Une infirmière installée à l’Assemblée nationale - Objectif Soins & Management n° 196 du 01/05/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 196 du 01/05/2011

 

NATHALIE SIX BAVAY

Parcours

Joëlle Maraschin  

Depuis trois ans, Nathalie Six Bavay fait partie de l’équipe infirmière installée au Palais Bourbon. Après un parcours en tant qu’infirmière puis infirmière anesthésiste en milieu militaire et civil, elle s’accomplit aujourd’hui dans le poste d’assistante médicale à l’Assemblée nationale.

Lorsque Nathalie Six Bavay tente en mars 2008 le concours très sélectif d’entrée à l’Assemblée nationale, elle ne se doute pas un seul instant du nouveau métier qu’elle va exercer. « Après avoir connu l’univers hospitalier public et le travail en clinique privée, j’aspirais à une vie plus réglée, confie-t-elle. Cependant, mes missions à l’Assemblée nationale sont extrêmement variées. » Les permanences du cabinet médical de l’Assemblée nationale sont assurées par trois infirmières expérimentées et deux médecins, un médecin de soins et un médecin de prévention pour le personnel de l’Assemblée nationale. L’équipe est en priorité au service des parlementaires, mais elle assure également les urgences pour le public accueilli dans l’enceinte du Palais Bourbon. « Ma première intervention était une grossesse extra-utérine rompue. Si je n’avais pas eu toutes ces années d’expérience, je n’aurais sans doute pas su réagir face à cette urgence vitale », se souvient-elle.

Nathalie Six Bavay considère que les compétences acquises au cours de sa carrière lui sont indispensables pour assurer ses missions. Car, à côté de la gestion des situations d’urgence, elle consacre une partie de son activité aux soins mais aussi à la prévention et à l’éducation sanitaire. Très occupés par leurs missions, les députés disposent en effet de peu de temps pour penser à leur santé. « Nous intervenons pour organiser au mieux leurs rendez-vous de consultations spécialisées ou d’examens complémentaires. Il s’agit en fait de prendre en compte les contraintes d’emploi du temps des parlementaires tout en les accompagnant dans leur parcours de santé », explique-t-elle. Lorsque les députés siègent, l’une des trois infirmières se trouve en permanence au cabinet.

Compte tenu de leur rôle, ces professionnelles de santé bénéficient de formations avec le Samu et travaillent en collaboration avec la brigade des sapeurs-pompiers. Elles sont en première ligne pour intervenir en cas d’urgence ou de situation de crise. « C’est très valorisant pour une infirmière de travailler à ce poste d’assistante médicale. D’une part, le Palais Bourbon est un lieu magnifique. Et, surtout, les relations humaines avec les parlementaires sont enrichissantes. Loin d’abuser de leur position, les députés respectent beaucoup le travail que nous faisons », ajoute Nathalie Six Bavay.

Des maladies infectieuses à l’anesthésie

Diplômée d’État en 1991, Nathalie Six Bavay a fait partie de la dernière promotion du Centre d’instruction des infirmières militaires (CIIM) de Paris. « J’ai aussi passé avec succès les concours civils, mais j’ai choisi l’école militaire car c’était une toute petite promotion d’étudiants en soins infirmiers. Par ailleurs, c’était la seule école à rémunérer ses étudiants », précise-t-elle. Elle considère avoir la chance de bénéficier d’une formation initiale dans des conditions plus qu’idéales. « La dernière année, nous étions seulement treize étudiants dans la promotion », continue-t-elle.

À l’issue de sa formation, elle est affectée dans le service des maladies infectieuses et tropicales de l’Hôpital d’instruction des armées Begin, à Saint-Mandé (94). Nous sommes à cette époque en pleine épidémie de sida. « J’ai adoré le travail au sein de ce service, mais c’était vraiment difficile pour une jeune infirmière, se rappelle-t-elle. Il y avait beaucoup de décès, des personnes encore plus jeunes que je ne l’étais à l’époque. »

Au bout de deux ans, Nathalie Six Bavay demande à changer de service. Elle travaille alors plusieurs mois en ORL avant d’être mutée à l’hôpital militaire Sainte-Anne de Toulon. Cette fois-ci, c’est elle qui choisit son service d’affection, en l’occurrence le service de réanimation polyvalente de l’hôpital militaire. Elle y reste deux années puis passe le concours pour devenir Iade.

Elle suit alors la formation au Centre d’instruction des infirmiers anesthésistes diplômés d’État (CIIADE) de Toulon. « Je me suis aperçue que j’aimais vraiment les soins techniques infirmiers. D’autant plus qu’il m’était de plus en plus difficile d’être confrontée à la mort. En anesthésie, il n’y pas le même attachement affectif. Ce choix de devenir Iade, c’était certes pour évoluer dans ma carrière, mais également pour me protéger », reconnaît-elle.

Un épanouissement professionnel

Iade, Nathalie Six Bavay est alors mutée à l’Hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce à Paris. « Ce sont mes plus belles années professionnelles, je me suis épanouie dans ce service », dit-elle aujourd’hui. Elle travaille au bloc en qualité d’infirmière anesthésiste référente en neurochirurgie puis en chirurgie vasculaire et viscérale. Elle se souvient de conditions de travail extraordinaires, d’une hygiène irréprochable, d’une équipe solidaire, d’un cadre infirmier humain et professionnel, soucieux du bien-être de son personnel autant que de l’activité de son service et de la prise en charge des patients.

Cinq ans plus tard, le mari de Nathalie, également militaire, est muté dans le sud de la France. Elle décide alors de quitter le service de santé des armées. La famille s’installe dans le Lubéron, où Nathalie est recrutée dans un centre hospitalier du Vaucluse. Et là, elle découvre avec stupéfaction une toute autre façon de travailler. « Au Val-de-Grâce, nous n’utilisions que du matériel à usage unique. Mais, dans ce petit hôpital de province, nous devions encore nous contenter de champs en tissu, par exemple, s’émeut-elle. Une telle disparité de soins m’a vraiment déconcertée. »

Devant ces conditions de travail, elle préfère quitter l’établissement au bout d’un an pour un nouveau poste dans un pôle privé public d’un autre hôpital du département. Elle retrouve enfin une manière de travailler plus conforme à ses aspirations. Mais son mari est de nouveau muté dans une autre ville, à Angers. Et la surprise est de taille pour Nathalie, qui ne trouve aucun poste d’infirmière anesthésiste. Après quelques mois de chômage, une situation qu’elle vit très difficilement, elle obtient un poste en clinique. Mais elle a du mal à supporter l’état d’esprit du secteur privé, la notion de patientèle et surtout de rentabilité. « Cela peut entraîner des glissements de tâches qui sont contraires à notre décret de compétence infirmier », estime-t-elle.

En dépit de sa passion pour le métier d’infirmière anesthésiste, elle tente alors le concours de l’Assemblée nationale pour changer de voie professionnelle. Elle est reçue et, depuis, sa vie s’organise différemment. Son mari et ses trois enfants restent à Angers, et elle fait le choix de travailler à Paris. Elle effectue les trajets le plus souvent possible. Nathalie Six Bavay bénéficie d’un certain équilibre et ne s’en plaint pas. Aujourd’hui, à 42 ans, elle a enfin trouvé un nouvel élan professionnel.