L’arrivée d’une infirmière en pratique avancée (IPA) au sein d’un service hospitalier ne s’improvise pas. Plusieurs professionnels de santé ont témoigné de leur bonne intégration lors de la sixième Journée nationale de l’infirmière en pratique avancée (Jnipa), le 10 novembre à Paris.
Dans notre service, nous avons la chance d’avoir deux IPA », a fait savoir Adeline Dunet, infirmière au sein du service de pneumologie au centre hospitalier universitaire (CHU) de Rouen (Seine-Maritime), précisant que l’une des deux avait été infirmière en soins généraux dans le service avant de devenir infirmière en pratique avancée (IPA). Lorsque la première IPA est arrivée, les soignants ne savaient pas exactement quel allait être son rôle. « La relation s’est tout de suite bien instaurée, la confiance aussi, notamment parce que nous avons bénéficié d’une formation avec le Pr Antoine Cuvelier, pneumologue dans le service. Il nous a expliqué la complémentarité du rôle de l’IPA au nôtre pour le suivi des patients. » La prise en charge au sein de ce service étant très technique, « l’arrivée d’une IPA dans cette équipe n’était donc pas facile », reconnaît le Pr Cuvelier. À l’origine, l’équipe médicale ne savait pas nécessairement ce qu’était une IPA. « Mais son apport s’est imposé à tous, reconnaît celui qui en était convaincu. Tous les professionnels de santé ont compris la nécessité de la présence de l’IPA pour offrir une prise en charge holistique aux patients, confrontés à de nombreuses problématiques en lien avec leur maladie. » Et d’ajouter : « La légitimité des IPA s’acquiert par leur exercice clinique. Elles doivent s’enraciner pour ainsi devenir indispensables. »
Face au flou encore ressenti par certains professionnels sur la place et le rôle de l’IPA dans une équipe, il est nécessaire, pour les encadrants, de préparer sa venue en explicitant son rôle. Du côté du CHU de Bordeaux, l’arrivée des IPA s’est effectuée en deux étapes. La première IPA à y exercer était issue de la formation préfiguratrice à la pratique avancée. « Seulement un médecin soutenait ce mode d’exercice à l’époque, l’implantation de l’IPA a donc été difficile car elle a dû prouver sa valeur ajoutée auprès des autres médecins avant d’instaurer son leadership », reconnaît Yvonne Gautier, cadre supérieure de santé au sein du CHU, également responsable des IPA. Depuis lors, l’université de Bordeaux forme des infirmières à la pratique avancée. Le projet est donc désormais plus construit. « Aujourd’hui, lorsqu’une infirmière a un projet pour devenir IPA, nous travaillons d’abord avec l’ensemble de l’équipe médicale sur le besoin », explique Yvonne Gautier. Ensuite, la cadre supérieure de santé élabore avec l’IPA son projet argumenté, la façon dont elle envisage son rôle au sein de l’équipe, toujours en lien avec le chef de service. « Ce projet va être suivi tout au long de sa formation, et dès le master 2, nous construisons son retour dans le service, notamment au cours de son dernier stage, qui lui permet de travailler à la mise en œuvre de son projet avec sa future équipe », fait savoir Yvonne Gautier.
Au CHU d’Angers, la place des IPA n’est plus à démontrer. Elles sont huit à exercer en pédiatrie, neurologie, covid long, sur la base de projets médico-soignants. « Nous avons fait comme toutes les équipes hospitalières, nous avons avancé en marchant, mais avec la volonté que le besoin d’avoir recours à une IPA dans le service vienne toujours des équipes médicales », fait savoir Laurence Laignel, coordinatrice générale des soins. Pour favoriser au mieux l’arrivée des IPA dans l’établissement, elle a commencé par se rendre en commission médicale d’établissement (CME) afin d’expliquer leur rôle aux représentants de la communauté médicale. « Nous avons ensuite lancé des appels à projet, au sein des équipes, afin de les interroger sur la pertinence ou non d’introduire une IPA dans leur service », souligne Laurence Laignel. Et de poursuivre : « La seule difficulté à laquelle nous sommes confrontés est l’absence de création de poste. » Les IPA sont donc nécessairement des IDE souhaitant devenir IPA. Aujourd’hui, au sein de l’établissement, leurs postes ne sont pas financés à 100 % car cela nécessiterait 300 consultations en file active sur un an. Or, explique Laurence Laignel, « comme nous souhaitons qu’elles aient un temps dédié à la formation et à la recherche clinique, ce n’est pas possible ».
Lire l’article « IPA : l’expérimentation de la primo-prescription débute en 2023 », sur espaceinfirmier.fr le 15/11/22.