L'infirmière n° 053 du 01/02/2025

 

ACTUALITÉS

INSTANCE DE REPRÉSENTATION

Laure Martin  

Depuis 2019, les infirmières disposent d’un Conseil national professionnel (CNP) infirmier. Quels sont son rôle et sa sphère d’intervention ? Le point avec Évelyne Malaquin-Pavan, sa présidente.

Qu’est-ce que le CNP infirmier ?

Le CNP infirmier est constitué d’organisations infirmières nationales (sociétés savantes, associations, syndicats, etc.) représentant les différents modes d’exercice non spécialisés de la profession infirmière. Il a été créé fin 2019 à l’initiative des infirmières suite au décret1 s’y rapportant.

Cette instance régulée ayant des missions de service public émet des avis techniques et scientifiques en lien avec la profession dans l’objectif d’améliorer la qualité et la sécurité des soins, les processus de prise en soins et les compétences des professionnels. Le CNPI rend des avis consultatifs à la suite de saisines des tutelles (Direction générale de l’offre de soins [DGOS], Direction générale de la santé, Assurance maladie, Haute Autorité de santé [HAS], Cour des comptes, etc.). Il peut aussi s’autosaisir afin de rédiger des contributions sur des thématiques qui lui semblent prioritaires.

Quelles sont, justement, les thématiques sur lesquelles vous travaillez ?

L’étendue des missions du Conseil national professionnel infirmier (CNPI) est vaste, et toutes sont précisées au sein du décret de 2019. Nous apportons une contribution, notamment en proposant des infirmières généralistes susceptibles d’être désignées en tant qu’expertes dans les domaines scientifiques et opérationnels liés à l’organisation, à la formation et à l’exercice de la profession. Nous en proposons souvent pour un groupe de travail avec la HAS, par exemple, pour le parcours du patient douloureux chronique, le don d’organes, les troubles psychiques, la télésurveillance, etc.

Le CNPI contribue aussi à l’analyse et à l’accompagnement de l’évolution du métier d’infirmière généraliste et de ses compétences à travers la définition de référentiels métier, de parcours professionnalisants et de recommandations professionnelles. La DGOS a notamment demandé au CNPI de constituer le groupe technique pour travailler sur les contenus du référentiel Activités et Compétences (RAC) de juin 2023 à février 2024 dans le cadre de la réforme en cours. Nous avons également participé à la réflexion autour de la possibilité, pour les infirmières, de rédiger des certificats de décès et pour la mise en place des rendez-vous de prévention aux quatre âges de la vie.

L’association participe à la mise en place et à la création de registres épidémiologiques pour la surveillance d’événements de santé et de registres professionnels d’observation des pratiques. Dans le cadre d’autosaisines à la HAS visant à évaluer le service rendu des actes et prestations, nous avons par exemple demandé la révision autour de l’usage de la sonde urinaire.

Le CNPI formule des avis sur les coopérations interprofessionnelles allant de l’idée initiale à la formulation du protocole. C’est le cas, par exemple, pour l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) Expertise infirmière en soins palliatifs ou pour des avis sur les résultats de protocoles article 51.

Les avis portent également sur le développement professionnel initial et continu, les parcours professionnalisants dont universitaires, la recherche en sciences infirmières (proposition d’orientations pluriannuelles prioritaires pour le développement professionnel continu). Comme tout CNP, le CNPI élabore le référentiel de certification périodique pour les infirmières en soins généraux et contribue aux modalités de suivi et d’accompagnement des professionnels de santé infirmiers. Pour une grande partie de nos productions, nous travaillons en étroite collaboration avec les quatre autres CNP de la profession - infirmières généralistes, infirmières anesthésistes (Iade), infirmières de bloc opératoire (Ibode) et infirmières puéricultrices (IPDE) -, ainsi que ceux des autres professions de santé.

Dans quel contexte le CNPI a-t-il été créé ?

À l’origine, les CNP étaient réservés aux médecins, chirurgiens-dentistes et pharmaciens. Les paramédicaux ont eu la possibilité d’en créer à la suite de la parution du décret de 2019. Auparavant, la profession infirmière s’était structurée de manière plus informelle autour d’associations, d’organisations, de sociétés savantes ou encore de syndicats, afin de porter la voix des infirmières auprès des instances lorsque cela s’y prêtait. La création de l’Ordre infirmier a été un plus. Nous sommes montés progressivement en charge dans la structuration de notre profession sur les aspects techniques, scientifiques et régaliens, en lien avec les conditions de travail et les carrières des infirmières. Mais ce n’était pas toujours simple, pour la profession, de repérer les champs d’expertise de chaque entité. Dans les années 2000, plusieurs de nos organisations ont décidé de créer le Collège infirmier français (CIF), qui réunit les organisations des infirmières de soins généraux et des trois spécialités (Iade, Ibode et IPDE). Sa mission était d’être l’interlocuteur des instances. Aujourd’hui, le CIF existe toujours mais il a passé le relais de ce rôle d’interlocuteur depuis que nous avons créé le CNP. Au sein du CIF, nous nous sommes questionnés sur l’opportunité de créer un CNP commun ou quatre CNP distincts (infirmières généralistes et les trois spécialités). Nous avons finalement décidé d’en créer un par diplôme afin d’asseoir notre fonctionnement, pour tendre, d’ici quelques années, vers la constitution d’une structure fédérative. Un cinquième CNP a été créé l’année suivante pour les infirmières en pratique avancée (IPA).

Comment le CNPI a-t-il été mis en place ?

Un CNP est composé, a minima, de deux organisations nationales, à savoir une association loi 1901, une société savante ou encore un syndicat. Il regroupe donc des entités ayant des périmètres d’activités variés. Pour être éligibles, ces structures ne peuvent faire, en parallèle, de la formation, en raison d’un risque de conflit d’intérêts avéré. Les membres des CNP sont des personnes morales. Cependant, pour en devenir membres via les organisations qui les composent, les infirmières doivent fournir leur CV à jour, leur numéro d’inscription à l’Ordre national des infirmiers (ONI) et leur déclaration d’intérêts. En cas de liens d’intérêts sur des thématiques pour lesquelles notre expertise est demandée, elles doivent se déporter. S’il y a conflit d’intérêts, elles ne peuvent pas faire partie d’un CNP. Actuellement, 19 organisations composent le CNPI, et deux membres le sont de droit, dotés d’une voix consultative : l’ONI et la section 92 du Conseil national des universités (CNU).

De quels financements disposez-vous ?

Nous disposons de deux subventions rendues publiques par arrêté. L’une de 100 000 € consacrés au fonctionnement du CNPI, dans le cadre d’une convention de trois ans avec le ministère de la Santé (Caisse nationale de l’Assurance maladie-DGOS). La somme est proportionnelle au nombre de professionnels représentés par le CNP. Nous sommes donc dans la catégorie des 100 000 et plus. Cependant, nous avons demandé à la DGOS de créer une nouvelle tranche correspondant à 500 000 et plus. Notre demande serait en cours de réflexion. Nous percevons également une deuxième enveloppe en raison de la nouvelle mission qui nous a été confiée concernant la certification périodique. Les deux premières années, nous n’avons rien perçu. L’année dernière, nous avons reçu 169 000 €, et cette année, la subvention a baissé (119 475 €), les tutelles estimant qu’une grande partie du travail avait déjà été effectuée. Pour autant, les dédommagements restent peu élevés au regard de nos sollicitations car outre les avis consultatifs, nous participons à de nombreux conseils scientifiques, à des commissions, etc. Et nous tenons à verser une indemnisation aux collègues pour les expertises rendues.

Références

  • 1. Décret n° 2019-17 du 9 janvier 2019 relatif aux missions, à la composition et au fonctionnement des Conseils nationaux professionnels des professions de santé.
  • 2. CNPI : www.cnp-infirmier.fr

AFDS : Association française des directeurs des soins

AFEDI : Association francophone européenne des diagnostics, interventions et résultats en soins infirmiers

AFIC : Association des infirmièr(e)s de cancérologie

AFITCH-OR : Association française des infirmièr(e)s de thérapie cellulaire, hématologie, oncologie et radiothérapie

ANCIM : Association nationale des cadres de santé

ANFIIDE : Association nationale française des infirmières et infirmiers diplômés et des étudiants

ANISP : Association nationale des infirmiers de sapeurs-pompiers

ASI : Académie des sciences infirmières

CEFIEC : Comité d’entente des formations infirmières et cadres

CEFI PSY : Comité d’études des formations infirmières et des pratiques en psychiatrie

CI : Convergence infirmière

CNASI : Collège national des acteurs en soins infirmiers

CNI : Coordination nationale infirmière

CNU : Conseil national des universités

FFIDEC : Fédération française des IDE diplômées d’État coordinatrices

FNI : Fédération nationale des infirmiers

GIT : Groupement des infirmiers de santé au travail

ONI : Ordre national des infirmiers

SFAP : Société française d’accompagnement et de soins palliatifs

SNICS : Syndicat national des infirmier(e)s conseiller(e)s de santé

SNIES : Syndicat national des infirmiers éducateurs de santé

SNIIL : Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux

SNPI : Syndicat national des professionnels infirmiers

Évelyne Malaquin-Pavan, présidente du Conseil national professionnel (CNP) infirmier.