Vocabulaire juridique - Objectif Soins & Management n° 213 du 01/02/2013 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 213 du 01/02/2013

 

Droit

Gilles Devers  

Le droit est une discipline complexe, mais pas autant qu’on ne l’imagine. En fait, pour se comprendre, il faut d’abord se mettre d’accord sur le sens des mots. Voici quelques-uns des termes du vocabulaire juridique usuels.

A

Amnistie

L’amnistie, définie par la loi, efface la sanction pénale. Elle traduit la volonté de “tourner la page”. Elle relève de la philosophie pénale. Si la sanction pénale ne joue plus de rôle dans la préservation de l’ordre public, il n’y a pas lieu de maintenir cette mesure punitive.

Appel

L’appel est une voie de recours qui prive le jugement de tout effet et conduit à un réexamen d’ensemble par la cour. C’est la voie de recours de droit commun. Seules les décisions de faible importance sont rendues en dernier ressort, sans possibilité d’appel.

Arrêtés

Les arrêtés sont les dispositions réglementaires, prises en application d’un décret, et la compétence revient aux chefs d’administration : ministre dans un ministère, préfet dans un département, recteur dans une académie, directeur dans un hôpital, maire dans la commune. La compétence pour signer un arrêté doit être prévue par un décret, et les arrêtés doivent respecter le contenu des décrets, des lois et des normes supérieures du droit.

C

Cassation

Un arrêt de cour d’appel peut être contesté par un pourvoi en cassation. La Cour de cassation ne rejuge pas l’affaire. Elle contrôle à partir des faits, qui sont réputés définitivement acquis, si la règle de droit a été correctement appliquée. Si l’application du droit est conforme, l’arrêt est confirmé. Si la cour d’appel a commis une erreur de droit, la Cour de cassation casse l’arrêt et renvoie la procédure à une autre cour d’appel qui devra tenir compte de la règle de droit posée par la Cour de cassation.

Circulaire

Les circulaires sont des textes interprétatifs, émanant de l’autorité hiérarchique, qui expliquent ou rappellent l’état du droit. Dans les services, elles doivent être respectées comme des consignes par les agents du service, mais elles n’ont qu’une valeur indicative vis-à-vis des tiers. Les circulaires sont attendues car elles cherchent à donner une lecture claire du droit. Le travers est que, sous réserve d’explication, les circulaires comprennent souvent des éléments qui excèdent le cadre défini par les textes, et qui tendent à s’imposer dans les faits.

Code

Le code est un mode de regroupement des lois et décrets. Mais le fait qu’un texte soit codifié ne modifie pas sa valeur d’origine : il garde sa valeur législative ou réglementaire.

Conseil constitutionnel

Le texte de loi voté est soumis à un délai de carence de dix jours pendant lequel le président de la République, le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale ou le président du Sénat, ou encore un groupe de soixante parlementaires peuvent saisir le Conseil constitutionnel, si certaines dispositions votées leur paraissent contraires au droit constitutionnel. Le Conseil constitutionnel peut valider la loi, ou l’annuler, totalement ou partiellement. Si la loi partiellement invalidée reste cohérente, elle peut être publiée au Journal officiel. Si la loi est annulée sur des points essentiels, elle est abandonnée.

Contrôle de la légalité

La structure hiérarchique des normes juridiques est une garantie pour le respect des droits et libertés. Tout texte doit s’inscrire dans “l’État de droit” : un traité, pour être applicable, ne peut comprendre de dispositions contraires à la Constitution. De même, une loi doit respecter la Constitution et les traités. Le décret doit respecter les trois étages supérieurs, et l’arrêté l’ensemble des normes. Pour garantir la qualité du droit et éviter les abus de pouvoir, les textes doivent être soumis à toutes les critiques.

Contrôle judiciaire et détention provisoire

Pendant l’enquête judiciaire, il peut apparaître nécessaire au juge d’instruction que soient prises des mesures pour garantir le maintien à la disposition de la justice de la personne poursuivie. Ce sont les procédés du contrôle judiciaire – assignation à résidence, versement d’une somme d’argent à titre de caution, interdiction de rencontrer tel ou tel témoin, interdiction d’exercer telle ou telle fonction… – ou de la détention provisoire.

Cour de justice de l’Union européenne

Cette juridiction, dont le siège est à Luxembourg, relève de l’Union européenne, qui regroupe vingt-sept États. Elle peut être saisie par les États, par toute personne morale et par tout citoyen, mais les règles de recevabilité sont strictes, pour éviter un ensevelissement de la Cour sous les recours. La Cour peut aussi être saisie par une juridiction nationale, pour obtenir l’interprétation de la Cour sur les textes de droit européen.

Cour européenne des droitsde l’homme

Cette juridiction, dont le siège est à Strasbourg, relève du Conseil de l’Europe, qui regroupe 47 États. Elle peut être saisie par tout Etat ou par tout citoyen estimant qu’en droit interne sont violées les dispositions de la Convention européenne. La Convention, et surtout la jurisprudence de la Cour, peuvent être invoquées devant tout juge national. De fait, nombre de situations qui étaient bloquées en droit interne ont évolué sous l’impulsion de la jurisprudence de la Cour.

D

Décisions de justice

Les tribunaux rendent des jugements. Les cours d’appel, la Cour de cassation et le Conseil d’État, des arrêts. Les ordonnances sont rendues par les juges uniques : juge des enfants, juge aux affaires familiales, juge d’instruction, juge des référés…

Décrets

Les décrets sont des textes pris en application des lois. Des décrets sont signés que par le président de la République, notamment pour les nominations les plus importantes, mais le plus grand nombre – les décrets réglementaires, mesures d’application des lois – sont signés par le Premier ministre et cosignés par les ministres concernés.

Démocratie

Tout citoyen d’un État doit participer à la délibération commune qui vise à édicter les règles de droit. La démocratie confère ce pouvoir au peuple dans son entier, via des élections libres et le principe de la majorité. Mais la majorité peut s’aveugler et voter des lois liberticides. Aussi, l’adoption des lois est soumise à des mécanismes d’encadrement par les principes fondamentaux du droit.

Droit pénal

La démarche du droit pénal est universelle : le législateur reconnaît qu’un certain nombre de notions fondamentales méritent d’être protégées en elles-mêmes, indépendamment d’une action de la victime. Fondamentalement, l’action pénale est une action publique. Aussi, la maîtrise du procès pénal est confiée à un corps de magistrats, les procureurs.

Droits de la défense

La procédure vise à respecter les droits de la défense : être avisé suffisamment à l’avance, connaître les griefs, disposer du temps nécessaire pour s’organiser, être assisté d’un avocat, connaître les pièces qui fondent les griefs, soulever des moyens auxquels le tribunal devra répondre, disposer de voies de recours. La personne en cause doit également bénéficier de garanties dans la tenue de l’audience avec la possibilité de se taire – c’est le droit au silence, au nom duquel le fait de ne pas avouer n’aggrave pas la sanction–  d’être entendu, de faire citer ses témoins, et ce, dans le cadre d’une audience publique.

E

État

La vie juridique est structurée au regard de l’État, qui est la référence en droit international et interne. L’État est souverain dans ses frontières et ne peut subir une ingérence étrangère. Un État existe lorsque sont réunis trois critères : une population, un territoire, un pouvoir organisé. Lorsque ces trois critères sont réunis, les autorités se revendiquent comme État, sont reconnus par d’autres États et sollicitent leur admission à l’ONU.

G

Grâce

La grâce est une mesure individuelle qui relève de la compétence du chef de l’État. Il s’agit d’une mesure discrétionnaire, c’est-à-dire qui n’a pas à être motivée, et dont les effets peuvent être partiels ou généraux. Le chef de l’État peut être saisi d’une demande de grâce à propos de toute sanction, pénale ou disciplinaire.

J

Juges du siège

Les magistrats, qui ont pour mission de juger, sont les juges du siège : président du tribunal, président de chambre, juge aux affaires familiales, juge d’instruction, juge des enfants… Ces magistrats disposent d’un ensemble de garanties de carrière qui assurent leur indépendance. La plus significative de ces mesures est la règle de l’inamovibilité : un juge ne peut être déplacé d’office, mais seulement s’il en a fait la demande. En l’état actuel, l’indépendance des juges du siège est acquise.

Juridiction

La référence est donnée par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Un tribunal doit être indépendant et impartial : indépendant, car il ne doit pas être lié à un organe administratif ; impartial, car le statut de ses membres doit les garantir de tout risque d’implication personnelle dans le procès.

Juridictions administratives

Lorsqu’est en cause l’État, une administration publique ou une collectivité locale, la compétence juridictionnelle revient aux juridictions administratives : tribunal administratif, cour administrative d’appel, Conseil d’État.

Juridictions judiciaires

Pour les affaires de droit privé, c’est-à-dire opposant des personnes physiques ou les personnes morales de droit privé, telles que les associations, les syndicats ou les sociétés, la compétence revient aux juridictions judiciaires : tribunal de grande instance, cour d’appel et Cour de cassation.

Juridictions pénales

Le contentieux pénal est confié aux juridictions judiciaires, saisies par le procureur de la République. Le tribunal de grande instance, formation civile, complété par le procureur de la République, devient le tribunal correctionnel, compétent à l’égard de tout citoyen. Praticien public ou libéral, un médecin peut être cité en correctionnelle si sa responsabilité pénale est recherchée. Le statut juridique est égalitaire sur le plan pénal, et les distinctions n’interviennent que sur le plan civil.

Jurisprudence

La jurisprudence est d’abord un phénomène général. Au sens premier, il s’agit de l’ensemble des décisions rendues par les tribunaux. Au sein de cet ensemble, quelques décisions font référence du fait de l’importance du sujet qu’elles traitent ou de l’autorité de la juridiction qui s’est prononcée, par exemple de la Cour de cassation ou du Conseil d’État. On dit alors que cette décision “fait” jurisprudence.

L

Loi

La loi se définit comme l’acte du Parlement, c’est-à-dire le texte voté dans les mêmes termes par l’Assemblée nationale et le Sénat, les deux assemblées, qui constituent la représentation nationale. L’initiative d’un nouveau texte peut être parlementaire : c’est une proposition de loi. Le plus souvent, l’origine est gouvernementale : c’est un projet de loi. Les projets de loi sont adoptés en conseil des ministres puis inscrits à l’ordre du jour du Parlement à l’initiative du gouvernement. De fait, l’immense majorité des lois est d’origine gouvernementale, et c’est le gouvernement qui, de fait, établit le calendrier du Parlement.

M

Mise en examen

Lorsqu’apparaissent à l’encontre d’une personne des indices précis et concordants rendant vraisemblable qu’elle ait pu participer à la commission d’une infraction, celle-ci doit être mise en mesure de se défendre. La mise en examen, mesure sévère, est aussi une mesure protectrice, car la personne devient partie au procès et accède aux droits de la défense. Elle peut désigner un avocat qui a accès au dossier et peut en prendre copie. La personne mise en examen ne peut plus être entendue par la police mais seulement par le juge, en présence de son avocat, et avec une convocation respectant un délai suffisant pour permettre à la défense de s’organiser (Code de procédure pénale, article 80-1).

O

Ordonnance

Le Parlement peut déléguer son pouvoir législatif au gouvernement, qui se prononce sous forme d’ordonnance. Une ordonnance a la valeur d’une loi. Le recours aux ordonnances est un signe de fragilité du gouvernement, qui redoute le débat devant les assemblées parlementaires et préfère se faire habiliter.

P

Prescription civile

Le temps qui passe est cause d’oubli. Au civil, un recours en responsabilité médicale ou hospitalière doit être engagé dans un délai de dix ans après l’apparition du dommage.

Prescription pénale

Les poursuites doivent être engagées pour les contraventions dans un délai d’un an, pour les délits dans un délai de trois ans et pour les crimes dans un délai de dix ans. Ces délais peuvent être suspendus ou interrompus par des actes de procédure.

Présomption d’innocence

Toute personne qui ne fait pas l’objet d’une condamnation définitive, rendue par un tribunal indépendant et impartial, est innocente. La sanction pénale, qui identifie un comportement antisocial, est d’une importance telle que la culpabilité ne peut être reconnue que lorsqu’elle résulte d’un jugement définitif, rendu par à la suite d’une procédure équitable. Cette règle n’interdit pas de parler des faits et de donner des opinions, mais on ne peut présenter comme coupable une personne seulement accusée.

Principe de la non-rétroactivité

La loi pénale ne peut avoir d’effet que pour l’avenir. C’est une condition décisive du respect des libertés individuelles. Ne peuvent être poursuivies que des infractions qui étaient légalement définies au moment des faits.

Principe de légalité des délits et des peines

Ne peuvent être sanctionnés pénalement que les comportements définis par la loi, et ne peuvent être prononcées par les juridictions que les sanctions prévues par la loi. Si la répression pénale, qui est d’ordre général, entre en jeu, c’est que des comportements ont été suffisamment graves pour troubler l’ordre public. Aussi, le législateur doit identifier au préalable ces comportements en leur donnant une définition stricte, à travers les éléments constitutifs de l’infraction.

Privation de liberté

Un médecin amené à examiner une personne privée de liberté ou à lui donner des soins ne peut, directement ou indirectement, serait-ce par sa seule présence, favoriser ou cautionner une atteinte à l’intégrité physique ou mentale de cette personne ou à sa dignité. S’il constate que cette personne a subi des sévices ou des mauvais traitements, il doit, sous réserve de l’accord de l’intéressé, en informer l’autorité judiciaire (Code de santé publique, article 4127-10).

Procureur

L’initiative de l’action pénale revient au procureur de la République, maître de l’opportunité des poursuites. Les procureurs de la République sont organisés en un système hiérarchique dénommé “le Parquet”, placé sous l’autorité du ministre de la Justice. Il existe auprès de chaque tribunal de grande instance un procureur de la République, assisté de substituts. Au niveau de la cour d’appel, le responsable du Parquet est le procureur général, assisté d’avocats généraux, et l’on retrouve un parquet général auprès de la Cour de cassation.

T

Traité

Un État conclut des accords internationaux, les traités, par lesquels il s’engage vis-à-vis d’autres États. Il en résulte des contraintes juridiques, mais il n’y a pas d’atteinte à la souveraineté, car ces limitations sont librement consenties.

U

Union européenne (Institutions)

C’est à ce jour le regroupement volontaire de vingt-sept États à travers cinq structures : le Conseil des communautés, qui regroupe dans un cadre collégial tous les chefs de gouvernement européens ; la Commission de Bruxelles, organe permanent composé de hauts dirigeants politiques désignés par les États ; le Parlement qui siège à Strasbourg ; la Cour de justice de l’Union européenne, installée à Luxembourg ; un président et un ministre des Affaires étrangères. De grands traités, le fondateur de Rome en 1957, de portée essentiellement économique, ou le refondateur de Maastricht en 1990, ouvrant la voie à une Europe politique, puis le traité de Lisbonne de 2009 ont institué des autorités internationales avec de véritables transferts de compétence.

V

Voies de recours

Toute personne qui est en désaccord avec un jugement peut exercer des voies de recours, et principalement : appel, cassation et saisine des juridictions internationales.