L'infirmière n° 045 du 01/06/2024

 

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STATUT

Adrien Renaud  

Les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), qui demandent leur régularisation depuis des années, ont décidé de faire monter la pression : après une journée de mobilisation le 25 avril, ils veulent déposer un préavis de grève pendant les Jeux olympiques.

Les années passent et les Padhue sont toujours dans l’impasse. » Le désespoir des médecins à diplôme étranger se lisait sur les pancartes qu’ils ont brandies devant le ministère de la Santé, le 25 avril dernier, lors d’une mobilisation visant à demander leur régularisation. Il faut dire que ces praticiens – au statut précaire et aux salaires largement inférieurs à ceux de leurs confrères français – sont dans bien des établissements ceux qui font tourner les services. Un manque de reconnaissance qui n’a que trop duré, et ils ont décidé de le faire savoir.

Leurs revendications se résument d’ailleurs en peu de mots. « Nous demandons des autorisations d’exercice pérennes, au lieu des autorisations provisoires que nous devons renouveler chaque année, détaille le Dr Abdelhalim Bensaïdi, diabétologue et vice-président de l’association Intégration praticiens à diplôme étranger engagés contre la crise (Ipadecc). Actuellement, on ne nous considère pas comme de vrais médecins : nous ne pouvons pas nous inscrire à l’Ordre, les salaires ne suivent pas, etc. » Au cours des derniers mois, l’exécutif avait affiché sa volonté de prêter une oreille attentive à la situation des Padhue, sans les convaincre pour autant. « Nous procéderons à la régularisation des médecins étrangers sur notre territoire », avait par exemple indiqué le Premier ministre Gabriel Attal dans son discours de politique générale au mois de janvier. Quelques jours plus tôt, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités Catherine Vautrin avait annoncé dans un communiqué qu’elle entendait faire un geste à destination de ceux qui n’avaient pas été reçus aux épreuves de vérification des connaissances (EVC), l’examen visant à évaluer le niveau des médecins souhaitant exercer en France. Ceux-ci « ne seront pas laissés sans solution : le gouvernement les autorisera à continuer de travailler durant les mois à venir », avaitelle annoncé.

Compétition faussée

Ces EVC sont justement l’une des principales sources d’agacement pour les Padhue. Ils se considèrent désavantagés depuis longtemps dans un système où ils sont mis en compétition avec des médecins n’exerçant pas encore en France et disposant donc de beaucoup plus de temps pour se préparer. En outre, le nombre de postes ouverts au recrutement est largement insuffisant, selon eux, et ils ne sauraient se satisfaire de la prolongation provisoire octroyée aux recalés de cette année. « On nous a promis une réforme de ce concours pour 2025, mais c’est trop loin, pourquoi ne pas le faire tout de suite ? », s’emporte Abdelhalim Bensaïdi.

Pour lui, le sort réservé aux Padhue, dont il estime les effectifs à environ 2 000 sur l’ensemble du territoire, ne peut trouver qu’une explication : les économies budgétaires. « Notre seul tort est de travailler bien pour pas cher », ironise-t-il. Car si la sécurité des patients était vraiment en jeu, comme le laisse entendre la limitation imposée par le concours, « pourquoi nos chefs de service nous garderaient-ils d’année en année ? », demande le diabétologue. Cette situation pousse son organisation à déposer un préavis de grève « pour la période des JO », ajoute-t-il. Décidément, cette dernière risque d’être à risque sur le plan sanitaire.