La réanimation : un environnement difficile | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 194 du 01/03/2011

 

Actualités

Sylvie Gervaise  

PRÉVENTION → L’Académie nationale de médecine a consacré, le 22 février dernier, une session aux unités de réanimation. Si elles sont souvent le lieu où se jouent des enjeux médicaux majeurs, elles sont également à l’origine de traumatismes psychosociaux particulièrement délétères, tant pour les patients que pour les familles.

Les facteurs de stress pour les patients en réanimation tiennent à l’aspect très médicalisé des soins, aux différents matériels, sondes, perfusions, ou appareils de monitoring. Mais le niveau sonore est aussi d’une toxicité mentionnée par de nombreux malades, qui évoquent des conversations à voix haute, des bruits de pas à toute heure du jour et de la nuit, tout comme les alarmes. Pour 50 % des patients la douleur est encore source de pénibilité, suivie par l’inconfort et la soif.

Répercussions psychologiques

Les retentissements de ces différents traumatismes sur les patients sont multiples. Ils sont d’ordre psychologique, voire psychiatrique. On apprend que 15 % des patients hospitalisés en réanimation ont peur d’être assassinés, 10 % d’être abandonnés, 30 % décrivent des hallucinations, 37 % des sensations de mort imminente, et 54 % ont un sentiment d’étouffement. Ils présentent également des syndromes dépressifs, des troubles de la conscience ou du sommeil.

En ce qui concerne les professionnels, la gravité des situations, les gardes, le nombre d’heures de présence, la densité et la complexité des soins sont autant de facteurs de pénibilité qui peuvent amener médecins et personnels paramédicaux à un syndrome d’épuisement professionnel.

L’Académie nationale de médecine a élaboré un certain nombre de recommandations pour améliorer une situation complexe et douloureuse.

Préparer les familles

Dans ce cadre, l’implication et la présence des familles auprès des patients hospitalisés en réanimation sont encouragées, mais après que celles-ci ont été préparées, pour éviter qu’elles ne soient traumatisées par un environnement hostile. Lorsque l’entourage proche des malades est sollicité pour échanger en amont d’une décision progressive d’arrêt de traitement actif et que des temps de parole lui sont proposés, l’anxiété et la dépression en sont diminuées.

Pour les professionnels, des groupes de parole sont préconisés, des réunions aident à réduire les tensions, et leur implication dans les prises de décisions graves est un moyen de valoriser leur travail et de montrer la reconnaissance de leur mission.

Le type de management du cadre est primordial, alliant la nécessité de structurer et d’organiser les soins, d’apporter les référentiels et les procédures adaptés, de repérer les situations difficiles, et d’anticiper les conséquences en prévoyant des groupes de réflexion et en animant des réunions malgré un contexte difficile.

Une réflexion en équipe pluridisciplinaire associée à un vrai projet de service peuvent limiter l’impact douloureux d’un séjour en réanimation, tant pour les patients que pour les familles et les soignants. L’équipe de réanimation de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP) par exemple y travaille depuis plus de quinze ans, légitimant le rôle de partenaire à part entière de chacun des professionnels.