Le Conseil national de la refondation (CNR), créé par le Président Emmanuel Macron en septembre 2022, a ouvert au Mans début octobre ses réflexions sur le volet santé. C’est le ministre de la Santé, François Braun, qui a initié son lancement, dans la Sarthe.
Ce CNR réunit aussi bien les élus que les citoyens usagers, les associations de chaque territoire de santé ainsi que les professionnels hospitaliers et libéraux pour « trouver ensemble des solutions aux grands défis du système de santé ». Parmi les principales thématiques retenues figure l’accès au médecin traitant, la garantie de la permanence des soins, la politique de prévention et l’attractivité du système de santé. « Le temps du diagnostic est révolu, passons à l’action car il y a urgence », a indiqué François Braun, pour qui le remède peut venir des propositions élaborées dans les territoires, en partant des besoins. Pour Agnès Firmin-Le Bodo, ministre déléguée en charge de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, ce CNR annonce une méthode nouvelle : « Réunir les représentants des forces politiques, les partenaires sociaux, les élus, les représentants du monde économique et associatif pour faire avancer le pays », pour un système de santé confronté à l’urgence. Lors d’un CNR réuni à Craon (Mayenne), différentes propositions innovantes ont été émises, comme celle d’étendre le fonctionnement des réunions de concertation pluridisciplinaire – déjà existantes pour les personnes âgées – à la santé mentale, et adapter le cadre réglementaire pour favoriser les délégations de tâches aux professions paramédicales. Le Président de la République, présent lors de cette réunion en Mayenne, a déclaré qu’il croyait beaucoup en cette méthode du CNR qui constituait « un formidable levier de confiance démocratique, un antidote à l’impuissance et au fatalisme ».
Parmi les chantiers dont le ministre de la Santé souhaite s’emparer figure l’attractivité des métiers : depuis le début des consultations du CNR, en amont de sa mise en place officielle, François Braun a constaté qu’il s’agissait en effet d’une des principales sources d’inquiétude des instances interrogées. Pour lui, il faut continuer de revoir l’ensemble du système, « depuis la détection des potentiels, leur accompagnement en passant par la formation (initiale et continue), la professionnalisation, les carrières, les diversités d’exercice ». Il est urgent d’augmenter les ressources humaines en quantité et poursuivre les avancées pour renforcer leurs compétences, a-t-il indiqué. Il mise, pour cela, sur la rénovation des formations initiales pour attirer les soignants dès la sortie du secondaire, et sur l’amélioration du contenu des formations, avec plus de place pour la simulation en santé. Le ministre a aussi évoqué la piste de la formation par l'apprentissage, par la validation des acquis et compétences et par des passerelles entre les métiers. Il souhaite également s’appuyer sur les infirmiers en pratique avancée (IPA), en élargissant leur champ de compétences vers la petite enfance et la prise en charge des aînés. Pour restaurer l’attractivité, il souhaite ré-enchanter l’hôpital, c’est-à-dire faire en sorte que les soignants en exercice retrouvent le sens de leur engagement et que les nouveaux formés aient envie de rejoindre les établissements de santé : il s’appuiera sur les propositions de la mission Claris*, qui selon lui, a déjà porté ses fruits,
Ces réflexions ont été saluées par la Fédération hospitalière de France (FHF), également invitée au lancement des travaux au Mans : « Sur le fond, les orientations proposées par le ministre de la Santé et les défis évoqués lors de cette journée reflètent les préconisations formulées depuis plusieurs années par la FHF. L’accès aux soins, la prévention, l’attractivité des métiers et le mieux-vivre à l’hôpital, la transition écologique, constituent des objectifs prioritaires pour la Fédération », ont annoncé Arnaud Robinet, président de la FHF et Zaynad Riet, déléguée générale.
De son côté, l’Ordre national des infirmiers (ONI) souhaite être force de propositions pour garantir l’accès aux soins de tous : il a d’ailleurs publié une cartographie de la présence infirmière sur le territoire pour rappeler son importance et son intérêt dans la lutte contre les déserts médicaux : « La profession infirmière couvre l’ensemble du territoire national, ce qui constitue une garantie d’accès aux soins pour les Français ; dans les déserts médicaux, on constate une forte présence d’infirmiers en exercice. Dans ce contexte, l’Ordre considère que la présence des 650 000 infirmiers sur tout le territoire est de nature à apporter une réponse à l’enjeu de demande de soins de proximité de premiers recours », énumère l’ONI qui demande la publication d’un nouveau décret infirmier pour juin 2023, notamment pour que les futurs infirmiers, aux compétences élargies (IPA) soient suffisamment formés. « L’ONI veut jouer bien évidemment un rôle actif dans les débats en cours sur la réforme de notre système de santé, comme il l’a fait durant le débat présidentiel de l’année écoulée. Mais il est sensible à l’urgence de donner rapidement des solutions concrètes à nos concitoyens qui se trouvent privés de ce droit fondamental qu’est l’accès aux soins », affirme Patrick Chamboredon, président de l’ONI, qui appelle de ses vœux plus d’autonomie pour les infirmiers, dans les territoires, au plus près du patient.
Les réunions du CNR santé en régions se poursuivent et donneront lieu, en janvier 2023, à un bilan. Reste à voir ce qu’il adviendra ensuite des diverses propositions émises. De son côté, le ministre de la Santé en est convaincu : « Le système de santé est fragilisé mais il saura surmonter les difficultés les plus structurelles qu’il rencontre aujourd’hui. Mais cela implique une mobilisation de tous, et soyons honnêtes, une dose de courage ». Les soignants, échaudés depuis des années, ressentant un sentiment d’abandon exacerbé par la crise sanitaire, répondront-ils encore présents ? Il en va de la survie du système de santé.
*Rapport de la mission sur la gouvernance et la simplification hospitalières confiée au Pr Olivier Claris, juin 2020. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_claris_version_finale_1_.pdf