Toxicomanie : faut-il créer des «salles de shoot» ? - Objectif Soins & Management n° 182 du 01/01/2010 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 182 du 01/01/2010

 

Actualités

SÉCURITÉ → Mise à l'étude à Paris, l'idée d'ouvrir des lieux permettant la consommation encadrée de drogues fait débat depuis quelques semaines, en soulevant de vives critiques comme des réactions positives.

Le Conseil de Paris puis le conseil régional d'Île-de-France ont voté des subventions* pour expertiser, en vue d'une éventuelle mise en place, des «salles d'injection à moindre risque» où les toxicomanes pourraient consommer de la drogue sous une vigilance soignante. L'idée a été soulevée par le socialiste Jean-Marie Le Guen : « Ces salles permettraient de garantir aux consommateurs de drogues une sécurité sanitaire et sociale, mais aussi de les réinsérer, d'être plus près d'eux, de les aider à décrocher en entrant dans ces structures de soin », a déclaré le député médecin. L'expérience n'est pas nouvelle. On compte déjà 80 salles de shoot dans le monde, dont 31 aux Pays-Bas, 20 en Allemagne, 17 en Suisse et trois en Espagne.

« D'autres dispositifs existent »

Ce projet a soulevé des réaction positives comme de vives critiques. Gaëlle Baumard, faisant fonction de cadre dans l'Équipe de coordination et d'intervention auprès des malades usagers de drogues (Écimud) de l'hôpital Bichat (Paris), craint que ces salles induisent une confusion entre le soin et la consommation, pour les toxicomanes. « Au niveau social existent les Centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues (Caarud), des lieux de consommation et de prévention dans lesquels du matériel d'injection de type Steribox® est à la disposition des consommateurs actifs. Et en matière de soin, il y a les Centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa). Les toxicomanes ont repéré ces structures qui fonctionnent bien ensemble », explique-t-elle.

« Trouver des alternatives »

Aymeric Reyre, psychiatre à l'hôpital Avicenne (Bobigny, 93), se dit, quant à lui, plutôt favorable à ces salles. « Les Caarud sont très proches : ils donnent le matériel et des conseils aux usagers mais ils ne vont pas jusqu'à autoriser l'injection. Du coup, le toxicomane prend le matériel et va se shooter dans le square le plus proche. Il faut mettre en place la plus grande offre possible pour les toxicomanes qui n'accèdent pas aux soins. En effet, une partie des toxicomanes ne passe pas par les soins. Il faut trouver les meilleures alternatives possibles pour eux. »

« En revanche, poursuit-il, il ne faudrait pas que ces salles de shoot soient en concurrence avec les soins. Elles devraient logiquement dépendre des Caarud. Ce serait absurde de créer un nouveau type de structures. Je pense qu'il faut réfléchir à la toxicomanie en termes de santé publique et non exclusivement dans une optique médicale. Or le social est aussi une réponse à la prise en charge de la toxicomanie. »

* 26 000 euros pour la Mairie de Paris, 20 000 pour le conseil régional.

CONSOMMATION 2009 3,3 %...

... des jeunes de 17 ans ont expérimenté la cocaïne, 2,9 % l'ecstasy et 1,1 % l'héroïne. 50 000 consommateurs sont vus au cours de l'année 2009 dans les centres spécialisés. 305 décès sont liés à l'usage de substances illicites. 75 décès sont imputés au sida, d'usagers injecteurs.

Source :