Refus d’inscription à l’Ordre pour défaut de moralité
CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE DE L’ORDRE INFIRMIER
PRÉSERVATION DES VALEURS
Le conseil interdépartemental de l’Ordre des infirmiers (CIDOI) de l’Eure et de la Seine-Maritime a refusé, fin septembre, à un infirmier accusé de viol et déjà préalablement condamné pour violences conjugales, son inscription au tableau de l’Ordre. Karim Mameri, président du CIDOI, nous explique cette décision.
Karim Mameri : Cet infirmier, qui exerçait à l’origine dans un autre département, est venu s’installer dans l’Eure à la suite d’une interdiction de résider dans le même département que son ex-compagne. Pour souscrire à un contrat de remplacement au sein d’un cabinet libéral, il a demandé au conseil interdépartemental de l’Ordre des infirmiers (CIDOI) son inscription au tableau de l’Ordre. Dans le cadre de l’examen du dossier et de son travail de contrôle, le CIDOI a obtenu les informations concernant ses précédentes condamnations et l’instruction en cours. Dans une démarche d’instruction de dossier, le conseil de l’Ordre doit toujours s’assurer de quatre principes concernant les infirmiers demandant une inscription au tableau : leurs compétences ; leur moralité compatible avec l’exercice de la profession ; leur indépendance professionnelle ; et leur état de santé, qui doit, lui aussi, être compatible avec l’exercice de la profession. Ces éléments sont essentiels puisque les infirmiers sont amenés à prendre en charge des personnes vulnérables. Dès lors que l’un de ces quatre principes est mis en doute, le rapporteur en charge de l’examen du dossier peut demander que l’infirmier soit reçu en conseil devant l’ensemble des élus afin qu’il s’explique sur les éléments portés à notre connaissance. Dans le cas présent, l’échange avec cet infirmier ne nous a pas convaincus.
K. M. : Cette décision a été débattue entre les élus et a fait l’objet d’un vote. Elle a été prise avec gravité, mais sans réelle difficulté, sur la base d’un défaut de moralité. Certes, concernant les poursuites judiciaires en cours, cet infirmier reste présumé innocent jusqu’à ce que la décision de justice soit prise. Néanmoins, au regard de l’affaire, des signalements complémentaires concernant les faits de violences conjugales sur deux autres personnes, et sur la base de l’échange confraternel que nous avons eu avec lui, nous avons estimé que le principe de moralité imposé par le Code de la santé publique n’était pas respecté.
K. M. : Lorsque nous refusons son inscription au tableau de l’Ordre, l’infirmier ne peut plus exercer, ni dans notre département, ni ailleurs. Il peut faire appel de la décision, dans un délai d’un mois, mais le droit d’exercer s’arrête jusqu’à ce que son appel soit statué par le conseil régional de l’Ordre des infirmiers. Nous sommes conscients des enjeux humains de ce type de décisions, qui restent toutefois rares. Pour autant, il est de notre devoir de veiller à ce que la profession d’infirmier soit défendue. Le rôle de l’Ordre n’est pas de juger mais de s’assurer que les valeurs fondamentales de notre profession sont respectées et que les professionnels inscrits à l’Ordre sont dignes de confiance. Les infirmiers incarnent un symbole de soin et de protection des plus fragiles. Il est fondamental que l’honneur de notre profession soit préservé.