L'association Les Toiles enchantées fait entrer le cinéma à l'hôpital

La magie du grand écran opère aussi à l'hôpital. Depuis 1997, l'association Les Toiles enchantées propose aux hôpitaux pédiatriques et centres de rééducation et de réadaptation pour enfants et adolescents malades et handicapés des séances de cinéma grandeur nature : écran géant, films en 35 mm, de préférence récents, voire en avant-première avec, cerise sur le gâteau, la présence de l'équipe du film quand c'est possible. Depuis deux ans, elle organise même des ateliers du cinéma pour initier le jeune public hospitalisé aux techniques du métier.

Présidée par Alain Chabat, l'association est soutenue par nombre de personnalités du Septième Art et plébiscitée par les établissements qui ont déjà fait appel à ses services. « En 1997, nous avons organisé 9 projections en France. En 2008, près de 300 ! » Marc Salem, son délégué général, est animé d'une passion communicative. Ancien responsable de la communication de l'hôpital Necker Enfants malades, il chapeaute deux équipes de deux projectionnistes. Une troisième équipe de deux personnes est en projet, pour répondre à la demande croissante : « À ce jour, nous allons dans 125 établissements, dont la moitié en province, et effectuons quelques projections en Belgique et en Afrique. Les projectionnistes sont tout le temps sur la route ! »

À chaque fois, c'est une tonne de matériel qu'il faut manipuler, et près de trois heures de montage, réglages, accueil des enfants... Ce travail, visible sur une vidéo diffusée sur le site Internet de l'association, sera mieux mis en valeur sur son nouveau site, prévu pour mi-octobre. « On pourra voir sous forme de reportage-photo une journée type avec l'arrivée du camion, la préparation de la salle, l'accueil des enfants... », précise Marc Salem. La présentation de films, des partenaires et des hôpitaux dans lesquels Les Toiles enchantées intervient est également prévue. « Tout cela avance lentement car une agence le fait gracieusement... c'est la chaîne de la solidarité ! » Car Les Toiles enchantées fonctionne avec un modique budget annuel de 450 000 euros, financé à 20 % par des opérations événementielles, 20 % par des aides publiques et 60 % par des dons et partenariats. Depuis un an, il est possible d'effectuer des dons en remplissant un formulaire en ligne. « Mais nous ne sommes pas très offensifs vis-à-vis du grand public », reconnaît Marc Salem, qui s'appuie sur le bouche-à-oreille. Pourtant, les projections requièrent des montants importants : il faut compter environ 1 000 euros par séance, gratuite pour les établissements d'accueil.

Quinze mille enfants hospitalisés par an peuvent ainsi bénéficier de ces quelques heures d'évasion. Pour certains, il s'agit d'une simple distraction. Pour d'autres, cela fait partie intégrante de leur prise en charge. Ainsi, à la Maison de Solenn, Corinne Pieters, philosophe, organise un atelier philo «arrêt sur image». Une fois par mois environ, les adolescents hospitalisés visionnent un film en présence de l'équipe enseignante, suivi, le lendemain, d'une discussion en atelier. « Les adolescents n'ont pas la télévision ni d'ordinateur dans leurs chambres. Les séances de cinéma relèvent de soins culturels, ce sont des liens vers l'extérieur très importants pour eux », souligne Corinne Pieters. Le choix des films, discuté avec Les Toiles enchantées, est validé par l'équipe médicale. Il ne s'agit pas de censurer tel ou tel film, mais d'éviter de heurter ces jeunes avec des sujets qui les ramènent à leur pathologie. « La discussion lors de l'atelier du lendemain est fondamentale. Les adolescents sont très fragiles. Une image sans discussion peut être très violente ! »

Pour ces adolescents comme pour des enfants hospitalisés, Les Toiles enchantées parvient à concocter un programme digne des meilleures salles obscures. En octobre, Lucky Luke, l'Armée du Crime, L'âge de Glace 3, Là-Haut, Le Petit Nicolas ou Harry Potter seront au box-office des hôpitaux partenaires.