Objectif Soins n° 200 du 01/11/2011

 

Économie de la santé

Didier Jaffre  

ORGANISATION → La planification consiste en une élaboration de normes ou de programmes destinés à orienter, par des mesures incitatives ou impératives, l’action d’opérateurs œuvrant dans un domaine déterminé. Mais aussi en une définition des objectifs à atteindre au cours d’une période de référence et des moyens nécessaires à leur réalisation (enveloppes financières limitatives).

Dans le secteur médico-social, la planification prend essentiellement la forme de schémas d’organisation et de plans adoptés par les autorités administratives en charge de leur pilotage. L’article L.312-4 du Code de l’Action sociale et des familles pose les objectifs généraux des schémas d’organisation sociale et médico-sociale :

→ identifier le niveau et l’évolution des besoins sociaux et médico-sociaux de la population ;

→ dresser un bilan quantitatif et qualitatif de l’offre sociale et médico-sociale existante ;

→ déterminer les perspectives et les objectifs de développement de l’offre sociale et médico-sociale et, notamment, ceux nécessitant des interventions sous forme de création, transformation ou suppression d’établissements et services ;

→ préciser le cadre de la coopération et de la coordination entre les établissements et services sociaux, médico-sociaux et sanitaires ;

→ définir les critères d’évaluation des actions mises en œuvre dans le cadre de ces schémas.

TROIS ÉCHELONS DE PLANIFICATION

En matière de planification, la loi HPST du 21 juillet 2009, en établissant des Agences régionales de santé (ARS) compétentes notamment dans le champ médico-social, a opéré à une “nouvelle donne” en créant une planification régionale en sus de l’échelon départemental. Désormais, on compte trois échelons de la planification sociale et médico-sociale : national, régional et départemental.

National

Sur proposition de la Caisse nationale de la solidarité et de l’autonomie (CNSA) lorsque le domaine traité entre dans son champ de compétences, comme par exemple le schéma national d’organisation sociale et médico-sociale pour le handicap rare 2009-2013.

Régional

Le projet régional de santé (PRS) dont le schéma régional d’organisation médico-sociale (SROMS) et les programmes associés relevant de l’agence régionale de santé ; les schémas régionaux arrêtés par les préfets de région.

Départemental

les schémas relevant de la compétence du conseil général.

LE PROJET RÉGIONAL DE SANTÉ (PRS)

L’ARS doit élaborer un PRS qui définit pour cinq ans les objectifs et les priorités de santé pour la région visant à améliorer la santé de la population en réduisant les inégalités de santé, et l’efficience du système de santé régional dans le respect de l’Ondam. Il définit ses priorités pour cinq ans. Il couvre tous les secteurs de la prévention, de l’organisation des soins hospitaliers et ambulatoires, de l’organisation médico-sociale. Il développe une vision transversale de ces secteurs en cohérence avec le parcours de vie des personnes. Il est articulé avec les autres politiques de santé des autres acteurs.

Le PRS donne les grandes lignes de la politique de l’Agence, qui seront ensuite déclinées dans les trois schémas. Il comporte :

→ une évaluation des besoins de santé et leur évolution (démographie, état de santé de la population, inégalités sociales et territoriales de santé…): Observatoire régional de la Santé (ORS), Insee ;

→ une analyse de l’offre et son évolution prévisible : Schéma régional de l’organisation des soins (Sros), études Centre régional pour l’enfance et l’adolescence inadaptée (CREAI), Programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie (Priac) et Plan régional de santé publique (PRSP);

→ des objectifs en matière de prévention, d’accès aux soins, de réduction des inégalités, de respect du droit des usagers ;

→ des mesures de coordination avec les autres politiques ;

→ un suivi et une évaluation de sa mise en œuvre.

La mise en œuvre du PRS reste un vrai défi. Elle suppose la coordination étroite d’acteurs qui se connaissent mal et font face à des situations souvent complexes. Ce n’est que le début de « nouvelles façons de faire » qui demanderont plusieurs années pour faire évoluer les mentalités, les logiques, les structures et les formations des personnels.

LA NOUVELLE PLANIFICATION DANS LE SECTEUR MÉDICO-SOCIAL

Moyens financiers

La planification doit se traduire opérationnellement dans l’affectation de moyens aux priorités identifiées dans les schémas.

L’autorité compétente prévoit les moyens financiers nécessaires au financement des objectifs retenus dans le Schéma régional d’organisation médico-sociale. La traduction financière de la planification pour l’ARS est déclinée dans le Priac, qui lui-même est arrêté par le directeur général de l’ARS. Le Priac, en tant que programme du PRS, a vocation à prendre la suite en 2012 du Priac tel que créé par la loi du 11/02/2005. À compter de 2012, le Priac “nouvelle formule” sera la traduction financière du SROMS :

→ déclinaison opérationnelle des objectifs du SROMS ;

→ programmation des actions impactant l’offre existante par des actions d’évolution et d’adaptation de l’offre, et pas uniquement par le flux de “mesures nouvelles” ;

→ point de départ pour la mise en œuvre des appels à projets.

Procédure d’autorisation

La concrétisation de la planification trouve son aboutissement (en termes de développement de l’offre) dans l’autorisation de création, de transformation et d’extension des établissements et services sociaux et médico-sociaux.

La loi HPST a instauré une nouvelle procédure d’autorisation des établissements et services sociaux et médico-sociaux en introduisant une procédure d’appels à projet.

La procédure d’autorisation repose désormais sur l’initiative des autorités administratives.

L’appel à projet renforce de manière encore plus aiguë le lien entre planification et autorisation.

CONCLUSION

Au regard de ces évolutions, les enjeux d’une bonne planification dans le secteur social et médico-social sont essentiels. La loi HPST a instauré une double planification : la planification traditionnelle départementale et le SROMS. Le directeur général de l’ARS arrête le SROMS après avis de la commission de coordination des politiques publiques dans le secteur médico-social et avis des présidents de conseils généraux. Parallèlement, le président du conseil général arrête les schémas départementaux après concertation avec le représentant de l’État dans le département et avec l’ARS dans le cadre de la commission de coordination précitée. Au regard de ces évolutions, les enjeux d’une bonne planification dans le secteur social et médico-social sont essentiels. La loi HPST a instauré une double planification : la planification traditionnelle départementale et le SROMS. Le directeur général de l’ARS arrête le SROMS après avis de la commission de coordination des politiques publiques dans le secteur médico-social et avis des présidents de conseils généraux. Parallèlement, le président du conseil général arrête les schémas départementaux après concertation avec le représentant de l’État dans le département et avec l’ARS dans le cadre de la commission de coordination précitée.

Un exemple de SROMS, celui de la Bourgogne

En Bourgogne, le projet de SROMS repose sur trois objectifs prioritaires transverses :

→ affiner l’identification des besoins du secteur médico-social : développer l’observation médico-sociale, tant sur le volet des personnes âgées que sur le volet des personnes handicapées en accord avec les autres politiques publiques (plateforme d’observation sanitaire et sociale) ;

→ réduire les inégalités territoriales sociales de santé en répartissant mieux l’offre médico-sociale sur les territoires et en favorisant l’accessibilité : améliorer le maillage du territoire par les services et équipements en poursuivant une programmation de lits et places permettant de réduire les inégalités territoriales constatées ; veiller à l’accessibilité financière des structures et services relatifs aux personnes âgées de la région en lien avec les conseils généraux ;

→ promouvoir l’efficience au sein des établissements et des services médico-sociaux : rechercher les mutualisations entre structures, notamment pour les fonctions support, le recrutement de professionnels, l’organisation de formations des professionnels ; promouvoir un service de qualité au meilleur coût ; promouvoir la gestion des risques (circuit du médicament).

Ces trois objectifs transverses sous-tendent les orientations déclinées dans chacune des cinq parties du SROMS qui sont :

1. accompagner la perte d’autonomie des personnes âgées ;

2. promouvoir la prévention et le dépistage précoce du handicap et accompagner la scolarisation des enfants et des adolescents handicapés ;

3. accompagner les personnes handicapées, dans la vie sociale, l’emploi et l’autonomie ;

4. organiser la prise en charge médico-sociale des personnes confrontées aux addictions ;

5. organiser la prise en charge médico-sociale des personnes confrontées a des difficultés spécifiques.

Le respect des choix de vie recentre les politiques menées sur le parcours des personnes dont il faut préserver la fluidité en évitant ou réduisant au maximum les points de rupture. Le travail sur les schémas s’est donc appuyé sur des parcours de vie ou de santé, de la prévention aux soins et à l’accompagnement médico-social. Parmi les sept groupes de travail dits “transversaux” qui ont réuni des professionnels/ experts sur ces parcours, trois ont réfléchi sur le parcours de vie des personnes en situation de handicap psychique, sur le parcours de vie des personnes âgées et sur le parcours des adolescents et jeunes adultes. Les points de rupture et les solutions proposées par ces groupes ont été transmis aux chefs de projets des trois schémas : ils figurent en annexe du SROMS, même si toutes les solutions n’ont pu être retenues. Ils ont aussi été présentés aux instances de la démocratie sanitaire. Cette démarche par parcours a permis de changer d’angle de vue, partant des besoins des personnes et non plus des structures et de leurs logiques. Neuf groupes de travail plus thématiques ont aussi été réunis : cinq sur le handicap et deux sur les personnes âgées, un sur les addictions et un sur les personnes en difficultés spécifiques en lien avec le Programme régional d’accès à la prévention et aux soins (Praps).

Pour en savoir plus, consulter le site Internet de l’ARS de Bourgogne où le projet de PRS est publié depuis le 17 octobre 2011 pour deux mois de concertation : ars-bourgogne.fr

Remerciements pour sa large contribution à cet article à Raphaël Fernando, chargé de mission à l’ARS de Bourgogne, en charge des personnes âgées au sein de la direction de l’offre de soins et de l’autonomie

Le SROMS et les schémas départementaux

Les schémas départementaux :

– répondent aux besoins sociaux de l’ensemble de la population âgée et de la population handicapée (accès aux droits, logement, transports, insertion…) ;

– permettent d’apprécier au plus près les besoins de la population.

Ils ont pour objectif d’assurer l’organisation territoriale de l’offre de services de proximité et leur accessibilité.

Le SROMS :

– répond à des besoins de prévention, d’accompagnement et de prise en charge médico-sociaux nécessitant des soins et donc financés par l’Assurance maladie (enfants et adultes handicapés, personnes âgées en perte d’autonomie) ;

– intègre aussi le dispositif des adultes handicapés travaillant en Établissement et service d’aide par le travail (Ésat).

Il garantit la fluidité des parcours en favorisant les transversalités entre les acteurs des secteurs ambulatoire, hospitalier et médico-social.

Les schémas départementaux et le SROMS ont un périmètre propre mais aussi des compétences partagées, notamment sur la programmation de dispositifs cofinancés : accompagnement sur les lieux de vie, activités de jour, hébergement médico-social. Une évaluation et une identification partagée des besoins sont ainsi nécessaires.