« UNE PERSONNE MIEUX INFORMÉE EST UNE PATIENTE MIEUX SOIGNÉE »
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FEMME DE SANTÉ
Patiente partenaire dans une équipe d’oncologie au sein de la clinique Tivoli-Ducos à Bordeaux, Sabine Dutheil a été nommée Femme de Santé en 2022. Au quotidien, elle accompagne les patientes atteintes d’un cancer du sein, en lien, notamment, avec l’infirmière de coordination.
Je le suivais déjà mais de loin ! Bien entendu, j’ai été surprise par ma nomination, mais c’était une bonne nouvelle. J’ai trouvé audacieux de leur part de nommer Femme de Santé une patiente partenaire dans un établissement de soins. Cette décision signe une évolution pour la démocratie en santé, l’empowerment et le pouvoir d’agir.
Grâce à cette nomination, j’ai pu faire des rencontres, notamment avec deux Femmes de Santé à Bordeaux, avec lesquelles je suis toujours en lien. J’ai également contribué à un webinaire pour expliquer ce que signifie être patiente partenaire dans une équipe de soins. Je pense que la vie peut être moins douce pour les femmes que nous sommes, comme le démontre d’ailleurs l’histoire du secteur de la santé. Dans notre domaine, l’importance du réseau est essentielle et j’ai dans l’idée que si je contacte une Femme de Santé que je ne connais pas, sa porte sera tout de même entrouverte en raison de notre lien. Cette sororité est précieuse car il faut être entouré pour mener des projets à bien. Ce collectif est puissant aussi parce que nous sommes toutes différentes, tout en poursuivant un but commun : rendre le système de santé efficient et efficace afin de répondre aux besoins des personnes concernées.
J’ai eu un cancer du sein en 2015 pour lequel je me suis arrêtée un peu plus d’un an. Il est la base d’une bifurcation professionnelle car j’ai découvert l’Université des Patient·es-Sorbonne, que j’ai intégrée en 2017 pour suivre un diplôme universitaire (DU) en cancérologie. À ce moment-là, je n’avais pas de projet précis, mais je savais que j’avais besoin de réfléchir à mon parcours de soins, en le confrontant à d’autres, en pensant au collectif. Dans le cadre de ce DU, je devais effectuer un stage d’observation. J’ai sollicité l’oncologue de la clinique où j’étais prise en charge pour lui demander des contacts. Intéressée de connaître mon avis sur le parcours de soins, elle m’a proposé de l’effectuer à la clinique. Je n’en suis jamais repartie. Je travaille depuis sept ans, à mi-temps, au plus près de l’infirmière coordinatrice de parcours pour accompagner les femmes touchées par un cancer du sein. Pendant longtemps, l’angle de vue des patientes a eu tendance à être oublié. Aujourd’hui, nous complémentons les savoirs car nous pensons qu’une personne mieux informée est une patiente mieux soignée. Ainsi, dès lors qu’une patiente est avisée de son traitement par chimiothérapie, l’équipe lui propose de me rencontrer, généralement une semaine avant son rendez-vous avec l’infirmière de coordination. La chimiothérapie est pourvoyeuse de nombreuses représentations et de questions qui ne peuvent pas attendre. Je revois les patientes lors de leur deuxième cure et leur laisse aussi mon numéro de téléphone. Elles peuvent m’appeler quand elles le souhaitent. J’en accompagne même certaines pour choisir leur perruque. Nous avons une grande liberté dans le format. Lorsque je les informe avoir été à leur place, quelque chose se passe. Peut-être pensent-elles que je comprends ce qu’elles sont en train de vivre. Je joue aussi un rôle de traduction et de partage des informations sur la pathologie, les traitements et la réorientation vers les soins de support si besoin. Avec l’infirmière, nous nous sollicitons régulièrement. Elle m’adresse les patientes. Depuis que je suis à ce poste, j’en ai accompagné environ 1 200. J’interagis aussi avec les chirurgiens et les oncologues. Nous sommes constamment en réflexion sur les parcours de soins notamment.
Sabine Dutheil, patiente engagée dans le partenariat en santé, formée à l’expertise d’usage et à l’écoute à l’Université des Patient·es-Sorbonne.