Un rapport d’analyse des événements indésirables graves associés aux soins en lien avec les services d’urgences a été publié par la Haute Autorité de santé. S’il ne relève rien de particulier concernant les urgences, il identifie des risques déjà connus d’autres services et dresse quelques préconisations pour une meilleure prise en charge.
Les services d’urgences ont bien souvent fait la Une de l’actualité, pointés du doigt pour des événements indésirables graves (EIGS) ayant conduit au décès du patient. Si l’on regarde dans le détail, il n’existe pourtant pas, à proprement parler, d’indicateurs « permettant d’évaluer l’impact des tensions existantes dans les services des urgences sur la sécurité des patients ou, à l’inverse, d’objectiver l’existence de tensions à partir de données de sécurité telles que les EIGS », indique la Haute Autorité de santé (HAS), notamment du fait que ces derniers sont largement sous-déclarés, encore plus dans les services d’urgences. C’est pourtant sur ces événements survenus aux urgences que la HAS s’est penchée sur une période allant du 1er janvier 2022 au 31 mars 2023. En un peu plus d’un an, 269 déclarations d’EIGS ont été faites aux urgences, dont 195 retenues pour l’analyse. Il en ressort que ceux-ci concernaient principalement des adultes de plus de 20 ans, dont 30 % ont entre 60 et 80 ans et 26 % entre 80 et 100 ans, survenant à 44 % la nuit, 24% le week-end ou 14 % lors des changements d’équipes, confirmant les points de vulnérabilité de l’organisation des soins. Dans 68 % des cas (133 patients), ces EIGS ont conduit au décès du patient, dont 13 en salle d’attente. S’ils ont été jugés comme évitables dans 63 % des cas, ils ont largement été documentés par l’équipe soignante pour en identifier la cause : parmi les trois causes immédiates les plus déclarées figurent les erreurs liées aux soins ou à l’organisation des soins, celles en lien avec la clinique et le diagnostic, ainsi que les actions du patient contre lui-même (suicides, tentatives de suicide, sorties à l’insu du service). Une analyse des causes plus profondes montre l’impact de la santé du patient (82 % des cas), mais aussi les facteurs liés à l’environnement de travail (comme la charge de travail) ou les équipements et fournitures.
Ces données « éclairent sur les circonstances des accidents déclarés et permettent ainsi d’orienter les actions pour améliorer la sécurité du patient », explique la HAS qui formule pour l’occasion quelques préconisations sous forme de rappel. Il s’agit notamment de fluidifier le parcours de soins des patients avant, pendant et après leur prise en charge : pour la gestion des lits d’aval, les actions proposées visent par exemple à faciliter les admissions directes en service hospitalier en lien avec la médecine de ville (cas des personnes âgées), ou à améliorer l’organisation et le fonctionnement des urgences à l’aide d’outils fournis par l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap) ou la Fédération des observatoires régionaux des urgences. La HAS préconise également de mieux former les professionnels aux compétences non techniques, comme le travail en équipe, qui fluidifie la prise en charge. Cet item rejoint celui du partage des informations, qui doit aussi être renforcé, à tout niveau, pour que chaque professionnel soit informé en temps réel du statut du patient. La HAS rappelle également l’indispensable sensibilisation aux risques d’erreurs de diagnostic et iatrogènes et ceux liés à l’utilisation de dispositifs médicaux. Elle met par ailleurs l’accent sur les actions de prévention face aux patients à risques pour eux-mêmes (risque suicidaire ou sortie du service d’urgence), qui constitue, selon la HAS, un danger évitable, contrairement aux croyances établies. Enfin, elle insiste sur l’indispensable engagement de la gouvernance des établissements de santé et des chefs de service dans l’amélioration de la prise en charge, que ce soit aux urgences ou dans d’autres services.