Objectif Soins n° 208 du 01/09/2012

 

Ressources humaines

Laure de Montalembert  

Exerçant des fonctions essentielles au bon fonctionnement des établissements médicaux, des instituts de formations paramédicales, des agences régionales de santé, entre autres, le directeur des soins reste cependant un personnage énigmatique pour une grande partie des professionnels de santé.

« Au sein des établissements, 80 % du personnel est constitué de paramédicaux. La sensibilité soignante a donc toute sa place au sein même de la direction », lance Jean-Marc Grenier, coordinateur général des soins au CHU de Grenoble et président de l’Association française des directeurs de soins (AFDS).

ENTRE POLYVALENCE ET QUÊTE DE SENS

Donner de la cohérence

« Nous sommes l’expression de cette filière paramédicale qui représente le gros des troupes. Et c’est notre expérience sur le terrain qui nous donne notre légitimité au niveau des équipes, des médecins et des directeurs. Le directeur des soins donne de la cohérence. Avant 2012, il y avait juste le projet de soins des infirmiers. Maintenant, il est partagé », indique Jean-Marc Grenier.

La valeur ajoutée du DPC

Chantal Cateau, directrice des soins au CHU de Blois, insiste sur le rôle essentiel du DPC (développement professionnel continu) : « Dans ce domaine aussi, nous apportons une plus-value importante. Nous ne sommes pas seulement sur l’axe stratégique ; nous devons aussi être dans la proximité afin de veiller au parcours des professionnels. Le DPC est un véritable levier pour développer les pratiques avancées et la recherche clinique. »

Dans cette optique, elle prend soin de sillonner régulièrement les services de son établissement et de rencontrer les personnels de toutes catégories. Elle a également mis en place un « coaching d’accompagnement afin de s’occuper du projet professionnel de chaque personne ».

PRÉSERVER LE SENS DU SOIN

« Une des missions majeures du directeur des soins concerne l’organisation des soins et de la prise en charge ainsi que la prévention des risques associés aux soins », explique Roselyne Vasseur, directrice DSAP au siège de l’Assistance publique à Paris. « Dans cette époque de fortes mutations, le directeur des soins doit être garant des valeurs fondatrices du soin pour préserver le sens de l’activité soignante. Le Projet de soins, qui constitue le socle de la politique de soins, cadre l’exercice des professionnels paramédicaux de l’établissement. Décliné à partir du projet médical, il fait partie intégrante du plan stratégique de l’établissement. Grâce à sa connaissance approfondie des métiers paramédicaux, le directeur des soins incarne un repère rassurant pour les équipes et joue un rôle de facilitateur », ajoute-t-elle.

Il existe environ 844 directeurs des soins en France, essentiel­lement répartis entre les établissements de santé (520) et les instituts de formation (260). Jean-René Ledoyen, respon­sable de la formation des directeurs de soins à l’EHESP (École des hautes études en santé publique), tire de son expérience que « des liens forts ­doivent être tissés entre les directeurs des soins exerçant dans ces deux types de structures de manière à ce que le projet pédagogique tienne compte du projet de soin de l’établissement dont il dépend ». Mais il estime également qu’un des objectifs principaux des directeurs de soins est l’accompagnement afin de « cimenter les équipes ».

DES LIENS INDISPENSABLES

Qualité de la formation

Dans le contexte de la T2A (tarification à l’activité), le directeur de l’EHESP forme des directeurs des soins qui doivent désormais « gagner en efficience dans l’organisation du parcours des patients, la gestion de l’augmentation de l’ambulatoire. Ils doivent aussi faire face à l’ouverture de l’hôpital sur la ville, l’augmentation de l’ambulatoire, la montée des pathologies chroniques, etc., dans une dynamique pluridisciplinaire dont le directeur des soins doit être un élément moteur avec le président de la CME. » Ce n’est pas François Giraud-Rochon, directeur des soins à l’Institut de formation des cadres de santé d’Ile-de-France qui le contredira sur ce sujet. « La qualité des soins commence par la qualité de la formation des professionnels. Ce sont nous, les directeurs d’instituts, qui en sommes garants et qui en avons la maîtrise, insiste-t-il. Le pendant du projet de soin doit, en effet, être le projet pédagogique. »

Des liens qui se renforcent d’autant plus entre les structures que les directeurs des soins en instituts « restent en contact permanent avec les établissements où il leur arrive même d’assurer des formations ».

Et, dans la mesure où certains directeurs assument la responsabilité de plusieurs instituts, « ils doivent également développer des compétences transversales ».

Veille réglementaire

Autre domaine dans lequel les directeurs des soins d’aujourd’hui doivent développer leur expertise : la veille réglementaire. Elle prend une importance grandissante avec la multiplication de textes de loi et des règlements qu’il est nécessaire de diffuser à l’ensemble des personnels. Une tâche qui n’est pas toujours aisée.

NIVEAU RÉGIONAL

En dehors des établissements de santé et des instituts de formations, la fonction de directeur des soins peut s’exercer dans diverses structures, notamment au sein des ARS où ils sont environ une soixantaine.

Les directeurs des soins exerçant en ARS peuvent jouer des rôles très divers : conseillers techniques, conseillers pédagogiques ou encore chargés de missions. « Les chargés de missions participent à l’élaboration de la politique régionale de santé et peuvent travailler, par exemple, sur des projets de coopération des différentes professions de santé ou effectuer des missions d’inspection dans les établissements », explique Isabelle Monnier, chargée de missions à la direction générale de l’offre de soins au ministère de la Santé. « Les conseillers pédagogiques, quant à eux, sont responsables de la mise en œuvre du schéma régional de formation. Ils participent à l’évaluation des formations des professions paramédicales, aux conseils pédagogiques des instituts de formation et aux jurys de diplômes. Les directeurs des soins exerçant au sein des ARS bénéficient d’une vision régionale. »

AU MINISTÈRE AUSSI

Des postes de directeurs de soins existent également au sein de l’administration centrale, au ministère de la Santé.

C’est le cas d’Isabelle Monnier qui, en tant que chargée de missions, est mandatée sur les problématiques nationales de déontologie, d’exercice professionnel et de formation continue (développement professionnel continu). « Mon rôle est de faire respecter et de faire évoluer les réglementations de l’exercice. Je suis également chargée du suivi de l’impact des plans liés aux programmes de santé publique sur l’exercice des professions paramédicales. Il comporte également la mise en œuvre et le pilotage des dispositifs d’organisation des parcours de validation des acquis de l’expérience avec la création de référentiels de compétences, par exemple. Mon rôle comporte également l’accompagnement, la mise en œuvre et le pilotage des dispositifs d’organisation des parcours de validation des acquis de l’expérience avec la création de référentiels de compétences, par exemple », termine-t-elle.

Les interlocuteurs d’Isabelle Monnier sont les établissements de santé, les ARS, voire les professionnels de santé directement. Avec eux, elle aborde des sujets allant du général au particulier. Elle travaille également en concertation avec les syndicats nationaux, les syndicats professionnels, les organisations professionnelles représentatives, les ordres, les représentants des employeurs, entre autres.

[Rendez-vous au Salon infirmier pour suivre la table ronde sur ce thème.

Être directeur des soins en 2012, le 25 octobre, de 14 h 30 à 15 h 30, salle Vega A.

Devenir directeur des soins

Avant de vous décider, parlez d’abord de votre projet avec votre directeur des soins et votre directeur d’établissement et avec toutes les personnes susceptibles de vous conseiller. Pour devenir directeur des soins, dix années d’exercice, dont cinq en tant que cadre, sont exigées.

→ Première étape : la préparation. Il existe des organismes de formation qui proposent des préparations. L’EHESP (École des hautes études en santé publique) propose également un cycle préparatoire au concours d’accès au corps des directeurs de soins.

→ Seconde étape : passer le concours. Organisé une fois par an, il est composé d’épreuves écrites d’admissibilité et d’épreuves orales d’admission.

→ La formation : il s’agit d’un cycle de formation de douze mois, dispensé par l’EHESP à Rennes. Les trois axes en sont la santé publique, le management hospitalier et le métier.

→ Le choix du poste : au cours de la formation, les étudiants postulent à un poste ouvert à la vacance.

Les grands changements dans l’exercice des directeurs des soins

De nombreux changements ont eu lieu récemment dans l’organisation de la santé en France. La loi HPST du 21 juillet 2009 a conféré de nouvelles attributions aux médecins chefs de pôles. Pour y répondre, ils se sont entourés de collaborateurs dont, en particulier, des cadres supérieurs de santé dits cadres paramédicaux de pôles. Cette même loi a attribué au directeur des soins membre de l’équipe de direction un siège de droit au sein du directoire — instance dirigeante de l’établissement — en tant que président de la Commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques. À l’instar des autres directions hospitalières, le métier de directeur des soins est en pleine évolution. Il est désormais davantage axé sur le pilotage stratégique des projets et des réorganisations, l’expertise, l’animation de la filière paramédicale, la coordination et le soutien des équipes soignantes via l’encadrement. Il se situe à la jonction des différentes logiques hospitalières, car le directeur des soins a développé durant son parcours professionnel des compétences, tant dans le domaine dit administratif que dans le domaine de la médecine ou du soin. Cette singularité rend le métier varié et passionnant, puisque le directeur des soins est concerné par la plupart des sujets. Dans un établissement de soins, il collabore avec l’ensemble des professionnels hospitaliers. On est passé d’un système très pyramidal à un mode de management où la légitimité n’est plus hiérarchique, mais basée sur la compétence reconnue par les collaborateurs et les pairs. Les professionnels sont demandeurs d’un lien opérationnel direct avec leur directeur des soins. Selon la taille des établissements et des pôles, cette proximité n’est pas toujours facile à organiser au quotidien. Le directeur des soins joue désormais un rôle essentiel dans la veille réglementaire professionnelle et la diffusion des informations à l’encadrement paramédical.

Roselyne Vasseur

En savoir plus

→ Cadre législatif : décret n° 2010-1138 du 29 septembre 2010 modifiant le décret n° 200-550 du 19 avril 2002 portant statut particulier du corps de directeurs des soins de la fonction publique hospitalière. Lien raccourci vers le site Internet legifrance.gouv.fr : http://bit.ly/Rjg8Vo

→ École des hautes études en santé publique : www.ehesp.fr

→ Association française des directeurs de soins : www.directeurdesoins-afds.com

→ Fédération hospitalière de France : www.fhf.fr

→ Grille indiciaire de la fonction publique hospitalière : lien raccourci vers le site Internet emploitheque.org : http://bit.ly/RjgxYo