Objectif Soins n° 200 du 01/11/2011

 

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Sandra Serrepuy  

CONDITIONS DE TRAVAIL → Comment remotiver les professionnels de santé hospitaliers, les réconcilier avec leur métier ? Pour certains, il faut avant tout redonner du sens à la notion d’équipe et associer chacun à la vie des services.

Les professions de santé sont celles qui ont les taux de suicide les plus importants, constatait le 29 septembre dernier l’épidémiologiste psychiatrique Viviane Kovess-Masféty à l’occasion d’un colloque organisé par l’École des hautes études en santé publiques (Ehesp) sur le thème “Prendre soin du travail : pour un management soucieux de la qualité de vie des personnels de la santé”.

Néanmoins, remarque cette spécialiste, s’il est vrai que l’on parle plus facilement aujourd’hui des problématiques de stress au travail, que l’on évoque plus facilement le mal-être qu’il y a vingt ans, la maladie dépressive n’a heureusement pas progressé. Ce qui n’empêche pas de réfléchir à l’amélioration des conditions de travail, et peut-être surtout des conditions de vie au travail.

Remise en question des cellules d’écoute

En période de crise dans le monde du travail de manière générale, et singulièrement à l’hôpital, la mise en place de groupes de parole ne serait pas à encourager. Si l’on donne ce faisant l’impression de prendre en considération le mal-être des personnels, on ne résout cependant pas vraiment le problème de ceux qui auraient des tendances suicidaires.

Qui plus est, tout comme l’a fait le conseil de l’Ordre des médecins, Viviane Kovess-Masféty exprime sa méfiance vis-à-vis des cellules d’écoute, constituées d’écoutants « sélectionnés et rémunérés directement par l’employeur ». Selon elle, on est ici à la limite de l’exercice illégal de la médecine, qui repose sur le libre choix du professionnel de santé par le patient.

Le rôle moteur des managers

En revanche, il y a à encourager les managers et chefs d’équipe à associer leurs équipes aux prises de décision. En effet, remarque la sociologue Françoise Acker, si les soignants aiment leur métier, métier qu’ils ont réellement choisi, ils estiment souvent que leur travail est « empêché, dégradé », qu’on ne les laisse pas, en quelque sorte, prendre soin de leur travail.

Ils considèrent que l’institution qui les emploie ne prend pas en considération la valeur de ce travail, qu’elle ne s’y intéresse pas de façon adéquate. Raison pour laquelle Philippe Colombat, professeur en hématologie au CHU de Tours, prône un management participatif, permettant à chacun de donner son avis et d’être écouté.

Ce chef de service considère en effet qu’il importe dans les équipes de rechercher constamment le consensus et d’en finir avec les prises de décision unilatérales, qui s’imposent à tous. « On accepte mieux les décisions auxquelles on a été associés », affirme aussi Laëtitia Laude, professeur de gestion à l’Ehesp, qui souligne l’importance des relations nouées au sein des équipes et le poids de l’ambiance sur la qualité du travail. La responsabilité de cette ambiance repose énormément, selon Philippe Colombat, sur les épaules des managers qui doivent partager cet idéal d’esprit d’équipe et impulser cette dynamique. Et de louer les staffs pluriprofessionnels, qui permettent une pluralité des regards bénéfique à chacun.