Une carrière fulgurante dans le privé - Objectif Soins & Management n° 202 du 01/01/2012 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 202 du 01/01/2012

 

DAVID COLMONT

Parcours

Joëlle Maraschin  

N’hésitant pas à négocier des formations avec sa direction, David Colmont a gravi en une dizaine d’années les échelons de la hiérarchie soignante au sein du groupe de santé privé Vitalia. À 35 ans, il est aujourd’hui directeur des soins dans une polyclinique de Nevers.

David Colmont le dit sans détour, il a fait le choix du privé et ne le regrette pas. « J’ai eu la chance de pouvoir négocier des formations et d’évoluer rapidement, précise-t-il. Même si c’est parfois plus compliqué que dans le public, mon parcours montre qu’il existe une évolution possible dans le privé. » Fils d’une infirmière qui a fait toute sa carrière en néonatalogie dans un hôpital public, David Colmont a cependant très vite opté pour le secteur privé. À la sortie de l’Ifsi en décembre 1999, il rejoint l’équipe soignante de la polyclinique du Val de Loire à Nevers. « J’avais effectué quelques stages au cours de ma formation initiale dans cette clinique. Compte tenu de la taille de cet établissement, je trouvais l’ambiance beaucoup plus familiale qu’à l’hôpital. Pour un premier poste, je me sentais plus en confiance », explique-t-il. De plus, la polyclinique lui offrait d’emblée la possibilité de se former en tournant dans les différents services, de la chirurgie orthopédique et traumatologique en passant par la chirurgie gynécologique ou viscérale.

Des marins-pompiers à la formation IADE

Après quelques mois de travail, David Colmont part effectuer son service militaire chez les marins-pompiers de Marseille. Affecté au Smur, il découvre un univers qui le passionne. « J’hésitais, je souhaitais encore m’orienter vers la psychiatrie. Mais j’étais très attiré par la technique », se souvient-il. Au retour du service militaire, il est approché par l’hôpital de Nevers mais aussi par la clinique dans laquelle il a débuté sa carrière. Il choisit le petit établissement, la direction promet de lui payer la préparation au concours et la formation d’infirmier anesthésiste. Il travaille pendant près de deux ans en salle de réveil du bloc opératoire avant de passer avec succès les épreuves du concours d’IADE.

Il intègre la formation d’IADE de Lyon en 2002. David Colmont vient d’avoir 26 ans, c’est l’un des plus jeunes infirmiers de sa promotion. « Infirmier anesthésiste est un métier très différent de celui d’infirmier DE. C’est un métier très technique, mais on oublie souvent que l’aspect relationnel est aussi très important », ajoute-t-il. Surtout, il est enthousiasmé par l’autonomie conférée par ce métier. À la sortie de l’institut de formation, sa direction lui renouvelle sa confiance et lui propose un poste de faisant fonction de cadre du secteur d’anesthésie. Il encadre trois autres infirmiers anesthésistes et quatre infirmiers de salle de réveil, s’investit dans la prise en charge de la douleur au sein de son établissement : enquêtes de satisfaction auprès des patients, reporting de la consommation d’antalgiques, audits… Soucieux de se perfectionner, il suit également le DU douleur dispensé au CHU Cochin de l’AP-HP. En 2008, il demande à son employeur de se former afin de valider son poste de cadre.

Un master à l’école supérieure Montsouris

Réticente à l’idée de le voir partir pendant près d’un an en formation cadre, la direction de la polyclinique l’encourage à suivre le master de l’école supérieure Montsouris porté par l’université Paris-Créteil. « Cette formation en alternance représente une semaine de cours par mois, c’était plus facile pour gérer mon absence », remarque David Colmont. Motivé, le jeune homme réussit le master?1 Management et santé en 2009 puis le master 2 Management des organisations soignantes l’année suivante. « Passer un tel diplôme tout en continuant son activité professionnelle nécessite travail et organisation, reconnaît-il. Pendant deux ans, j’ai travaillé tous les soirs en rentrant de la clinique, et les week-ends. C’est une formation de haut vol qui demande beaucoup d’écrits et de recherches. » Avec son nouveau diplôme, David Colmont est sollicité par différents établissements, aussi bien publics que privés. « Je pensais à tort que le fait de n’avoir pas intégré l’école des cadres pouvait être un handicap », ajoute-t-il. En dépit des propositions, il préfère cependant conserver son poste de cadre dans la polyclinique tout en assurant un certain nombre de fonctions transversales : formation des infirmières du groupe Vitalia aux gestes d’urgence et à la prise en charge de la douleur, participation au travail de certification, gestion des risques… Sa fidélité sera récompensée quelques mois plus tard puisqu’il est nommé en octobre dernier directeur des soins de la polyclinique.

Le quotidien d’un directeur des soins dans le privé

Directeur des soins, membre à ce titre du comité de direction, David Colmont encadre quatre cadres et une centaine de paramédicaux. La partie la plus importante de son activité est représentée par la gestion des ressources humaines : plannings des différentes équipes, gestion des besoins par rapport à l’activité, évaluation des personnels, recrutement… Il consacre seulement 20 % de son temps à l’organisation des soins.

Le défi permanent et quotidien pour un directeur des soins d’une clinique privée est en effet de recruter du personnel paramédical, mais aussi de le fidéliser. Compte tenu de la pénurie, les recrutements sont de plus en plus difficiles. « Nous ne sommes pas vraiment attractifs question salaire, reconnaît-il. En revanche, nous proposons une véritable polyvalence et un rythme de travail en 12 heures, ce qui permet une présence de trois jours par semaine. »

La tarification à l’activité, ou plutôt l’optimisation des dépenses et des recettes, est un autre souci quotidien pour David Colmont. Soucieux d’assurer la traçabilité des actes, le jeune directeur des soins s’est attelé à développer un outil permettant le codage des actes. « Les codages sont mal faits dans le public, il y a beaucoup de déperdition, cela ne rapporte pas ce que cela devrait rapporter. Dans un établissement privé, qui doit dégager des bénéfices pour continuer à exister, il est très important de tracer l’ensemble de nos actes », poursuit-il.

Enfin, l’adaptation des ressources humaines à l’activité réelle de la clinique est une autre préoccupation quotidienne de la direction. « Nous demandons à nos personnels d’être malléables, c’est-à-dire d’accepter de faire de courtes journées en cas de baisse d’activité, mais aussi des heures supplémentaires si besoin, précise David Colmont. En contrepartie, nous rémunérons les heures supplémentaires. » Soignant engagé, David Colmont écrit aussi dans quelques revues de soins afin de partager son expérience et sa réflexion avec ses pairs. Élu vice-président du Conseil de l’Ordre des infirmiers dans le département de la Nièvre, il regrette que la structure ordinale n’ait pu trouver sa place. « J’ai cru que le Conseil de l’Ordre pouvait faire changer les choses, estime-t-il. Mais je crains que nous ayons loupé le coche, c’est dommage pour la profession. »