Objectif Soins n° 200 du 01/11/2011

 

Actualités

Nicolas Cochard  

PROTOCOLES → Aujourd’hui, seuls deux projets de coopération entre professionnels de santé ont reçu un feu vert, mais d’autres sont sur le point d’éclore. Le Salon infirmier témoignait récemment des attentes en la matière.

À force d’être cité, l’article 51 de la loi HPST va finir par être bien connu des professionnels de santé. Au Salon infirmier, deux conférences ont abordé le thème des coopérations, réunissant une belle audience au regard de la complexité du sujet. Où en est-on exactement ? Marie-Andrée Lautru, chef de projet “coopérations” à la DGOS (ministère de la Santé), a livré quelques chiffres. Après « à peu près un an et demi de fonctionnement de cette procédure, la Haute Autorité de santé (HAS) a expertisé, instruit, quasiment une vingtaine de protocoles. Dans les jours qui viennent, cinq ou six auront été autorisés ». Enfin, « entre cinquante et soixante » autres sont « en cours de préparation ». Rappel : un protocole de coopération consiste à confier à un professionnel de santé déterminé certains actes ou compétences réservés habituellement à un autre type de professionnel. Ces dispositifs, par nature dérogatoires, sont autorisés au niveau local par les agences régionales de santé (ARS), après validation par la HAS. Ils doivent répondre à un besoin constaté sur le terrain et apporter une amélioration.

Ainsi, à Marseille, le premier protocole validé en juillet autorise des infirmières volontaires de l’Institut Paoli-Calmettes (IPC) à réaliser des ponctions médullaires en vue d’un myélogramme. Effets espérés, « la libération de temps médical » et « une valorisation de l’expertise des infirmières », explique Michèle Isnardi, directrice des soins à l’IPC. Après une période de formation, le protocole devrait démarrer en décembre prochain. La démarche d’autorisation a pris « un an », constate Michèle Isnardi. « Ce qui prend du temps, c’est le formalisme, l’écriture du dossier », observe de son côté Bruno Anquetil, référent “coopérations” à l’ARS de Haute-Normandie. L’agence a autorisé, le 20 septembre, des manipulateurs radio du CHU de Rouen à réaliser certaines échographies. Un autre projet, portant sur la réalisation de bilans urodynamiques par une infirmière d’urologie, semble en bonne voie. À L’ARS de Haute-Normandie, une conseillère technique en soins, infirmière de formation, accompagne les professionnels dans la constitution de leur dossier. C’est ensuite une personne distincte, dans le champ administratif cette fois, qui instruit le dossier et le soumet à la HAS. Mais toutes les régions n’avancent pas au même rythme. « Pour certaines ARS, les coopérations sont un enjeu fort, tandis que d’autres n’ont pas de rôle moteur », observe Bruno Anquetil. « En France, les situations d’exercice illégal se comptent par centaines, on le sait tous ! », poursuit-il. Dans ce contexte, « le premier souci des équipes soignantes, c’est de travailler dans un cadre sécurisé ». Un souci qui, selon lui, passe bien avant les revendications statutaires ou salariales, thème « qui n’émerge quasiment pas » pour le moment.

Et les ordres ? La loi ne leur donne pas le pouvoir de bloquer un protocole, mais il paraît naturel à Michèle Isnardi comme à Bruno Anquetil de les consulter en amont. Lors d’une autre conférence, Monique Montagnon, ancienne coordinatrice des soins de CHU et experte à la HAS, estimait que « l’ordre infirmier a un rôle à jouer » en matière de repérage des besoins de santé et de validation des compétences. De façon générale, « il faut qu’on aille plus loin », assure-t-elle, entrevoyant à terme le passage à des protocoles nationaux, avec des formations de niveau master, « leviers pour faire émerger des professions intermédiaires », dans la ligne du rapport Hénart-Berland-Cadet. Cette infirmière de formation l’assure : pour cela, « il faudra qu’on se fédère ».