PRÉVENTION → Selon le dernier rapport du réseau de surveillance AES-Raisin, le nombre d’accidents d’exposition au sang (AES) chez les professionnels de santé a diminué de près de 20 % en quatre ans. Outre le respect des précautions standards, une large implantation de matériels de sécurité performants constitue pour les spécialistes une réponse adéquate à la gestion du risque infectieux.
Les derniers résultats sur les AES sont plutôt rassurants. Ils démontrent l’efficacité du travail de sensibilisation effectué depuis des années par le Groupe d’étude sur le risque d’exposition aux soignants (Geres
Le dernier rapport du Raisin
En matière de respect des précautions standards, le rapport du Raisin estime que le taux de port de gants continue de s’améliorer (66,7 %), et notamment lors de la réalisation d’une injection avec un taux d’utilisation de gants de 43,5 %. S’agissant des AES percutanés lors d’une suture pour lesquels le taux de transmission peut être minoré par l’effet d’essuyage du gant, le port de gants s’observe dans plus de 99 % des cas. La présence du collecteur à portée de main est de 71 %.
Le personnel infirmier arrive toujours en tête des victimes d’AES (43,3 % en 2007), suivi des élèves en soins infirmiers et des aides-soignantes (10,3 % pour chaque catégorie), des internes (6,5 %) et des médecins (4 %). Dans 70 % des cas, l’AES est une piqûre. Les projections et les coupures représentent respectivement 19 % et 10 % des AES. Près de la moitié des AES percutanés sont en lien avec la manipulation d’une aiguille. Depuis 2004, les aiguilles à suture arrivent en première position des AES liés à des aiguilles, avant les sous-cutanés.
L’InVs a mis en place une surveillance nationale des contaminations virales chez les soignants à la suite d’un AES. Cette surveillance a été initiée en 1991 pour le VIH, en 1997 pour le virus de l’hépatiteC, puis en 2005 pour le virus de l’hépatite B. Le nombre de séroconversions VIH reconnues chez le personnel de santé au 31 décembre 2007 s’élevait à 14, le nombre d’infections présumées à 34, soit un total de 48. Les textes réglementaires exigent la déclaration d’un accident et une séroconversion pour permettre une indemnisation. Les infirmières et étudiants en soins infirmiers sont les plus touchés : 12 séroconversions documentées et 13 infections présumées. Plus de la moitié des séroconversions documentées auraient pu être évitées par le respect des précautions standards. Parmi les 14 séroconversions documentées, une prophylaxie antirétrovirale a été prescrite pour 6 professionnels seulement. L’échec de la prophylaxie est patent dans 4 cas, c’est-à-dire chez les soignants ayant poursuivi leur traitement pendant au moins 15 jours. Le nombre de séroconversions professionnelles VHC chez le personnel de santé est au nombre de 61. Les services les plus représentés sont ceux d’hémodialyse et d’hépato-gastro-entérologie. Là encore, au moins 30 séroconversions étaient évitables par l’application des précautions standards. Comme pour le VIH, les aiguilles creuses contenant du sang sont le matériel le plus en cause. En ce qui concerne le VHB, aucune séroconversion professionnelle n’a encore été signalée par les médecins du travail depuis 2005, une observation qui ne reflète sans doute pas la réalité.
Bon nombre d’AES auraient pu être évités, notamment par le port de gants et des collecteurs à proximité. Le rapport du Raisin estime toutefois que les limites en matière de stratégie pédagogique risquent d’être atteintes. « Il est évident que seule l’implantation la plus large possible de matériels de sécurité performants peut amener une réponse forte et durable en termes de gestion du risque AES », soulignent les auteurs. Les données permettent de penser que l’implantation des matériels de sécurité évolue lentement. S’agissant des dispositifs médicaux à risque, la part des matériels de sécurité est de 31 % pour les cathéters, 56 % pour les seringues à gaz du sang, 32 % pour les aiguilles de chambre implantable et 79 % pour les seringues à injection d’héparine.
Une étude de médecins du travail et du Geres a montré l’importance de la réduction des AES obtenue avec du matériel de sécurité
Le taux de piqûre pour 100 000 actes réalisés en intraveineux est de 4,4/100 000 dans les services équipés de matériels sécurisés, alors qu’il est de 17,8/100 000 dans les services peu ou pas dotés.
Il existe trois types de matériel de sécurité. L’activation de la sécurité peut être automatique (ou passive), ne nécessitant aucune intervention de l’utilisateur (certains cathéters protégés, des autopiqueurs autorétractables pour prélèvement capillaire…).
D’autres matériels sont dits semi-automatiques, avec une mise en sécurité automatique déclenchée par l’utilisateur, soit avec la main tenant le dispositif, soit avec la main controlatérale (cas de certains cathéters protégés, seringues, corps de pompe…).
Enfin, les matériels de sécurité active nécessitent que la sécurité soit réalisée par l’utilisateur, à une main (cas de certaines aiguilles protégées, d’épicrâniennes) ou à deux mains (cas de certaines épicrâniennes, corps de prélèvement ou seringues double corps…).
Une étude menée par les chercheurs du Geres, publiée en avril dernier
En dépit des limites de l’étude, les auteurs estiment que les dispositifs de sécurité automatique sont les plus efficaces pour la prévention des AES. Ils sont aussi les plus coûteux, ce qui peut représenter un obstacle à leur utilisation dans les établissements de santé. Leur éventuel surcoût pourrait être compensé par une diminution des AES et par un moindre besoin de former les soignants à leur utilisation.
(1) Geres, www.geres.org.
(2) Le denier rapport du Raisin sur le site de l’InVs : http://www.invs.sante.fr/publications/ 2009/raisin_surveillance_aes/raisin_surveillance_aes.pdf.
(3) Role of safety-engineered devices in preventing needlestick injuries in 32 french hospitals, Infection Control and Hospital Epidemiology, january 2007, vol. 28, n° 1.
(4) Needlestick injury rates according to different types of safety engineered devices, Infection Control and Hospital Epidemiology, april 2010, vol 31, n° 4.
Le Geres organise sa 20e journée annuelle le 10 décembre à la faculté de Médecine Xavier-Bichat dans le XVIIIe arrondissement de Paris. Au programme : la surveillance AES-Raisin, les résultats de l’enquête Vaxisoin, la présentation de l’édition 2010 du guide des matériels de sécurité, les AES dans les Ehpad…