L'infirmière n° 050 du 01/11/2024

 

ACTUALITÉS

FEMME DE SANTÉ

Laure Martin  

Nommée Femme de Santé en 2022, la Dre Frédérique Forestier, chirurgienne sénologue au Centre de lutte contre le cancer (CLCC) Henri Becquerel (Rouen), a mis en place le Dispositif infirmier d’accompagnement et de suivi post-ambulatoire à domicile (Diaspad), en sénologie. En quoi consiste-t-il ?

Dans quel contexte avez-vous été nommée Femme de Santé ?

Dr Frédérique Forestier : Le collectif Femmes de Santé est arrivé dans ma vie par l’intermédiaire du dispositif de l’Expérience Patient du Centre Henri Becquerel, dont les membres ont proposé mon nom pour une nomination. Je ne le connaissais pas auparavant et depuis, j’y ai rencontré des personnes formidables. Je suis chirurgienne viscérale de formation. Pendant mes études, nous n’étions que 4 % de femmes chirurgiennes. J’ai donc traversé des moments compliqués et j’ai dû faire mes preuves. Être une femme dans le domaine de la santé, ce n’est pas rien, surtout face au sexisme qui sévit à l’hôpital. De nombreuses femmes impulsent actuellement des dynamiques extraordinaires et méritent de les faire connaître. C’est possible avec le collectif, au sein duquel il n’y a pas de hiérarchie entre les membres. Je ne le sollicite pas régulièrement, mais nous savons toutes que si un besoin est exprimé par l’une de nous, nous allons y répondre.

En quoi consiste le projet Diaspad ?

F. F. : En 2015, l’Institut national du cancer (INCa) a lancé un appel à projets sur les prises en charge innovantes en cancérologie. À l’époque, notre CLCC était loin d’être pionnier en chirurgie ambulatoire - nous avons ouvert notre unité en 2012. Cependant, notre activité s’est vite développée avec, en sénologie, 40 % de patients pris en charge, dont plus de 90 % d’entre eux satisfaits. Pour autant, nous avions le sentiment d’être confrontés à un plafond de verre car nous ne parvenions plus à augmenter le nombre de prises en charge. Avec cet appel à projets, nous avons voulu monter un dispositif pour effectuer des mammectomies en ambulatoire en collaboration avec les infirmières libérales (Idel) pour un suivi infirmier le soir de l’intervention et, a minima, les trois jours suivants. Pour le mettre en place, il nous fallait un poste supplémentaire d’infirmière coordinatrice gérant le dispositif. Le Diaspad, opérationnel depuis 2017, nous permet à présent de prendre en charge 90 % de la chirurgie mammaire en ambulatoire, pour des traitements radicaux ou conservateurs, sur des patientes jeunes comme âgées. D’un point de vue médical, l’avantage de l’ambulatoire n’est plus à prouver. Mais au lancement du projet, nous avons dû affronter deux obstacles : celui des patients, habitués à rester hospitalisés après une intervention, et celui des professionnels de santé, affichant une forme d’autocensure médicale. Désormais, tous sont convaincus.

Comment s’est organisée la mobilisation des Idel ?

F. F. : Nous avons monté le dispositif en sollicitant l’union régionale des professionnels de santé (URPS) infirmiers. Nous avons organisé des réunions de formation dans quatre villes (Le Havre, Évreux, Dieppe et Rouen) pour nous présenter et expliquer aux Idel les bases de la chirurgie sénologique, les signes d’alerte et leur rôle. Plus de 500 d’entre elles sont à présent formées.

Dans le cadre des mammectomies, nous n’avons pas souhaité déléguer la réalisation du premier pansement aux Idel pour une question de temps. En revanche, elles sont chargées de la surveillance de la douleur, de la thymie, des pansements et de la gestion du drain de Redon.

Nous avons également créé un passeport contenant un volet pour les patients avec des fiches d’information en relation avec l’intervention et les numéros d’appel, et un autre pour les Idel avec un mémento sur les conduites à tenir, des fiches de liaison et de surveillance, ainsi que les feuilles de déclaration des événements indésirables. Dès l’origine du projet, les Idel ont été très enthousiastes car auparavant, la prise en charge en ville n’était pas organisée dans ce domaine. Nous avons pu la cadrer avec le Diaspad.

À propos du collectif Femmes de Santé

Femmes de Santé, premier collectif pluriprofessionnel de femmes et d’hommes dans la santé, a pour missions de contribuer, par l’intelligence collective, pluridisciplinaire et la sororité, à la coconstruction d’une santé durable, équitable et égalitaire et de mettre en lumière l'expertise et les initiatives des Femmes de Santé. Il regroupe plus de 2 700 femmes représentant tous les métiers du secteur de la santé. Ce collectif est une initiative portée et financée par la start-up hkind. N’hésitez pas à rejoindre le collectif et à participer aux nombreuses actions menées ! Pour cela, rendez-vous sur www.femmesdesante.fr