Qu’il s’agisse de pièces de théâtre ou de conférences TEDx, ces formats permettent d’aborder les problématiques de la douleur avec le public.
Au CHU d’Angers, le Comité de lutte contre la douleur (Clud) cherchait une idée nouvelle pour communiquer avec les patients en dehors des murs de l’hôpital, quand sa présidente, la Dre Catherine Chapotte, échange lors d’un congrès avec l’ONG Douleurs sans frontières. Elle apprend que l’association a coécrit une pièce, intitulée Aïe, plus jamais ça ! avec Tenfor, une compagnie de théâtre lyonnaise spécialisée, depuis 1990, dans les spectacles sur des thèmes de société faisant interagir le public.
Séduite par l’idée, l’équipe angevine organise une représentation, début décembre 2023, qui fait salle comble, à la maison de quartier, située à côté de l’hôpital. « Il y a trois acteurs sur scène, le propos est très intelligent et très sympa, raconte Xavier Verger, infirmier anesthésiste (Iade) au CHU. Au début, on voit deux personnages qui essayent de communiquer dans une situation de la vie quotidienne, mais qui n’y arrivent pas. Le public est invité à faire des suggestions pour améliorer l’échange. » Parmi la centaine de spectateurs, l’un monte sur scène et donne des indications de postures et d’attitudes aux comédiens. Ces derniers jouent ensuite le mythe grec de Thésée, fatigué après avoir terrassé le Minotaure. De temps en temps, les acteurs s’arrêtent pour prendre, encore une fois, le public à témoin. « On sentait qu’il y avait des histoires de vie en lien avec la douleur chronique quand des spectateurs prenaient la parole, décrit l’Iade. Ils arrivaient à mettre en exergue toutes les dimensions (de la douleur, NDRL). »
La représentation gratuite, grâce au soutien de la fondation Apicil et de Douleurs sans frontières, a été suivie d’un moment de convivialité entre la troupe et le public. « J’ai trouvé que c’était très intéressant parce que ce qui en est ressorti c’est toute la complexité du processus d’acceptation de la douleur, avant d’être soulagée par les traitements et d’atteindre un état satisfaisant, ajoute Xavier Verger. Donc, cela parle également de l’attitude adaptée que nous avons à tenir en tant que soignant, notamment pour trouver des solutions afin de limiter les répercussions sociales de la douleur. »
Autre moyen d’aller à la rencontre du public : les paintalks, des conférences au format TEDx inventées au Canada, qui ont eu lieu pour la deuxième année consécutive en marge du congrès de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), en novembre dernier. « L’objectif est de vulgariser le discours scientifique, en cinq minutes environ, afin qu’il soit accessible à tout le monde, de l’étudiant infirmier jusqu’au patient douloureux », résume Simon Rochat, ancien infirmier référent douleur au CHR de Metz, qui travaille aujourd’hui au Luxembourg. Il s’est essayé à l’exercice avec un talk intitulé « Comprendre la douleur de son patient : un truc de ouf ». Debout, sans note ni pupitre, les conférenciers s’expriment avec une micro-oreillette, dans une apparence d’improvisation. « Ça m’a énormément stressé mais je suis très content de l’avoir fait, avoue-t-il. Le message hyperimportant à transmettre est que l’évaluation de la douleur ne peut pas se résumer à une simple échelle. Il faut connaître l’histoire du patient pour comprendre ce qu’elle représente pour lui et, en tant qu’infirmier, nous avons un rôle particulier à jouer. »
Faire passer ces notions complexes en un temps aussi court exige une longue préparation avec un coach. « C’est beaucoup de travail, note Simon Rochat. Chacun choisit un thème, les textes ne sont pas écrits à l’avance mais il faut mémoriser les idées clés. »
Anaelle Davy, infirmière ressource douleur au CHU de Rennes, était déjà intervenue dans des congrès, en sortant parfois du cadre classique de la présentation derrière un pupitre. Elle s’est portée naturellement candidate à la proposition de la SFETD. « Le formateur canadien nous avait fait remplir une grille de réflexion de notre présentation et nous avons eu des réunions mensuelles de travail avec lui en visio, raconte-t-elle. L’objectif de ce type de format, c’est vraiment de convaincre. J’ai beaucoup répété ma présentation et je me suis filmée plusieurs fois. C’est tout sauf de l’impro ! » Les sept paintalks présentés lors du congrès de la SFETD sont visibles sur sa chaîne Youtube(1).
Reconnue d’utilité publique depuis mars 2004, la Fondation Apicil a pour objet la lutte contre la douleur physique et psychique, à tous les âges de la vie. Pour cela, elle mène différentes actions. Elle agit en finançant des projets de recherche, en accompagnant des soignants, en sensibilisant et en informant. Elle est dotée d’un conseil d’administration et d’un conseil scientifique, garants du sérieux et de la qualité des actions entreprises. C’est dans ce cadre que la Fondation Apicil a contribué aux manifestations destinées à mieux faire connaître la douleur au grand public, en collaboration avec les professionnels de santé et experts dans le domaine. fondation-apicil.org