MICHÈLE CASTELLI
Parcours
À la tête depuis plus d'un an de la clinique parisienne Villa-Montsouris spécialisée en psychiatrie, Michèle Castelli fait partie des rares infirmières promues à la direction d'un établissement de soins. Et cette ancienne formatrice en Ifsi a relevé le challenge avec enthousiasme.
«Je ne pense pas être ambitieuse ou carriériste, mon parcours professionnel s'est construit au gré des rencontres et des opportunités. Je n'ai jamais pensé en devenant infirmière que je pouvais avoir trente ans plus tard de telles responsabilités. » Michèle Castelli, un petit bout de femme de 52 ans à la silhouette juvénile, paraît avoir conservé la modestie des soignants en dépit du poste qu'elle occupe depuis plus d'un an. « Pour autant, je ne suis plus dans une posture soignante, mais bien dans celle d'une gestionnaire d'un établissement de soins à vocation commerciale », tient-elle à préciser.
En 1977, après deux années d'études universitaires, Michèle Castelli a décidé de se tourner vers les soins. Élève infirmière à l'Ifsi de Nice, elle se souvient encore aujourd'hui de son vécu difficile lors des études infirmières. « Je venais de la fac : je me suis retrouvée avec des cours obligatoires et des contraintes scolaires que j'avais oubliées. C'était loin d'être évident », confie celle qui, des années plus tard, fera le choix d'être formatrice.
Pendant ses études, elle découvre la psychiatrie lors d'un stage. Son choix était fait : ce sera son lieu d'exercice professionnel. Son diplôme d'État en poche, elle travaille néanmoins pendant deux ans comme infirmière intérimaire, ce qui lui permettra d'apprendre son métier et de faire face à toutes situations, affirme-t-elle. Enchaînant les missions, médecine du travail, personnes âgées, chirurgie, soins infirmiers en libéral, elle fait l'apprentissage de différents secteurs et modes d'exercice. « Je me suis rendue compte que je ne pouvais pas trouver ma place dans le secteur public. La hiérarchie m'apparaissait trop pesante, ne permettant aucune réactivité », précise-t-elle.
La jeune Niçoise d'alors décide de découvrir Paris. Dans l'attente de trouver un poste en psychiatrie, elle exerce dans une clinique chirurgicale privée du XVIe arrondissement. Quelques mois plus tard, elle réalise enfin son projet : être infirmière en psychiatrie. Recrutée par la clinique Dupré à Sceaux, une clinique gérée par la Fondation santé des étudiants de France, elle s'occupe des adolescents en souffrance poursuivant des études. « J'ai changé plusieurs fois de service, j'ai travaillé avec des psychiatres et des équipes de soins qui avaient des orientations différentes. C'est vraiment à cette période et sur le terrain que j'ai appris mon métier d'infirmière en psychiatrie », indique-t-elle.
En 1990, Michèle Castelli choisit de donner un nouvel élan à sa carrière et intègre l'école des cadres de la Croix-Rouge. Durant cette année, elle fait une nouvelle rencontre : la pédagogie. Respectueuse de son institution d'origine, elle y revient cependant comme cadre de santé. En 1992, alors que le nouveau diplôme commun fait son apparition dans les Ifsi, la directrice de l'Ifsi de Notre-Dame-de-Bon-Secours à Paris la contacte, intéressée par son parcours d'infirmière en psychiatrie. « J'avais découvert lors du stage de pédagogie effectué pendant l'école des cadres qu'il était possible de faire de la formation autrement. J'ai donc décidé d'accepter cette proposition », explique-t-elle.
Michèle Castelli, qui se destinait pourtant initialement au management dans les services de soins, va rester près de douze ans à l'Ifsi Notre-Dame-de-Bon-Secours. « C'est certainement pour moi l'époque la plus riche sur le plan intellectuel. J'ai pu conceptualiser ma propre pratique, réfléchir au fondement des soins infirmiers tels que je souhaitais les transmettre. Mettre en place le programme de psychiatrie et introduire les sciences humaines furent mes premières grandes missions en formation », se souvient-elle.
Accompagner les futurs professionnels, leur permettre de découvrir par eux-mêmes leurs propres voies d'infirmiers, proposer des espaces pour la créativité et l'expression des individualités sont autant d'engagements qu'elle partage avec l'équipe de formateurs. « Nous cherchions à mettre en valeur les potentiels de chacun, il y avait un vrai respect de l'étudiant », ajoute-t-elle. De simple formatrice, elle devient coordinatrice des stages puis directrice pédagogique, lors de la fusion entre les Ifsi de l'hôpital Notre-Dame-de-Bon-Secours et de l'hôpital Saint-Joseph qu'elle quitte en 2004.
Après un court passage à l'Institut mutualiste Montsouris comme cadre supérieur, c'est avec son diplôme de coach obtenu au Caisse nationale d'Assurance maladie (Cnam) qu'elle postule au groupe Orpea-Clinea. Elle est retenue pour un poste de responsable des soins à la clinique Villa-Montsouris.
Du privé à but non lucratif, Michèle Castelli découvre en 2007 les cliniques commerciales, la structure et le fonctionnement d'un groupe. « Le privé lucratif a parfois mauvaise presse chez les infirmières, reconnaît-elle. Pourtant, ces établissements ont aussi leur intérêt et répondent aux attentes et aux besoins de la population. »
Responsable des soins, elle forme un tandem dynamique avec la directrice de la Villa, ancienne infirmière elle aussi. Elle se lance avec une autre cadre de santé dans la création d'un Certificat d'infirmier spécialisé en psychiatrie, le CISP, pour former en interne sous forme d'un DU les professionnels désireux de travailler en psychiatrie. « Déjà très favorable au diplôme commun de 1992 qui a mis sur un même plan les infirmiers de soins généraux et les infirmiers de secteur psychiatrique, je défends aujourd'hui la mise en place d'une véritable spécialisation en psychiatrie pour les infirmières », souligne-t-elle.
Lors du départ de la directrice de la clinique, le groupe propose alors à Michèle Castelli d'occuper le poste. Elle accepte de relever le défi. Elle découvre de nouvelles tâches, gestion du personnel et des payes, les suivis juridiques des salariés, la gestion des instances comme le Comité de lutte contre les infections nosocomiales (Clin), la Commission médicale d'établissement (CME)...
La clinique, qui compte 52 lits et plus de 80 salariés, fonctionne comme un véritable petit hôpital. « Là encore, je me suis formée sur le terrain, même si je bénéficie actuellement d'une formation universitaire à la direction d'établissement de soins », signale-t-elle.
Pour l'aider dans ses fonctions, la directrice est entourée de personnes compétentes, tant sur le plan soignant que sur les plans administratif et technique. Elle vient de nommer deux infirmiers aux postes de coordonnateurs des soins qu'elle accompagne dans leur nouvelle mission en attendant qu'ils puissent intégrer l'Institut de formation des cadres de santé (IFCS). « Je tiens beaucoup à la compétence et à la valorisation de l'équipe infirmière de la Villa-Montsouris. Nous nous devons d'offrir à la patientèle reçue une qualité des soins irréprochable. L'ensemble de nos équipes médicales et para-médicales font un travail formidable, qui mérite d'être plus connu et reconnu au sein de la population infirmière. Et, pour cela, nous prônons l'accueil des étudiants infirmiers et les partenariats avec les Ifsi », renchérit-elle.
La formation reste son cheval de bataille avec les rencontres de professionnels sur des sujets innovants, les interventions au Salon infirmier, la poursuite du Certificat infirmier spécialisé en psychiatrie ou d'autres projets. Son souhait est de participer à l'évolution et au développement professionnel des infirmiers en psychiatrie. Si Michèle Castelli confie qu'elle n'a jamais autant travaillé de sa vie depuis qu'elle occupe ce poste de direction, elle n'en est pas moins satisfaite. Elle continue à apprendre chaque jour, et surtout, elle reste au coeur des relations humaines.