ANALYSE → À l’occasion de l’Université des cadres, qui s’est tenue à Paris du 5 au 7 décembre 2011, Paule Bourret a souligné l’importance de prendre en compte le travail réel des cadres et Dominique Bourgeon en a exposé les spécificités.
Paule Bourret, cadre supérieure et sociologue, a détaillé les évolutions du contexte dans lequel travaille le cadre, afin de mieux saisir la « différence entre le travail réel et le travail prescrit ». Premier constat : « Le travail s’est intensifié : il faut faire plus dans le même temps. » Il s’est également densifié, notamment avec le travail d’écriture et de traçabilité. Dans une logique générale des organisations visant à « exporter le travail vers le client », dans les hôpitaux, on fait de plus en plus participer les patients à leur propre prise en charge, alors que ceux-ci n’ont pas forcément les compétences pour le faire. Encore un travail non comptabilisé mais assuré par les équipes. Enfin, le travail à l’hôpital est de plus en plus dépendant de l’extérieur.
Cette évolution conduit à des dysfonctionnements de plus en plus importants, auxquels doit pallier sans cesse le cadre, dont le « travail invisible » permet de « mettre de la cohérence dans un monde qui se fragmente ». Paule Bourret propose comme piste d’avenir de « prendre soin du travail ». Cette démarche permettrait de mieux connaître la réalité du travail de soin, de se recentrer sur ce travail réel et de débattre, au sein des établissements, sur la qualité du travail.
De son côté, Dominique Bourgeon, directeur de l’IFCS de Poitiers et sociologue, a décrit les cinq particularités qui, selon lui, distinguent le travail de cadre hospitalier des approches managériales conventionnelles.
La première réside dans le fait que le cadre de santé est confronté à « deux lignes hiérarchiques », avec, d’un côté, la référence administrative et gestionnaire et, de l’autre, les médecins de proximité structurant le travail de soin.
Seconde particularité, la « part gratuite du soin ». La mise en place actuelle de la Révision générale des politiques publiques, centrée sur la tarification et l’évaluation permanente des personnels et des résultats, vient « percuter l’essence des soins » et leur part non mesurable.
Ensuite, le management hospitalier doit « prendre en compte les affects inhérents à la présence de la maladie, voire de la mort ». D’où l’importance pour le cadre de favoriser des moments d’expression et d’échange, formels ou informels, afin de permettre aux soignants de partager la culpabilité qu’induit la nécessaire mise à distance de la détresse des patients.
Quatrième particularité du management hospitalier selon Dominique Bourgeon : « L’appréhension des dimensions symboliques du travail soignant. » L’utilisation de symboles et de rituels est nécessaire pour aider les soignants à se défendre symboliquement face à la présence intempestive de la mort.
Enfin, les cadres hospitaliers doivent se positionner face à un conflit temporel majeur : évoluant dans un univers où prime la survie du patient et la notion d’urgence, ils se situent dans un travail peu valorisant, situé dans une temporalité administrative ou logistique. D’où la nécessité pour eux d’imposer un délai de réponse face aux demandes des agents. Selon le sociologue, il serait possible de faire valoir ces particularités et d’obtenir une reconnaissance institutionnelle en constituant un collège des cadres.
Absentéisme
Airbus, souhaitant réduire l’absentéisme, se laisserait tenter par un système de suivi systématique des salariés en arrêt maladie, par un médecin ou un infirmier. Une initiative de la DRH d’airbus, pour pallier les 600 personnes manquantes chaque jour, dont la moitié de ces congés thérapeutiques dépassent trois semaines d’absence.
Source : Gestion sociale n° 1723.