L'infirmière n° 049 du 01/10/2024

 

DOSSIER

MSA : FORMATION

Pr Jean-Marc Soulat*   Dr Dominique Semeraro**  


*médecin national de la Caisse centrale de la MSA et président de l’INMA.
**médecin du travail et conseiller technique national à la Caisse centrale de la MSA.

La MSA dispose de sa propre école de formation, l’Institut national de médecine agricole situé à Tours (Indre-et-Loire), à destination des infirmières de santé au travail. Le point avec son président, le Pr Jean-Marc Soulat, également médecin national de la Caisse centrale de la MSA (CCMSA), et le Dr Dominique Semeraro, médecin du travail et conseiller technique national à la CCMSA.

Dans quel contexte l’Institut national de médecine agricole (INMA) a-t-il été créé ?

Pr Soulat : L’école a été créée en 1958, en lien avec la faculté de médecine de Tours. À l’origine, l’objectif était de proposer des compétences aux médecins de toutes les disciplines médicales, sur le secteur rural et agricole. Cependant, avec les exigences du Code rural et de la pêche maritime, qui régit notre régime, l’Institut est devenu le lieu de formation des médecins du travail en milieu agricole. Cette formation leur permet d’exercer uniquement dans notre secteur. En revanche, un médecin du travail formé à la santé et à la sécurité au travail « généraliste » peut tout à fait exercer dans le milieu agricole. Depuis 2020, l’INMA a distendu ses liens avec la faculté de médecine de Tours en raison d’une rigidification des règles universitaires.

À quel moment les formations pour les infirmières de santé au travail (IDEST) ont-elles été introduites au sein de l’INMA ?

Pr Soulat : En 2012, la réforme de la médecine du travail a attribué aux IDEST un rôle encore plus important au sein des services de santé au travail. Le Code du travail précise d’ailleurs, depuis 2012, qu’elles doivent suivre une formation de 100 heures, mais sans apporter davantage de précision. Dans les années 1990, des diplômes interuniversitaires de santé au travail ont été créés principalement pour les infirmiers exerçant au sein des services autonomes de santé au travail. Pour proposer une formation adaptée au secteur agricole, l’INMA a créé un diplôme universitaire de santé au travail (DUST) en partenariat avec l’université de Toulouse, à laquelle je suis rattaché. Ainsi, depuis 2016, les promotions d’IDEST formées à l’INMA sont titulaires d’un DUST spécialisé dans le secteur agricole. Cependant, actuellement, si des infirmières intégrant la MSA sont titulaires d’un DU d’une autre université, à jour des nouvelles compétences liées à la réforme de la santé au travail d’août 2021, elles n’ont pas besoin de suivre notre DUST. Ce qui nous importe, c’est l’homogénéisation des formations suivies par nos IDEST, car le médecin doit avoir confiance dans leur niveau de compétences pour accepter de leur déléguer des missions. Nous formons chaque année entre 25 et 30 IDEST au DUST. Leur place va prendre de l’importance car le nombre de médecins va continuer à diminuer dans les années à venir, alors même que nous devons remplir nos obligations vis-à-vis des salariés. D’où l’importance de la qualité de la formation.

Les enseignements du DUST sont donc à présent adaptés à la réforme de 2021…

Pr Soulat : La loi sur la réforme de la santé au travail du 2 août 2021 prévoit, compte tenu de la problématique de la démographie médicale, de déléguer un certain nombre de missions des médecins du travail aux IDEST. Depuis cette date, une formation spécifique des IDEST est prévue par le Code du travail et applicable au secteur agricole. Un décret est paru le 27 décembre 2022 imposant, dans les trois ans qui suivent, que toutes les IDEST soient formées selon les critères de ce décret, précisé par un arrêté de janvier 2023. Des compétences complémentaires ont donc été ajoutées afin que les IDEST puissent assurer des délégations de missions protocolisées avec les médecins. Elles concernent les visites de préreprise, les visites de reprise, les visites de mi-carrière, les visites à la demande, et les bilans à 50 ans. L’INMA s’est donc mis en ordre de marche pour assurer cette formation en ajoutant ces particularités dans le DUST. Les IDEST déjà en poste bénéficient d’une formation continue, pour être mises à jour de leurs nouvelles compétences.

Dr Semeraro : Nous avons en effet proposé une formation complémentaire en distanciel sur ces nouvelles compétences à toutes les IDEST déjà en poste au sein de la MSA.

Qu’en est-il de la formation continue ?

Dr Semeraro : Généralement, après environ deux ans d’exercice au sein de la MSA, les IDEST accèdent à une formation de professionnalisation sur les pratiques et les filières agricoles. Cette formation d’un an se déroule en plusieurs sessions, sur 10 à 15 jours cumulés. Les infirmières et les médecins partagent des modules en commun, leur permettant d’échanger sur les pratiques et participant à la construction de la confiance entre les deux professions. Cette formation de professionnalisation est inscrite dans le Code rural et de la pêche maritime.

Pr Soulat : Les IDEST peuvent aussi accéder à d’autres formations continues, optionnelles, en fonction de l’arbitrage de leurs caisses locales. L’INMA propose pour sa part un large panel de formations continues : l’utilisation du logiciel médical spécifique à la MSA, les particularités de l’exercice en milieu agricole (problèmes liés aux produits phytosanitaires, au risque biologique), les problématiques ergonomiques liées aux contraintes de l’appareil locomoteur, les risques psychosociaux. Cependant, les IDEST peuvent aussi aspirer à d’autres types de formations continues, que nous ne dispensons pas nécessairement au sein de l’INMA. Elles peuvent alors se tourner vers d’autres organismes de formation pour les suivre, dès lors que leur caisse locale l’accepte.

Retours terrains

En arrivant à la MSA, avant d’exercer sur le terrain, les IDEST doivent avoir suivi une formation. Si Pauline Portal et Véronique Maillard étaient déjà titulaires d’un DU de santé-sécurité au travail, Tiphaine Mennier et Cécile Russeil ont suivi le DUST de l’INMA, en parallèle de leur pratique. Avant d’exercer en autonomie, elles ont également bénéficié d’un compagnonnage en travaillant en binôme, en moyenne pendant trois semaines. « Je continue à apprendre aux côtés de mes collègues lorsque je ne maîtrise pas certains domaines », souligne Pauline Portal, précisant suivre prochainement un collègue qui organise une AMT au sein de la filière équine.

En parallèle, elle n’hésite pas à s’inscrire à des formations continues, sur des thématiques pour lesquelles elle ne se sent pas toujours à l’aise, par exemple pour l’organisation d’actions en milieu de travail ou l’élaboration des fiches entreprises. L’année dernière, elle a aussi suivi une formation sur les troubles musculosquelettiques (TMS). « Je demande chaque année à suivre une formation, par exemple sur les TMS ou sur la prévention du harcèlement en milieu agricole », fait savoir Véronique Maillard. « La MSA nous apporte de nombreux outils informatiques nous donnant la possibilité d’échanger en réseau, complète Cécile Russeil.

Un médecin du travail est toujours joignable sur les horaires de consultation IDEST. »