LES GLIFLOZINES OU INHIBITEURS DU SGLT2
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PHARMACO
Dre en pharmacie, Défimédoc
Les gliflozines, ou inhibiteurs du SGLT2, sont des molécules récentes, commercialisées en France depuis 2020. Elles sont principalement utilisées dans deux pathologies : le diabète de type 2 et l’insuffisance cardiaque.
Deux molécules sont disponibles en France : la dapagliflozine (Forxiga, Xigduo associé à la metformine) et l’empagliflozine (Jardiance 10 mg et Jardiance 25 mg, et Synjardy 5/1000 mg et Synjardy 12,5/1000 mg associés à la metformine) (voir tableau p. 26).
• La dapagliflozine et l’empagliflozine sont indiqués (Autorisation de mise sur le marché ou AMM) dans le diabète de type 2, en complément d’un régime alimentaire et d’un exercice physique.
• La dapagliflozine et l’empagliflozine sont prescrits soit en monothérapie soit en association avec d’autres antidiabétiques, en particulier la metformine et/ou les aGLP1 (dulaglutide).
• Les nouvelles recommandations européennes dans la prise en charge du diabète de type 2 publiées en 2022 placent les inhibiteurs de SGLT2 comme un traitement de première intention dans certains cas (patients diabétiques ayant une insuffisance cardiaque, une insuffisance rénale, ayant des antécédents d’accident vasculaire cérébral - AVC - ou d’infarctus du myocarde - IDM -, ou ayant trois facteurs de risques cardiovasculaires).
• Dans plusieurs essais, les gliflozines (parfois seulement l’une d’entre elles) ont démontré leur efficacité sur la prévention des hospitalisations et la réduction de la mortalité cardiovasculaire chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque (diabétiques ou non).
• Ces résultats ont imposé les gliflozines en traitement de première intention dans l’insuffisance cardiaque.
• Depuis 2021, la dapagliflozine a également une indication dans la maladie rénale chronique.
• Elle est prise en charge depuis octobre 2022 dans cette indication chez certains patients et à condition que la prescription soit établie en concertation avec un spécialiste en néphrologie.
• Les gliflozines sont des inhibiteurs du cotransporteur SGLT2 (iSGLT2).
• Ce cotransporteur SGLT2 est présent uniquement au niveau rénal où il permet la réabsorption de sodium et de glucose : 90 % de la réabsorption rénale du glucose se fait par SGLT2. En cas d’hyperglycémie chez un patient non diabétique, le glucose en excès est excrété dans les urines. En revanche, chez le patient diabétique, l’activité de SGLT2 est accrue, le glucose est réabsorbé, ce qui entretient l’hyperglycémie.
• En inhibant ce cotransporteur, la réabsorption de glucose est diminuée, provoquant une glycosurie (environ 50-70 grammes de glucose par 24 heures) et donc une baisse de la glycémie.
• Ce mécanisme ne provoque pas d’hypoglycémie car il est indépendant de la sécrétion d’insuline.
• Au niveau rénal, la glycosurie favorise la natriurèse et la diurèse osmotique, ce qui contribue à une diminution de la pression intraglomérulaire et à un effet néphroprotecteur, expliquant les autres indications des gliflozines.
• Les gliflozines entraînent notamment :
- une baisse de l’Hba1C de 0,5 % à 0,9 % en moyenne,
- une perte de poids d’environ 2 à 4 kg en moyenne (liée à la perte glucidique),
- une baisse de la pression artérielle (car augmentation de la diurèse et de la natriurèse) d’en moyenne 4,0 mm Hg sur la pression artérielle systolique et de 1,6 mm Hg sur la pression artérielle diastolique,
- un effet uricosurique.
• Les gliflozines n’entraînent pas de troubles de la natrémie ou de la kaliémie.
• La dose recommandée pour les deux gliflozines est de 10 mg par jour en une seule prise, à tout moment de la journée, au cours ou en dehors des repas.
• Les comprimés doivent être avalés entiers avec de l’eau (ne pas écraser).
• Cette dose peut être augmentée à 25 mg/jour pour l’empagliflozine uniquement dans le traitement du diabète de type 2.
• La glycosurie induite par les gliflozines favorise la pullulation microbienne au niveau des urines. De ce fait, l’un des effets indésirables le plus fréquent est la vulvovaginite chez la femme et la balanite chez l’homme (multipliées par 4 environ). Elles surviennent généralement durant les premiers mois de traitement et elles sont la plupart du temps bénignes.
• Les gliflozines entraînent également pollakiurie, polyurie et nycturie.
• Les gliflozines peuvent également entraîner des effets indésirables liés à une déplétion volémique (par augmentation de la diurèse et de la natriurèse) : risque de déshydratation (pouvant conduire à une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle) et risque d’hypotension.
• L’ANSM a attiré l’attention fin 2020 sur deux effets indésirables rares mais graves des gliflozines :
- la fasciite nécrosante périnéale (ou gangrène de Fournier). Douleur intense, sensibilité au toucher, érythème ou gonflement de la région génitale ou périnéale, s’accompagnant de fièvre ou de malaise nécessitent une consultation médicale immédiate,
- le risque d’acidocétose : il serait doublé chez les patients sous iSGLT2 par rapport au placebo. Les symptômes sont : nausées, vomissements, anorexie, douleurs abdominales, soif intense, difficulté à respirer, confusion, fatigue inhabituelle ou somnolence. Le traitement par inhibiteurs du SGLT2 doit être immédiatement arrêté en attendant un avis médical.
• L’association avec d’autres médicaments pouvant provoquer une insuffisance rénale aiguë (par hypovolémie) est à considérer : diurétiques, AINS, IEC, ARA2.
• L’association avec d’autres médicaments provoquant des infections urinaires, comme les immunosuppresseurs, majore ce risque.
• L’efficacité des gliflozines sur la glycémie dépend de la fonction rénale. En cas d’insuffisance rénale modérée (DFG < 45 mL/min), l’efficacité est réduite. Chez les patients avec insuffisance rénale sévère, l’efficacité pourrait être nulle.
• L’ajustement des doses de metformine en fonction du degré d’insuffisance rénale, dans les associations, doit être prise en compte.
• Aucune adaptation n’est nécessaire en cas d’insuffisance hépatique.
• En l’absence de données chez la femme enceinte, l’utilisation des gliflozines n’est pas recommandée au cours de la grossesse (des études animales ont montré une toxicité de la dapagliflozine pour le rein en développement et des effets indésirables de l’empagliflozine sur le développement postnatal).
• De même, il n’y pas de données pour la femme allaitante : l’utilisation des gliflozines n’est donc pas recommandée.
1. Haute Autorité de santé (HAS) Médicaments du diabète de type 2 : la HAS actualise son évaluation des gliflozines. Mis en ligne le 16 déc. 2020, consultable via ce lien : bit.ly/3Je2hVd.
2. Darmon P., Bauduceau B., Bordier L., Bringer J., Chabrier G., Charbonnel B. et al. pour la Société francophone du diabète, « Prise de position de la Société francophone du diabète (SFD) : évaluation du rapport bénéfices-risques des inhibiteurs de SGLT2 », Médecine des maladies Métaboliques, 2019 Mar;13(2):195-209. pdf téléhargable sur : bit.ly/3ST3zYL.
3. Davies M. J., Aroda V.R., Collins B.S., Gabbay R. A., Green J., Maruthur N.M. et al., Management of Hyperglycemia in Type 2 Diabetes, 2022. A Consensus Report by the American Diabetes Association (ADA) and the European Association for the Study of Diabetes (EASD). Diabetes Care, 1 November 2022;45(11):2753-86.
4. Sur le site de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), à propos des risques médicamenteux (mis à jour le 07/04/2021) : « Gliflozines (dapagliflozine et empagliflozine) : prévenir les risques d’acidocétose diabétique et de gangrène de Fournier (fasciite nécrosante périnéale) », consultable via le lien : bit.ly/3YqKkHo.
5. Omédit Pays de la Loire, fiche pdf sur les antidiabétiques et l’insuffisance rénale, téléchargeable via le lien : bit.ly/3msKYXs.
L’autrice déclare ne pas avoir de liens d’intérêt
Une troisième gliflozine, la canagliflozine, bénéficie d’un avis favorable de la Haute Autorité de santé (HAS) pour l’accès au remboursement. Elle n’est pas commercialisée à ce jour faute d’accord pour définir le prix de remboursement avec le Comité économique des produits de santé (CEPS).
Dans le diabète de type 2, pour les spécialités Xigduo et Synjardy, en raison de la présence de metformine, la posologie est répartie en un comprimé deux fois par jour, à prendre au cours des repas pour diminuer les effets indésirables gastro-intestinaux associés à la metformine.