Une manip'radio à la direction des soins - Objectif Soins & Management n° 179 du 01/10/2009 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 179 du 01/10/2009

 

VÉRONIQUE THOMAS

Parcours

Véronique Thomas est l'une des soignantes issues de la filière médico-technique occupant un poste de directrice des soins. Au CHU Amiens Picardie, elle coordonne tout type de pôle d'activité clinique, médico-technique et de rééducation.

Ouverture, décloisonnement, transversalité... Ce sont autant de mots qui ont aidé Véronique Thomas à construire son parcours à l'hôpital. De ces concepts-là, l'ancienne manipulatrice en électroradiologie médicale en a fait un tremplin pour son évolution professionnelle. Puis elle s'est engagée dans la formation de l'École nationale de la santé publique (ENSP devenue École des hautes études en santé publique) de Rennes après l'ouverture du concours en 2002 aux filières médico-techniques et de rééducation.

Elle fait aujourd'hui partie de ces professionnels directeurs des soins non issus de la filière infirmière. « À l'ENSP en 2006, nous étions cinq professionnels issus de la filière médico-technique sur une soixantaine de stagiaires directeurs des soins », précise-t-elle avant d'ajouter : « Pourtant, ce qui fait la richesse d'une équipe de soins, c'est l'ensemble des cultures soignantes. » Sans s'inscrire dans quelque corporatisme, Véronique Thomas estime équitable que les professionnels médico-techniques puissent avoir aujourd'hui des possibilités d'évolution de carrière identiques à celles des autres soignants hospitaliers.

L'hôpital à 20 ans, l'IFCS à 30 ans

Née en 1963 à Metz, Véronique Thomas s'est engagée dans la profession soignante dès l'obtention de son baccalauréat scientifique. « J'ai découvert le métier de manipulatrice lors d'un stage de découverte des métiers de l'hôpital. C'est l'approche scientifique et technique en lien avec la prise en charge des patients qui m'a enthousiasmée », se souvient-elle. Après deux ans de formation (depuis 1990 les études sont passées en trois ans), la jeune femme d'alors prend son premier poste en radiopédiatrie au CHRU de Tours. Elle n'a pas encore 20 ans. « Au-delà de la dimension technique associée à la profession de manipulatrice, je me suis toujours considérée comme une soignante à part entière, souligne-t-elle. Les manipulateurs ne se contentent pas d'effectuer un acte technique, il y a tout un accompagnement du patient, une prise en charge de la douleur, l'importance du relationnel... Dans le cas de l'imagerie interventionnelle, laquelle nécessite des actes invasifs, nous prenons les mêmes précautions d'hygiène et sécurité qu'en soins infirmiers. »

Après dix ans en radiopédiatrie, Véronique Thomas souhaite devenir cadre de santé et suit la préparation au concours. Reçue à l'IFCS du CHU de Rennes - l'un des IFCS agréés pour les manipulateurs d'électroradiologie -, elle prend une année de disponibilité pour suivre la formation. « Ma demande n'a pu être honorée dans le cadre de la promotion professionnelle et, en 1992, la possibilité de report n'existe pas. Comme j'étais vraiment motivée pour être cadre, j'ai pris cette année de disponibilité et je me suis autofinancée ma formation », explique-t-elle.

De retour dans le CHU tourangeau son diplôme de cadre de santé en poche, Véronique Thomas doit attendre près de deux années avant de se voir proposer un poste de cadre de santé : « Ce n'est pas automatique dans notre cas, il faut attendre qu'un poste se libère pour pouvoir être positionné en tant que cadre. Il existe en effet moins de mouvement sur les postes de cadre des filières médico-techniques. »

Au cours de l'année 1995, elle est affectée à un poste de cadre dans le service de médecine nucléaire et ultrasons. Cinq ans plus tard, elle change à nouveau de service pour une affectation de cadre de santé en radiothérapie. « À partir du moment où j'ai accédé au poste de cadre de santé, j'ai ressenti le besoin d'enrichir mes connaissances, de me remettre en question, d'accompagner de nouvelles équipes », poursuit-elle. Surtout, sa mobilité au sein du CHU de Tours lui aura permis de connaître l'ensemble des secteurs d'activité du métier de manipulateur : l'imagerie et la médecine nucléaire dans le domaine du diagnostic, la radiothérapie dans la dimension prise en charge thérapeutique.

Une approche résolument transversale

C'est en 2004, deux ans après l'ouverture du métier de directeur des soins aux filières médico-techniques, que Véronique Thomas entame la préparation au concours de l'ENSP de Rennes. Elle passe avec succès le concours en octobre 2005 et effectue son année de formation en 2006. Toujours avec le même souci d'ouverture, elle veille à faire des stages aussi bien au sein d'établissements moyens que de CHU ou encore en Ifsi. « Pour pouvoir comprendre l'ensemble de la chaîne de soins, il faut avoir une vision la plus globale possible, écouter les contraintes et les spécificités des uns et des autres », estime-t-elle.

En janvier 2007, elle est nommée directrice des soins* au CHU d'Amiens. Elle travaille avec une autre directrice des soins et une coordinatrice générale des soins, toutes deux issues de la filière infirmière. « Avec l'organisation en pôles, les directeurs des soins sont plutôt sur un profil de coordination transversale, de gestion des interfaces, note-t-elle. Je ne peux que m'inscrire dans cette nouvelle posture managériale, tant la démarche transversale me paraît être une évidence. » Elle est référente de plusieurs des pôles du CHU, les pôles médico-techniques imagerie et biologie-pharmacie, mais aussi les pôles cliniques pédiatrie ou oncologie et le service diététique... « C'est un choix de l'établissement et tout se passe très bien. Je n'ai pas plus de difficulté avec un cadre sup' infirmier qu'un cadre sup' de rééducation. En tant que directrice des soins, je suis beaucoup plus dans un rôle de coordination que d'expertise soignante », rappelle Véronique Thomas.

Sans être passée par l'expérience de cadre supérieur, elle a découvert avec enthousiasme la richesse du métier de directrice des soins. Aujourd'hui, elle est sur le départ du CHU de Picardie, tant pour des raisons d'opportunités professionnelles - connaître une autre structure que celle d'un CHU -, que pour des motifs personnels, en l'occurrence se rapprocher de sa famille. Véronique Thomas occupera ainsi dès le début de l'année prochaine un poste de coordinatrice générale des soins d'un centre hospitalier. Seule directrice des soins au sein de l'hôpital, elle aura ainsi l'ensemble des professionnels et des filières à coordonner. « Je ne me serais pas sentie capable de prendre la coordination des soins en sortant de l'ENSP, j'avais encore besoin de travailler en équipe avec d'autres directeurs des soins, confie-t-elle. Aujourd'hui, après ces trois années passées au CHU d'Amiens, j'ai beaucoup appris et je suis en mesure d'occuper un tel poste. »

*Selon une enquête du ministère de la Santé portant sur les postes de directeurs des soins dans les établissements publics de santé et instituts de formation, il y aurait 23 directeurs de soins de la filière médico-technique pour 637 postes budgétés, donc 6,3 % (chiffres 2008).