène hospitalière (SF2H), « Recommandations par consensus formalisé. Bonnes pratiques et gestion des risques associés au Picc (cathéter central à insertion périphérique) », décembre 2013, Hygiènes, Volume XXI - n° 6 - ISSN 1249-0075.
  • 10. Société française d’hygiène hospitalière (SF2H), « Prévention des infections liées aux cathéters périphériques vasculaires et sous-cutanés », mai 2019, Hygiènes, Vol. XXVII n° 2 - ISSN 1249-0075.
  • 11. Olivia Keïta-Perse. FAQ : antisepsie de la peau saine avant un geste invasif chez l’adulte. 11 octobre 2016 V3, bit.ly/3PyU3Zk
  • 12. https://securacath.com
  • 13. D’après l’article R.4311-9 du code de la santé publique : « L’infirmier ou l’infirmière est habilité à accomplir sur prescription médicale écrite, qualitative et quantitative, datée et signée, les actes et soins suivants, à condition qu’un médecin puisse intervenir à tout moment : ablation de cathéters centraux et intrathécaux ».
  • 14. Muller C, Vidal V. « Utilisation de l’occlusion des Picc-lines », J Radiol, 2010; 91: 287-291.
Savoir +

DOIT-ON AJOUTER UNE VALVE BIDIRECTIONNELLE SUR LES PICC-LINES AVEC VALVE BIDIRECTIONNELLE INTÉGRÉE ?

Une valve bidirectionnelle peut être intégrée à l’extrémité distale de ce cathéter (valve de type Groshong, de moins en moins utilisée) ou à l’extrémité proximale (Bard Picc Solo2, Angiodynamics BioFlo). Dans ce cas, la valve, inamovible, aura une durée d’utilisation équivalente à celle du cathéter. Cette valve permet les injections et les prélèvements sanguins (à condition de se renseigner préalablement sur son fonctionnement). Elle ne remplit pas toutes les fonctions d’une valve bidirectionnelle amovible. En effet, la valve se trouve à l’intérieur de la connectique et le pavillon où vient s’emboîter la prise mâle est une surface difficile à désinfecter. Une valve bidirectionnelle efficace comprend une surface de connexion plane, facile à décontaminer. Ainsi est-il logique d’adapter une valve bidirectionnelle sur la connectique d’un Picc-line avec valve intégrée. Jusqu’à preuve du contraire, il n’a pas été démontré que ce montage crée une modification de débit de perfusion significative.

Vigilance

ATTENTION AUX FAUX PICC-LINES !

Pour des raisons diverses (manque de matériel, imprévu peropératoire, sténose veineuse non décelée en amont de la zone de ponction, etc.), il arrive que l’opérateur coupe le Picc-line pour le transformer en Midline. Dans ce cas, au chevet du patient, le seul moyen de connaître le type de cathéter que vous utiliserez est de lire le compte rendu de pose. Généralement, si la longueur du cathéter est comprise entre 16 et 25 cm, c’est un Midline. Le risque majeur est d’injecter un traitement incompatible avec une veine périphérique (pH extrêmes, hyperosmolarité) et de créer une thrombose veineuse.

Des protocoles de coopération : une montée en compétences pour les infirmiers

« Par dérogation, les professionnels de santé (inscrits à l’article L. 4011-1 du code de la santé publique) peuvent s’engager, à leur initiative, dans une démarche de coopération ayant pour objet d’opérer entre eux des transferts d’activités ; d’actes de soins ; ou de réorganiser leur mode d’intervention auprès du patient. » Insertion de Picc-line et ponction échoguidée sont deux actes dérogatoires dont l’apprentissage est réglementé. C’est aussi une magnifique opportunité de développer des compétences et d’optimiser l’organisation de l’offre de soins au sein de son établissement.

Pour tout renseignement, s’adresser à la direction des soins de son établissement(3) et consulter le site du ministère de la Santé et de la Prévoyance qui publie la liste des protocoles de coopération autorisés*.

* bit.ly/3BwIJqI.

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QUEL CATHÉTER UTILISER POUR LES PERFUSIONS DE VANCOMYCINE ?

Bien que certaines recherches aient montré que la Vancomycine pouvait être administrée indifféremment par un Midline ou un Picc-line, une récente étude montre qu’une concentration de 10 mg/ml de médicament est thrombogène lorsqu’elle est administrée par un Midline. Le consensus actuel est qu’une veine périphérique admet une administration de Vancomycine à une concentration de 5 mg/ml (6,7,8). La durée du traitement influe également sur la résistance de la veine. Passé 7 jours, le risque de thrombose est grand. En pratique et en considération de ces contraintes, il semble judicieux d’utiliser systématiquement un Picc-line en cas d’administration de Vancomycine.

LE PANSEMENT DU PICC-LINE ET DU MIDLINE EN PRATIQUE

Il n’existe pas de recette type pour pratiquer ce soin, mais des principes incontournables à adapter selon le contexte, le patient ainsi que le matériel et les antiseptiques utilisés.

1 MATÉRIEL ET MÉDICAMENTS NÉCESSAIRES AUX SOINS

• Friction hydroalcoolique (FHA) ;

• 1 poubelle de soins ;

• 2 masques et 2 charlottes (à adapter pour le patient) ;

• 1 champ stérile à placer sous le bras du patient et 1 champ stérile pour y déposer le matériel stérile ;

• 1 dosette 10 ml de sérum physiologique pour nettoyage cutané (selon protocole recommandé par le fabricant de l’antiseptique) ;

• 1 paire de gants non stériles à usage unique pour retirer le pansement en place ;

• 4 x 5 compresses non tissées 7,5 x 7,5 cm ;

• 2 paires de gants stériles présentation chirurgicale ;

• 1 fixateur sans suture ;

• 1 valve bidirectionnelle par lumière du cathéter ;

• 1 seringue préremplie 10 ml* (stérile intérieur et extérieur) par lumière à rincer ;

• 2 bandelettes adhésives stériles dont la taille est inférieure à la largeur du pansement ;

• 1 pansement transparent semi-perméable stérile (7 x 12 cm au minimum) à bord tissé.

2 DÉROULÉ DU SOIN

Pour ce soin, il est recommandé que l’infirmière porte un masque, une charlotte et une surblouse non stérile en cas de soins à domicile et de précautions de contact (patient neutropénique et/ou infecté). Le patient doit porter un masque.

Après avoir rassemblé le matériel et les produits nécessaires aux soins et une fois que le patient s’est installé en décubitus latéral du côté du Picc-line ou du Midline (photo 6), pratiquer le pansement comme suit :

- notifier la longueur externe du cathéter ;

- FHA ;

- enfiler des gants de protection et retirer le pansement recouvrant le cathéter ;

- FHA ;

- enfiler les gants stériles ;

- retirer le système de fixation sans suture en place ;

- nettoyer la peau avec des compresses stériles et un savon antiseptique type Bétadine Scrub ou Chlorhexidine Scrub (faire mousser) ;

- rincer avec des compresses stériles imprégnées de sérum physiologique ;

- sécher avec des compresses stériles ;

- retirer les gants stériles ;

- FHA ;

- enfiler la 2e paire de gants stériles ;

- désinfecter avec des compresses stériles imprégnées de Chlorhexidine alcoolique à 2 % ou de Bétadine alcoolique si peau non lésée ;

- après avoir attendu le séchage de l’antiseptique, maintenir le cathéter sur la peau du patient à l’aide du fixateur sans suture ;

- recouvrir la zone d’implantation du cathéter avec un pansement stérile transparent (si intolérance cutanée, utiliser un protecteur dermique type Cavilon et/ou un pansement opaque type Mépore) ;

- tracer la longueur externe du cathéter en fin de soin et toute information utile à la prise de relais par vos collègues.

En cas de décollement et/ou de souillure du pansement : le refaire le plus tôt possible.

Si utilisation d’un pansement opaque type Mépore : refaire le pansement tous les 4 jours.

* Le changement de gant stérile à cette étape seulement renforce l’aseptie du soin.

Trucs et astuces pour l’utilisation des fixateurs sans suture

Les bandelettes de protection du socle adhésif des systèmes type Grip-Lock très souvent se chevauchent ; ce qui soulève le cathéter et risque de le mobiliser. Pour éviter cette surprise, il vous suffit de préplier lesdites bandelettes alors que vous êtes gantés stérilement et avant que le cathéter soit dépourvu de toute fixation durant la réfection du pansement (photos 12).

Il arrive également que le dispositif, trop adhérent au cathéter, le piège (photo 13) et qu’il soit impossible de le retirer sans risquer de le mobiliser. Dans ce cas, prévoir à portée de main une solution antiadhésive à appliquer sur le rabat adhésif avec des compresses stériles. Cela peut également être utile quand le pansement transparent semi-perméable adhère sur le socle du Statlock.

Les clips du Statlock se soulèvent en tirant sur leur bord interne inférieur. Utilisé ainsi, ce dispositif se retire très aisément. Chaque capot s’enclenche sur l’ergot en pressant les deux éléments entre le pouce et l’index. Surtout, ne pas essayer de fermer le système en prenant appui sur le bras du patient, support trop mou qui complique le geste. Bien s’assurer après fermeture que les ergots du Midline ou du Picc-line sont passés dans le trou de suture de la connectique.

Vigilance

MOBILISATION ACCIDENTELLE, QUE FAIRE ?

Il convient ici d’informer sans affoler car il est parfois arrivé que le pansement du Midline ou du Picc-line ne soit pas renouvelé de peur de faire une erreur ou de mobiliser accidentellement l’extrémité du cathéter. Attention, car ne pas le renouveler, c’est risquer d’infecter le patient.

En cas de doute sur le déplacement de l’extrémité du Picc-line ou du Midline dans une zone thrombogène à la suite d’une traction accidentelle, ne pas hésiter à en parler à l’équipe médicale qui prescrira une vérification par doppler, radio ou électrocardiogramme (ECG).