L’hôpital s’approprie les outils du secteur privé - Objectif Soins & Management n° 198 du 01/08/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 198 du 01/08/2011

 

Actualités

Sandra Serrepuy  

GOUVERNANCE HOSPITALIÈRE → Peu à peu, les établissements hospitaliers adoptent les méthodes du secteur privé pour redresser la barre de leur situation financière et mener une politique d’efficience. Un virage culturel s’opère progressivement.

« L’hôpital est bien une entreprise. » Filippo Monteleone, directeur général de la Générale de santé, travaille, il est vrai, au sein d’un groupe de cliniques privées. Il n’empêche, pour lui, l’hôpital, même lorsqu’il est public, reste une entreprise. De son point de vue, il importe de différencier le statut de l’établissement de ses missions. C’est en tout cas ce qu’il s’est efforcé d’expliquer lors du colloque annuel Économie de l’hôpital le 24 juin dernier. André Guinet, directeur général de l’Hôpital américain de Paris, ne dit pas autre chose quand il explique qu’un « directeur d’établissement ne peut pas réussir s’il n’a pas de bonnes relations avec le corps médical ». Raison pour laquelle ce directeur a fait le choix d’impulser une culture du résultat aux médecins qui interviennent dans son établissement, en les mettant en position de prendre des décisions et en leur fixant des résultats annuels, mesurés en permanence.

« L’hôpital a toujours porté cette contradiction : l’accueil de tous et la nécessité d’être rentable », remarque pour sa part Olivier Babinet, directeur du plan de retour à l’équilibre au CHU de Saint-Étienne. Et de remarquer que l’hôpital, peu à peu, adopte les outils du monde industriel. Dans ce cadre, les établissements recourent, quand c’est possible, à la sous-traitance. André Guinet suggère même d’externaliser tout ce qui n’est pas « cœur de métier ». « Quand on arrive à externaliser, par une meilleure gestion, on peut arriver à gagner 5 à 8 % de rentabilité », promet-il.

Les pouvoirs publics eux-mêmes ont appuyé cette dynamique jusqu’ici propre au monde de l’entreprise, en créant l’Agence nationale d’aide à la performance (Anap). La performance : une terminologie du monde concurrentiel, assurément. « Personne ne peut s’opposer à l’amélioration de la prise en charge des patients, c’est-à-dire à la performance opérationnelle. Mais le passage à la performance économique est un choc », assure Olivier Babinet. Qui poursuit : « Les gens n’arrivent pas à admettre que l’hôpital a besoin d’être à l’équilibre, ne serait-ce que pour trouver son autonomie financière et avoir des marges d’exploitation permettant d’investir. » Les établissements ont dans ce cadre besoin de plans de retour à l’équilibre, de certifier leurs comptes et doivent résoudre les carences des systèmes d’information.

C’est dans ce contexte général que le chef de l’État, Nicolas Sarkozy, avait souhaité en avril 2008 que l’hôpital ait « un patron et un seul ». Une « erreur politique », selon Benoît Péricard, directeur de l’activité santé au sein du cabinet KPMG. À l’époque, médecins et directeurs d’établissements venaient d’entamer une nouvelle méthode de travail, issue de la réforme Mattéi [plan Hôpital 2007, ndlr]: les services s’étaient regroupés en pôles d’activité, une nouvelle gouvernance hospitalière était en marche. Même si c’était « une bonne idée que de déplacer le centre de gravité de l’administration vers les pôles », considère Olivier Babinet, à ce moment-là, « les gestionnaires ont eu le sentiment de perdre leur pouvoir décideur ». L’hôpital, une entreprise ou un lieu de pouvoir ?

brèves

À savoir…

ESCHERICHIA COLI ECEH

UNE ENVELOPPE POUR LA RECHERCHE

La Commission européenne a annoncé début août qu’elle allait débloquer un peu plus de 12 millions d’euros pour financer de nouveaux projets de recherche pour mieux appréhender les infections à E. coli ECEH, bactérie qui avait contaminé quelques milliers de personnes à travers l’Europe et entraîné la mort de dizaines de personnes. En outre, un consortium international de recherche baptisé Antigone (pour Anticipating the global onset of novel epidemics) devrait entamer dès l’automne des travaux de recherche afin d’obtenir une description aussi complète que possible de cette nouvelle souche d’E. coli et d’une série d’autres agents pathogènes virulents qui pourraient menacer la santé humaine (la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, Ébola, le Syndrome respiratoire sévère aigu, Sras, la peste ou encore la fièvre Q).

CHIKUNGUNYA

UN VACCIN POUR BIENTOT ?

Chaque année, le virus du Chikungunya fait des milliers de victimes en Asie du Sud-Est et en Afrique. Des scientifiques américains de l’université du Texas ont développé un vaccin expérimental qui a réussi à protéger des souris du virus. Ce nouvel essai, s’il est validé chez l’homme, pourrait permettre de ralentir la propagation du virus, sa production étant, selon les chercheurs « économiquement bon marché ».