Orthogénie : respecter la confidentialité - Objectif Soins & Management n° 199 du 01/10/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 199 du 01/10/2011

 

Cahier du management

Antoinette Brousse*   Sophia Hafidou**   Madeleine Collombier***   Carine Piotrowski****   Jacqueline Durand*****   Anne Saouter******  

Au centre hospitalier de Mayotte (CMH), on s’interroge sur le respect de la confidentialité en consultations d’orthogénie. Un groupe de réflexions éthiques a été sollicité pour prendre en compte les demandes des usagers. Une réflexion engagée qui induit un questionnement de l’établissement dans sa globalité.

Insatisfactions, réclamations orales, constat des professionnels de santé, remarques désobligeantes, voire jugements de valeur des autres consultants (« ce sont les gens qui vont tuer les bébés »), ont conduit le cadre de santé du service d’orthogénie du CHM à très vite s’interroger sur les conditions d’accueil et de travail de ce service.

LE CœUR DE L’ACTION

Au CHM(1), le groupe de réflexion éthique(2) a pour missions de permettre aux soignants d’acquérir un réflexe de questionnement et d’améliorer la pratique des soins dans les diversités culturelles. Il est aujourd’hui un espace de parole important, reconnu institutionnellement et formalisé dans l’établissement.

La réflexion éthique conduit à faire preuve d’imagination et d’audace. Placer la personne en demande de soins comme le cœur de l’action induit concevoir l’organisation complète de multiples compétences, revendiquer un “penser autrement” par la remise en cause de toutes les habitudes(3). C’est s’engager à se mettre au service de la personne en demande de soins.

HISTORIQUE

L’établissement public de santé territorial de Mayotte est très récent puisqu’il a été créé par l’arrêté préfectoral du 8 mars 1997 qui rend son existence juridique effective le 1er avril 1997. Jusqu’à cette date, la santé était un service de la préfecture de Mayotte. Les hôpitaux de Mayotte étaient alors constitués des deux sites, à Mamoudzou et Dzaoudzi.

L’ordonnance du 20 décembre 1996 soumet, sous réserve de certaines adaptations, la collectivité départementale de Mayotte au Code de la Santé publique.

La caisse de prévoyance sociale devient la caisse de Sécurité sociale de Mayotte en avril 2005. Le régime de Sécurité sociale de Mayotte est une version allégée par rapport à la métropole : il n’existe pas de couverture maladie universelle, ni d’aide médicale de l’État pour les non-assurés, sauf pour les personnes évacuées sanitaires à la Réunion ou en métropole.

La loi organique du 21 février 2007 constitue pour l’heure l’ultime étape vers le droit commun. Désormais, tout le Code de la Santé publique s’applique à Mayotte, mais avec des particularités concernant les transports sanitaires et la dispensation des médicaments.

Depuis le 1er avril 2010, le CHM relève pour sa gestion et son financement de l’autorité de l’agence régionale de santé de l’océan Indien.

Contexte socio-démographique

La population mahoraise est issue d’un métissage entre les populations d’origine bantoue et les différentes vagues d’immigration, surtout malgache. En 35 ans, cette population a été multipliée par cinq pour atteindre 186 452 habitants au dernier recensement de 2007. Elle serait aujourd’hui autour de 200 000. L’île se caractérise par une forte densité de population : 430 habitants au km2 contre 107 en métropole.

La natalité élevée et l’immigration, essentiellement clandestine, en provenance des îles voisines (Anjouan en particulier), sont à l’origine de cette croissance démographique très importante. Le taux d’accroissement annuel moyen enregistré entre les deux derniers recensements est de 4,1 %. La population mahoraise est jeune : 56 % ont moins de 20 ans, pourcentage le plus élevé de tous les territoires français (24 % en France). En 2000, l’illettrisme français concernait 35 % des hommes et 40 % des femmes. À cette difficulté de langue s’ajoute une difficulté d’écriture : l’écriture arabe est enseignée dans les écoles coraniques en shimaoré alors que l’écriture romane n’est enseignée que dans les écoles françaises.

Contexte sanitaire

La culture française occidentale diverge totalement de la culture et des mœurs mahoraises. Rappelons que la religion islamique (teintée d’animisme(4)) concerne 95 % de la population et que 36,8 % des plus de 15 ans ne parlent pas français (source : Insee 2007). Ainsi les principales difficultés rencontrées en consultation médecine sont-elles liées au problème de la langue et de la traduction. Il faut souligner que l’interprète (le plus souvent des ASH) traduit plus qu’une langue : il traduit aussi une culture. Il montre ce qu’il veut bien, ce qu’il a compris de ce qu’on veut étudier. Ce qui peut entraîner certains biais et certains problèmes très concrets(5).

Contexte hospitalier en reconstruction

Il y a dix ans, le site principal de Mamoudzou était constitué de bâtiments épars, à un seul niveau, reliés par des galeries en bois. À ce jour, pratiquement l’ensemble des services d’hospitalisation ont aménagé dans des locaux bien pensés, offrant une qualité d’hébergement égale à la plupart des établissements métropolitains. La dernière tranche de reconstruction (début des travaux 2012) mettra à neuf les services médicotechniques, le bloc opératoire et les consultations spécialisées. La consultation d’orthogénie est située dans un ancien bâtiment de l’hôpital. Ses 30 m2 sont encastrés entre le service Evasan(6) et les consultations ORL/OPH. La terrasse fait office de salle d’attente mais également de lieu de passage pour toutes les personnes qui se rendent au service Evasan ou au restaurant du personnel.

QUELLE CONCILIATION ENTRE ÉTHIQUE ET CULTURE LOCALE ?

À Mayotte, la culture et la religion sont étroitement associées. Pour la religion musulmane comme pour la religion chrétienne, l’interruption volontaire de grossesse (IVG) n’est tolérée que si elle est thérapeutique(7). Pour la religion chrétienne, l’avortement est fortement condamné(8). Pour autant, si l’IVG n’est pas conforme à la religion, les femmes qui y ont recours ont droit à la confidentialité. Dans l’islam, elle est recommandée pour tout acte qui est du domaine de l’intimité des gens : un musulman doit être pudique. Dans ce contexte culturel, la femme enceinte en demande d’IVG assume, souvent seule, son choix. Selon le médecin responsable de l’unité fonctionnelle d’orthogénie, il y a eu en 2009 :

→ 43 millions d’IVG enregistrées dans le monde,

→ 200 000 en France métropolitaine, soit 20,1 IVG pour 100 conceptions,

→ 1 735 à Mayotte, 18 IVG pour 100 conceptions.

De nombreuses IVG seraient liées à des facteurs psychosociaux : projets scolaires, contraintes financières, absence du conjoint. Il n’est pas rare de voir à Mayotte un homme avec plusieurs épouses qui lui assurent sa descendance, mais qui l’obligent aussi à partager son salaire dans les différents foyers, l’épouse se débrouillant pour nourrir et élever quasiment seule ses enfants.

ORGANISATION DE LA CONSULTATION

Un médecin de PMI ou un médecin de centre de consultations médicales adresse la femme à la consultation d’orthogénie. Le rendez-vous est alors inscrit soit dans le carnet de santé, soit, s’il n’y a pas de carnet, sur une fiche commune IVG.

Le carnet de santé mérite justement une attention particulière. Il y a quelques décennies encore, la culture orale était dominante à Mayotte. L’identité de la personne, son origine géographique, ses liens de parenté étaient connus sans obligatoirement être écrits sur papier. L’organisation du système de santé a généralisé l’emploi du carnet de santé où figurent les informations habituelles sur la personne, mais aussi des données confidentielles comme des données sur la famille, ou encore des demandes d’IVG. Une partie de l’histoire personnelle et intime de l’individu est donc donnée à la lecture du personnel soignant, mais aussi parfois à d’autres agents de l’État. Ainsi, brandi comme une pièce attestant de son identité, le carnet de santé peut d’ailleurs faire l’objet d’un marché illicite à l’adresse des populations clandestines qui se voient ainsi la possibilité de passer “inaperçues”. Dans ces conditions, on comprend bien la valeur que ce carnet de santé a acquise dans l’esprit des gens. Alors qu’aucun adulte métropolitain se munit de son carnet de santé – et l’a-t-il encore ? – pour toute consultation médicale, les adultes de Mayotte le conservent comme un précieux document, toute leur vie.

Mais, pouvant être régulièrement consulté par d’autres, est-il indispensable que des épisodes intimes, douloureux, comme une IVG, y figurent ? Pour une jeune fille ou une femme, il peut facilement être consulté par les parents ou un conjoint. On voit bien ici que la problématique ne vient pas de l’outil lui-même, mais de la dérive de son utilisation.

Munie de ce carnet, la consultante arrive au bureau des entrées, pratique identique à la métropole. L’agent du bureau des entrées établit un bon de circulation comme pour tous les patients et oriente la personne jusqu’à la salle d’attente. La varangue, terrasse couverte, est le lieu qui fait office de salle d’attente.

La varangue accueille les consultant(e)s, et est donc dans la sphère publique. Elle reproduit cette fonction de l’espace qui est la convivialité. En témoignent d’ailleurs – ce qui n’est pas sans surprendre tout métropolitain séjournant à Mayotte – les heures d’attente passées en ce lieu sans qu’il y ait de la part des individus beaucoup de manifestation d’impatience ou d’énervement : les gens s’y retrouvent, se reconnaissant, s’échangent des nouvelles de la famille et du voisinage, etc. Quand la faim se fait ressentir, la nourriture sort des sacs. Le temps passé à attendre n’est pas de l’ordre du temps perdu, il est celui qui entretient le lien social. Pas étonnant de constater aussi que la fixation des rendez-vous semble ne servir à rien : convoqué(e) à 11 heures mais présent(e) dès 6 heures… Mais, encore une fois, le temps d’attente qui s’ensuit est envisagé comme une occasion d’activer les relations sociales.

Difficile alors d’imaginer cette varangue-salle d’attente comme un lieu pouvant être confidentiel. Ce n’est pas au niveau de sa matérialité qu’on peut donc trouver des solutions pour respecter une confidentialité néanmoins demandée par certaines. Le voile, élément vestimentaire traditionnel, peut – comme cela est parfois le cas – assurer l’anonymat. Cependant, cela ne saurait suffire à garantir la sérénité des consultantes qui se sentent jugées, car repérables dans leur démarche. Le lieu de consultation est identifié : orthogénie/Dr X. L’agent d’accueil appelle les consultantes à haute voix par leur nom. Dans cet espace de consultation, le personnel présent se compose d’un médecin, d’une secrétaire et d’un agent d’accueil qui assure aussi la traduction.

RÉFLEXIONS ÉTHIQUES

Le groupe éthique du CHM est né en 2006. Ses seize membres, tous titulaires d’un diplôme universitaire d’éthique et responsabilité, participent activement à des travaux institutionnels en lien avec l’éthique soignante, organisent des tables rondes sur des sujets proposés par des professionnels de santé, participent sur invitation à des réunions de service, sont force de proposition de rédaction de protocoles et/ou procédures. L’aspect culturel et religieux tient une grande place dans la gestion du soin à Mayotte. Quels sont les textes législatifs qui font référence au sujet traité ?

L’IVG a été légalisée en 1975 par la loi Simone Veil. Cette loi permettait enfin de mettre un cadre juridique à cette activité, tant pour le respect de la personne que pour le personnel médical et paramédical confronté à la prise en soins de ces patientes. Au fil des années, des remaniements juridiques ont vu le jour, notamment la loi Aubry du 27 juin 2001, rallongeant le délai légal de l’avortement à 12 semaines de grossesse (14 semaines d’aménorrhée). Cependant, la loi de démocratie sanitaire de 1981 a permis aussi de garantir et de légiférer la confidentialité de la personne soignée, thème qui nous a été cher dans la réflexion éthique que nous avons menée. Nous nous sommes évidemment basés sur la charte éthique de la personne soignée de notre établissement(9). L’article 9.2 de cette charte garantit le respect de la confidentialité en toutes circonstances. Cet article est d’ailleurs en totale adéquation avec le Code de la Santé publique et surtout l’article L. 1110-4 qui stipule que « toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant ».

Notre groupe étant composé essentiellement de soignants, nous nous sommes intéressés aussi aux règles déontologiques de la profession d’infirmière concernant le respect de la confidentialité et le devoir du secret professionnel. Le décret du 29 juillet 2004 relatif aux règles et codes déontologiques avait largement sa place dans notre travail de recherche.

Les articles R. 4312-2 et R. 4312-4 énoncent le respect de la dignité et l’intimité du patient, le devoir de secret professionnel, l’article R. 4312-5, celui de la confidentialité des soins dispensés.

S’appuyer sur des textes de lois pour appréhender la notion de confidentialité est une assise importante dans la poursuite de notre recherche. Conduire une réflexion sur la confidentialité en orthogénie nous a semblé nécessaire au vu du constat annoncé par le cadre. Comme pour toute problématique, et afin de vérifier si le questionnement est d’ordre éthique, une enquête s’est avérée incontournable.

L’ENQUÊTE

Quel outil d’enquête ?

Une observation

Dans le contexte actuel, elle est inappropriée, nous n’aurions rien appris de plus que ce qui nous avait été déjà tracé :

→ nous savons, pour le voir tous les jours, que les professionnels de santé passent par la salle d’attente de consultations ORL/OPH/Orthogénie, en faisant du slalom entre les consultants, pour se rendre au restaurant du personnel ;

→ nous savons, pour le voir régulièrement, que certaines femmes se cachent derrière leur voile ;

→ nous savons, pour l’entendre régulièrement, que les consultants sont appelés par leur nom au risque que « Mama Nathalie voit la petite Salama entrer là où “on tue les bébés” »

Un questionnaire

Bien que celui-ci aurait été anonyme, il y a l’engagement laissé par une réponse écrite, mais il y a surtout le fait que la plupart des consultantes qui font appel à l’offre de soins du service public de Mayotte ne parlent ni n’écrivent le français. Environ 40 % de la population maîtrise la langue française et nous aurions dû faire appel à un traducteur avec le risque de biaiser les réponses.

L’entretien

Il nous a semblé le support idéal, d’autant qu’il serait conduit par un professionnel de santé d’orthogénie, mahorais de surcroît, maîtrisant la langue et la culture mahoraise. Quinze personnes volontaires seront rencontrées pour un entretien semi-directif :

→ 8 femmes de 16 et 29 ans, entretenues au secrétariat de consultation ;

→ 5 femmes de 18 à 35 ans, hospitalisées en chirurgie ambulatoire pour IVG, qui ont été reçues précédemment en consultation et peuvent nous donner leur ressenti ;

→ 1 médecin intervenant ce jour en orthogénie ;

→ 1 infirmier de chirurgie ambulatoire.

Deux questions ouvertes :

→ Que pensez-vous de l’accueil en consultation d’orthogénie ?

→ Si nous devions nous améliorer, que proposeriez-vous ?

Pour le groupe, la question de fond repose sur le pourquoi de cette insatisfaction : est-elle liée au lieu de consultation, au parcours patient ?

→ 13 personnes sur 15 pensent que la confidentialité n’est pas assez respectée en consultation et qu’il faudrait en revoir l’organisation ;

→ 9 sur 15 souhaitent que la consultation d’orthogénie soit loin du regard des autres consultants ;

→ 2 sur 15 sont indifférents.

Trois problématiques se profilent :

→ défaut de confidentialité lié à l’espace géographique : le lieu ou salle d’attente des consultations d’orthogénie ;

→ défaut de confidentialité par la transcription de demande d’IVG sur le carnet de santé ;

→ défaut de confidentialité par l’appel nominatif des consultantes par l’agent d’accueil.

Interrogé, le médecin responsable de l’unité d’orthogénie pense également que l’organisation du parcours patient doit être revue afin de permettre aux consultantes d’appréhender le plus sereinement possible leur situation. « Une règle fondamentale de l’intervention est le non-jugement, l’acceptation des valeurs et du mode de vie d’autrui. »(10) Or, d’après l’enquête, les consultantes se sentent jugées. Comment pouvoir alors appréhender le plus sereinement possible leur situation ?

VERS UN RESPECT DE LA CONFIDENTIALITÉ

Le groupe a exposé ses constats en table ronde, devant des membres de la direction, du corps médical, paramédical et des représentants des usagers. L’objectif étant, d’une part, de faire prendre conscience de cet état d’insatisfaction ressentie tant par les usagers que les professionnels de santé et, d’autre part, à partir des dysfonctionnements observés, quels sont ceux sur lesquels on peut agir et comment ?

Réponses apportées

Pour le défaut de confidentialité lié à l’espace géographique, une salle d’attente sans intimité, lieu de passage pour toutes les personnes qui se rendent au service Evasan et au restaurant du personnel :

→ nous avons modifié les accès au service Evasan et restauration des personnels, la salle d’attente n’est donc plus un couloir de passage mais un réel lieu d’attente ;

→ les salles d’attente ORL/OPH/Orthogénie deviennent une salle d’attente commune. Un consultant ORL peut attendre devant la consultation d’orthogénie et vice versa ;

→ simultanément, dans la mesure où l’activité du médecin responsable de l’unité d’orthogénie n’est pas uniquement centrée sur les IVG mais aussi sur des échographies de référence de diagnostic anténatal, l’appellation de sa consultation est modifiée, et devient “consultation d’orthogénie, échographie de grossesse”.

Pour le défaut de confidentialité lié aux transcriptions sur le carnet de santé :

→ jusqu’à ce jour, une consultante se présente au bureau des entrées avec son carnet de santé sur lequel est inscrit soit un rendez-vous de consultation, soit un rendez-vous d’hospitalisation. Nous avons travaillé en collaboration avec les responsables du bureau des entrées pour la mise en place, sur le CHM, des pré-admissions d’hospitalisation, le but étant de simplifier le circuit des patients programmés en chirurgie ambulatoire. Désormais, dès qu’une femme sera reçue en consultation orthogénie et qu’une hospitalisation pour IVG sera programmée, sera utilisée une fiche de programmation mise au format du carnet de santé, agrafé dans celui-ci. La secrétaire devra remplir un formulaire de pré-admission en précisant date, heure, service d’hospitalisation, programmera un rendez-vous avec le bloc opératoire et enverra ce formulaire au bureau des entrées. Le jour et l’heure de l’hospitalisation programmés, la personne en demande de soins se présente directement dans le service. Les infirmiers confirment son admission au bureau des entrées. Nous pouvons donc ainsi, limiter une partie du défaut de confidentialité ;

→ la transcription existe encore, parfois, entre la déclaration de grossesse et la consultation d’orthogénie. Nous avons vu, en début d’article, que le rendez-vous pouvait être transcrit soit sur le carnet de santé, soit sur une fiche de rendez-vous. Le médecin responsable de l’unité d’orthogénie, partenaire très impliqué dans cette réflexion éthique, a travaillé sur un document intitulé “Fiche de liaison accueil nouvelle grossesse”, commune à toutes les femmes enceintes qui désirent ou non garder leur bébé. Cette fiche sera conservée dans le dossier patient.

Pour le défaut de confidentialité par l’appel nominatif des consultantes par l’agent d’accueil :

→ nous proposons la mise en place d’un système d’appel par numéro, principe en vigueur dans divers centres de consultations périphériques (dispensaires).

Les limites

→ L’utilisation du document intitulé “Fiche de liaison accueil nouvelle grossesse”, et la non-transcription de renseignement d’ordre privé tel que “demande d’IVG” dans le carnet de santé induiront un travail en collaboration des professionnels de santé hospitaliers et extra-hospitaliers (centres de PMI, consultations médicales privées, assistantes sociales, consultations de sages-femmes).

→ La mise en place d’un système d’appel par numéro ne satisfait pas, à ce jour, les médecins de consultations. Pour eux, ce serait revenir en arrière et dépersonnaliser les consultants.

CONCLUSION

La réflexion éthique menée par le groupe a ouvert à ce sujet un questionnement institutionnel susceptible de sensibiliser les professionnels de santé au respect de cette confidentialité qui n’est pas restreinte à l’orthogénie. Le partenariat avec les professionnels de santé hospitaliers et extra-hospitaliers, tout corps confondu, les usagers, s’avère nécessaire dès lors qu’il s’agit d’avancer pour le bien de chacun. N’oublions pas que l’éthique, c’est la reconnaissance de l’autre comme semblable à soi, avec ses propres désirs et sa propre liberté. Elle correspond à la socialisation de l’individu et débouche sur les valeurs de justice, d’égalité, de fraternité, etc.

« L’Éthique est une somme de considérations générales que les hommes s’établissent pour pouvoir vivre en société la contradiction de ce qu’ils peuvent faire, de ce qu’ils veulent faire… »(11)

NOTES

(1) Centre hospitalier de Mayotte.

(2) Création du groupe en 2006 cf. Objectifs soins n° 182, article de janvier 2010 et article de novembre 2006.

(3) Éthique et Professions de Santé, rapport au ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées, mai 2003, p. 59.

(4) L’animisme (du latin animus, originairement “esprit”, puis “âme”) est la croyance en une âme, une force vitale, animant non seulement les êtres humains, mais également les animaux et les éléments naturels (pierres, arbres, vent…). Ces âmes ou ces esprits supérieurs (ceux des défunts ou de divinités animales) peuvent agir sur le monde ici-bas, de manière bénéfique ou non, et il convient donc de leur vouer un culte (Animisme, in Jean-François Dortier (dir.), Le Dictionnaire des sciences humaines, éditions Sciences Humaines, Auxerre, 2004, p. 19 (ISBN 2-912601-25-8)).

(5) Extrait tiré de l’introduction du projet médical du centre hospitalier de Mayotte, par le président de la CME, « de l’introduction jusqu’au contexte socio-démographique ».

(6) Évacuation Sanitaire.

(7) Coran, Sourate 14, Voyage nocturne, Verset 31.

(8) Encyclique evangelium vitae par Hansi Brémond.

(9) Charte Éthique de la personne hospitalisée au centre hospitalier de Mayotte, janvier 2010, qui est une analyse, dans le contexte de la culture mahoraise, de la circulaire du 2 mars 2006 relative aux droits des personnes hospitalisées et comportant une charte de la personne hospitalisée.

(10) Danielle Blondeau, Ibid.

(11) Information et consentement du malade. Le secret médical. Pr Charles Honnorat, faculté de médecine de Rennes, module optionnel d’éthique médicale.

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