Alimentation des patients et rôles soignants - Objectif Soins & Management n° 244 du 01/03/2016 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 244 du 01/03/2016

 

Management des soins

Nadine Faure  

Dans notre société, la maxime “pour guérir il faut manger” reste bien ancrée. Les familles de personnes hospitalisées en fin de vie ne dérogent pas à la règle et posent régulièrement des questions sur l’alimentation du patient. Et quand le patient ne souhaite pas manger, les familles s’inquiètent. Quels sont alors les leviers d’action de l’équipe soignante ?

Jusqu’au début du XXe siècle, les origines sociales des hospitaliers se confondent avec celles des malades et des administrés. Les améliorations des régimes les concernent tous. Les dons des différentes chasses profitent à tous (gibiers) et agrémentent leur ordinaire. En revanche, les médecins mangent à part dans une salle de garde en dehors du réfectoire.

Si les restrictions alimentaires lors des deux guerres mondiales touchent le personnel, les malades sont épargnés.

Pour le personnel soignant, à partir des années 1930, le repas devient payant. Le personnel s’émancipe, loge en dehors de l’hôpital. Le repas, ensuite indexé sur le salaire, reste le même que celui du patient. Le personnel se réservant le choix de l’heure. Vers les années 1970, les plateaux-repas font leur apparition, sonnant le « glas du service “à la louche” »(1). Le personnel se professionnalise (cuisinier professionnel, diététicienne…) et les menus sont élaborés chaque semaine. Puis les avis des patients seront recueillis : l’évaluation des pratiques prendra naissance ici.

Les couverts sont fournis, et maintenant nous parlons de “self”, donc de choix. L’équipe peut se restaurer aussi dans le service. Les administrations hospitalières s’imposent les prescriptions du code des marchés, les préparations des repas sont externalisées, la recherche du coût faible reste une priorité, le patient est devenu un client qui doit respecter la DMS(2).

L’ALIMENTATION FAIT-ELLE PARTIE DES SOINS ?

Recueil d’informations et traçabilité

Durant le séjour à l’hôpital du patient, l’équipe établit un recueil d’informations clair et précis afin de sécuriser et d’optimiser la prise en charge multidimensionnelle et pluridisciplinaire du patient.

Les traçabilités écrites et orales, l’outil informatique, les synthèses pluridisciplinaires, les formations des soignants, le décloisonnement entre les services et les structures hospitalières sont des atouts pour que chaque soignant ait la même démarche auprès du patient. Pour autant, le point d’entrée à l’hôpital pour le patient n’est pas l’attrait à sa cuisine ! Il recherche des soins en rapport avec sa pathologie et sa demande première est d’avoir des investigations et des traitements adaptés. Si son séjour se prolonge, la nourriture deviendra un sujet primordial.

Repas adaptés

Dès que l’équipe prend connaissance de la religion du patient, elle met en place une rencontre avec le diététicien de l’institution et prévoit les repas adaptés à la situation.

Dans tous les cas, l’équipe intègre les habitudes alimentaires du patient au maximum. Il est important d’accepter sa façon de se nourrir, comme par exemple le choix de l’usage de ses mains pour manger.

Les rencontres avec les familles sont aussi sources d’informations complémentaires. Elles doivent être organisées dans le temps et dans un espace dédié.

LE RÔLE DU CADRE

Élargir les connaissances des soignants

Le soignant doit prendre en compte la dimension spirituelle et religieuse du patient dans son institution laïque. Le cadre de santé peut alors se procurer les différents calendriers confessionnels édités par les communautés religieuses pour connaître les dates exactes et parfois les horaires de la célébration des fêtes. Il peut également demander à la personne de confiance quelles seront les périodes suivies par la famille. Il est toujours possible d’organiser dans un service des moments de convivialité dans le respect de l’organisation des soins et de l’état général du patient.

Veiller au maintien du lien entre les soignants et les familles

Le cadre doit s’assurer aussi que la famille prenne le temps de rencontrer l’équipe soignante avant de rejoindre le patient. Le but étant d’informer la famille de l’état général du patient et de leur expliquer que le patient ne souhaite pas manger. Une annonce parfois difficilement interprétée. En effet, les coutumes et usages sont très prégnants. Ainsi, l’embonpoint ou les rondeurs se voient comme un gage de bonne santé ; le repas structure le temps, c’est un moment d’échange, un mode de communication : que vont-ils dire si le patient ne mange pas ? La prestation du repas doit être honorée car la famille assure le paiement du forfait journalier. Et en dehors de toute culture et de tout critère, les textes législatifs (droits de l’homme, charte du patient hospitalisé, droits de la personne âgée) doivent être respectés.

Former les soignants

Lors des entretiens individuels, certains soignants indiquent aux cadres de santé vouloir suivre une formation pour présenter les menus ou améliorer les présentations. Les soignants peuvent faire partager leurs avis lors des commissions des menus auprès du Comité de liaison de liaison en alimentation et nutrition (Clan). Des structures en France ont fait de réels progrès de présentation. Parfois, les patients participent à des ateliers cuisine et partagent avec des soignants et d’autres patients leurs compositions.

RÉÉVALUER LES PRÉSENTATIONS

La présentation des repas est éventuellement à reconsidérer.

Des choix pratiques…

Des établissements ont fait le choix d’utiliser des chaînes du froid, ou des liaisons chaudes. Leurs choix sont économiques et pratiques. Pour autant, les présentations en barquettes n’aiguisent pas l’appétit. Les emballages plastiques, les opercules difficiles à ouvrir, les aliments baignant dans un liquide, l’odeur forte du poisson ou le manque de saveurs ne reflètent pas les grands progrès culinaires occidentaux. Avec en prime des horaires fixes de prises de repas.

… aux choix quantitatifs

D’autres institutions ont opté pour les présentations à l’assiette. Mais la vaisselle blanche, immaculée, le mixé qui s’étend dans tout l’espace, ou encore une quantité servie trop importante freinent l’envie. Les patients peinent à tout manger et se reprochent d’en laisser dans l’assiette, particulièrement le pain, servi souvent en trop grande quantité. La présentation en verrines serait une solution. La quantité n’est pas un objectif.

GESTION DES ALIMENTS

Aliments apportés par les familles

Pour des questions évidentes d’hygiène, les structures ont fait le choix de ne pas garder dans leurs réfrigérateurs des offices alimentaires les aliments amenés par les familles. La direction préconise que l’aliment soit mangé dans la journée ou jeté.

Des affichettes sont installées dans les chambres des patients ainsi que dans le livret d’accueil pour les informer des choix de l’établissement.

Dans une structure privée, on trouve des réfrigérateurs dans les chambres. Parfois aussi des aliments peuvent être entreposés dans les réfrigérateurs réservés aux familles (et gérés par celles-ci). Les équipes se chargent alors de noter la date et le nom du patient sur le produit dans le but de limiter les risques d’intoxication.

Des glaces proposéespar l’équipe

En service de soins palliatifs, les soignants proposent régulièrement des glaces aux patients. La glace à l’ananas est utilisée pour rafraîchir, mais l’ananas a aussi une vertu “de propreté” au niveau de la muqueuse buccale. Les glaces proposées par le service de restauration ne peuvent pas être entreposées dans le congélateur (rupture de la chaîne du froid entre la cuisine et le service malgré l’utilisation d’un réceptacle isotherme). Une équipe a mis du jus d’ananas (en forme de billes) dans les sacs congélation et propose ainsi des billes de glace à l’ananas aux patients.

L’APPÉTIT DÉGUISÉ DES PATIENTS

Avec l’accord médical, le patient peut demander un met spécifique à sa famille. Certains patients souhaitent manger des hamburgers, d’autres des lasagnes… Un appétit souvent déguisé, le patient épuisé recherchant un plaisir gustatif en petite quantité. L’équipe éprouve régulièrement des difficultés pour faire comprendre à un parent que ce souhait peut être passager, que la demande peut être “furtive”. Nous avons pu observer que, souvent, le patient faisait une demande mais, le met servi, il avait perdu le fil de sa demande. D’autres fois, le patient parle d’un plat comme d’un souvenir savoureux, sans pour autant avoir un réel désir de le manger. Dans ces moments-là, la famille se sent déstabilisée, s’inquiète de ne pas voir manger le patient.

Si elle ne peut pas donner à manger ou répondre à une demande, quel contact va-t-elle avoir avec son parent ?

Le moment du repas est intime. Ce temps participe à l’échange de souvenirs, au respect des traditions, à la transmission des savoirs. Le repas peut donner une contenance à la visite, une notion d’aide/d’accompagnement, de passage de flambeau entre les générations. Quand le repas devient compliqué, la famille a un sentiment d’impuissance. Elle se dirige vers l’équipe, intimement convaincue que, si elle ne peut pas intervenir dans la technicité des soins, elle sait gérer le quotidien, et le repas en fait partie.

DES PISTES POUR L’ÉQUIPE

L’équipe apporte des pistes adaptées à chaque cas afin de préserver ces moments intimes et veiller au maintien du lien familial. Le but étant de conforter le patient afin qu’il retrouve le goût de manger.

Sécuriser le patient

Si le temps de repas avant la maladie était ritualisé, il est possible de continuer en maintenant par exemple la musique, les chants.

S’installer, entourer

À la demande des familles, des chaises sont à disposition. Les familles peuvent ainsi s’installer autour du malade un peu comme à la maison. Jean-Pierre Corbeau indique que « chaque groupe familial (ou l’un de ses membres), à midi et/ou le soir, s’installe dans l’espace de la chambre. De chaque côté du lit, lorsque le patient est seul, créant symboliquement un cercle de partage ». La télévision peut aussi être un élément stabilisant et encadrant. Ainsi, l’émission suivie habituellement peut être regardée au moment du repas.

Les équipes, sans que cela n’entrave l’organisation du travail et les dispenses de soins, permettent à un parent de s’installer près du patient en dehors des horaires de visites.

Privilégier l’installation du patient dans une chambre seule est une décision prise en équipe/ famille/patient. Un voisin de chambre peut être aussi un moyen d’échanges et participer au maintien des repères. Il est important de personnaliser l’espace du patient. Accrocher des photos, apporter une plante, regarder des albums photos… L’art-thérapeute peut être une ressource pour la famille. Il peut aussi amener le patient à exprimer son regard envers l’alimentation. Il pourrait être un projet auprès des patients hospitalisés, tableaux ensuite exposés dans le service et discutés avec les familles.

Le triptique soignant/patient/famille

Quand le patient ne veut pas s’alimenter, la famille parfois ne trouve plus sa place et se sent impuissante. Afin de ne pas “casser” la relation, les équipes peuvent utiliser plusieurs éléments pour impliquer les familles :

• expliquer à la famille que l’on peut apporter autre chose que de la nourriture, comme un objet pouvant être source de souvenirs et de partages ;

• montrer comment réaliser un soin de bouche. Les bâtonnets peuvent être aromatisés si le patient en fait la demande ;

• laisser à disposition, dans la chambre du patient, un cahier de liaison, chacun pouvant s’y exprimer et y consigner les échanges. L’équipe aurait aussi sa part d’écriture en notant les consignes, des informations concernant le parent malade en dehors des horaires de visites ;

• poser à l’entrée du service ou dans une salle des familles un livre d’or qui représente une liberté d’expression anonyme ;

• à l’entrée du patient et lors de l’entretien d’accueil, le soignant peut lui demander son odeur alimentaire préférée ou la texture qu’il affectionne le plus. Si l’état général du patient se dégrade, il est possible de “diffuser” l’odeur de l’aliment apprécié dans la chambre du patient. En effet, on remarque souvent que l’odorat est un sens peu exploité. L’utilisation des huiles essentielles (si aucune contre-indication) est à envisager. La famille peut également apporter une petite quantité d’aliment qu’il est alors possible de faire toucher, malaxer ou faire sentir au patient ;

• l’hydratation du patient est importante. Elle peut être prescrite par voie injectable. Mais la participation de la famille peut être requise en leur mettant à disposition un brumisateur, des compresses à humidifier ;

• la famille peut être sollicitée pour “remplacer” ce temps de repas par un temps de massage. Nous maintenons ainsi le contact patient-famille ;

• la psychomotricienne peut intervenir pendant le temps du repas pour assurer un massage au patient en présence d’un membre de la famille. Nous observons que ce dernier profite aussi du soin et se détend. La psychomotricienne peut mettre à disposition une huile de soin et leur montrer des gestes simples à réaliser ;

• on peut proposer au patient une médecine complémentaire : la RESC (résonance énergétique par stimulation cutanée), la sophrologie, le yoga. Y associer la famille dans les moments difficiles ;

• l’intervention du psychologue aide à reformuler ce qui a été abordé par l’équipe et le médecin. Le psychologue apporte une complémentarité d’informations, il désamorce les conflits, aide à comprendre et à adapter leurs comportements(4) ;

• le journal peut être proposé. La famille le lit et commente les nouvelles avec le patient ;

• la télévision reste également un moyen de transmission. Les chaînes qui proposent des émissions culinaires sont particulièrement nombreuses ;

• permettre aux familles de comprendre le fonctionnement du service :

→ en affichant les menus dans le service et consultable par tous ;

→ en mettant en relation les familles si besoin avec le représentant des usagers ;

→ en mettant à disposition des familles des espaces de rencontres, des salles de repos afin de leur permettre de se restaurer ;

→ en permettant aux familles de réserver un repas à l’hôpital selon les conditions de l’institution (48 heures à l’avance et règlement à l’accueil, fax affiché à l’office du service par le cadre de santé pour en informer l’équipe) ;

→ en réfléchissant sur ces nouveaux mets ensemble qui touchent les nouvelles générations mais que les “anciens” ne connaissaient pas. Ou en réfléchissant sur ces nouveaux produits reconstitués sans saveur ;

→ en fournissant au patient ou aux familles à la sortie du patient le questionnaire de sortie, qui représente une source d’information et de pistes d’amélioration des pratiques soignantes.

L’encadrement des soignants

La formation des soignants aux rites religieux, les interventions dans le service des représentants des cultes, la participation des bénévoles… Tout doit concourir à une meilleure compréhension éthique et culturelle du patient.

Le temps de parole

Le cadre de santé réserve des temps de parole à l’équipe. « On assiste par exemple à de curieuses discussions autour de l’appétit de la vieille personne, discussions dans lesquelles les soignants tentent de garder la main en décidant qu’“on va mettre en place une surveillance alimentaire”, ce qui, d’une part, est une bonne manière de signifier aux proches qu’ils ne sont même pas compétents pour juger si leur parent mange ou non, et d’autre part ne manque pas de saveur si on considère avec quel manque de rigueur cette soi-disant surveillance alimentaire est le plus souvent réalisée. »(5) Le cadre de santé réserve des temps de parole à l’équipe afin d’éviter ce genre de comportements.

Décloisonner les peurs

La peur n’est-elle pas à la base du mécanisme qui rend souvent si difficiles les relations entre les proches et les soignants ? « Les proches ont déjà de nombreuses raisons d’avoir peur : peur pour leur parent, bien sûr ; mais aussi peur de la maladie, peur de ce monde étrange et écrasant ; mais surtout sans doute peur induite par celle des professionnels ; mimétisme là encore(5). La suite est au fond aussi classique que prévisible : la peur réciproque engendre la méfiance et la méfiance l’agressivité… Les soignants vivent souvent très mal les critiques portées sur la nourriture, alors qu’ils mettent tant d’énergie à assumer les tâches les plus importantes. Mais les proches, s’étant vu refuser systématiquement toute compétence en matière de prise en charge, ne peuvent que se réfugier dans des domaines où, cette fois, on ne peut prétendre qu’ils n’ont pas qualité pour en parler : la nourriture et la propreté. C’est ici une manière de gérer leur culpabilité, leur sensation d’avoir abandonné leur parent en maison de retraite. Mais là-bas aussi, il reste des choses qu’ils connaissent mieux que les soignants. L’évaluation de la dépendance est affaire de professionnels, et la détermination des outils à mettre en œuvre ne peut qu’en découler directement… Il y a ainsi chez le soignant une propension à assimiler les proches à une sorte de soignants ; on se propose même de les former, voire de les professionnaliser. C’est un des moyens les plus puissants dont on dispose pour leur rendre service. À condition de ne pas perdre de vue les conséquences, pas toujours souhaitables, de cette position d’aidant. À condition également de se souvenir que cette volonté de les assimiler tire au moins partiellement son origine des ambiguïtés mêmes du statut de soignant. » Même si le professionnel de santé est un éducateur en santé formé et compétent, il ne doit en aucune mesure déterminer et imposer son jugement.

Faire confiance

Ce travail permet de montrer aux familles que des démarches de qualité sont en cours. Nous comptons aussi sur le “bouche-à-oreille”, un bon vecteur de d’information et une aide pour d’autres familles à accepter le refus de manger de leur parent. Cette notion s’approcherait du compagnonnage.

Au plan général et humain, nous pourrions nous projeter dans un compagnonnage de vie, un groupement de personnes dont le but serait l’entraide, la protection, l’éducation, la transmission des connaissances. Le regroupement de soignants et de familles autour d’un projet commun.

• Le cadre de santé mettra des liens informatiques sur l’ordinateur des soignants en salle de soin : fiches pédagogiques de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, les fiches techniques des soins de support…

• Pour autant, les soignants doivent également se protéger contre les préjugés et les comportements sans retenue des familles et des patients. Isabelle Lévy aborde ses nouvelles problématiques en notant malheureusement que la situation tend à s’aggraver(6).

• La fin de vie d’un patient est un moment difficile à gérer par la famille. Observer un parent en perte d’autonomie fragilise. La nourriture reste le lien, la notion de santé qu’elle pourrait apporter au bénéfice du patient. D’où l’intêret de “travailler” tous ensemble (familles concernées et soignants) autour de cette réflexion en service pour trouver les “bonnes attitudes” à avoir. Le cadre de santé, au cœur de la réflexion, de l’organisation, de la gestion et de la relation, il peut mettre en place des procédures et des procédés pour permettre aux soignants de travailler avec des outils et des process de qualité, aux patients d’être dans les meilleures conditions face aux soins, aux familles de comprendre pour mieux s’adapter à la situation souvent délicate et compliquée de la fin de vie.

FORMATION DES NOUVEAUX PROFESSIONNELS

Les formations des élèves aides-soignants et des étudiants infirmiers abordent la prise en charge alimentaire des patients, en complément de l’approche de l’anatomie-physiologie-pathologie de l’appareil digestif, de la communication, de la transmission des données.

Les cadres formateurs veillent à transmettre les informations fiables théoriques mais aussi à faire profiter les étudiants de leur expérience de terrain.

La formation en alternance va leur permettre de découvrir des situations sur les terrains de stage et de voir ce qui a été mis en place.

Les retours d’expérience après les stages favorisent les échanges et les réflexions constructives.

Les analyses de pratique des étudiants infirmiers réunissent des professionnels de santé autour d’une table pour débattre d’une situation qui les a interpellés.

L’étudiant s’inscrit dans un travail de recherches et de propositions de plusieurs solutions. Toutes ces dynamiques des apprentissages sont des atouts pour les apprenants.

CONCLUSION

Tout soignant s’est retrouvé confronté à la demande d’une famille de faire manger leur parent, ne comprenant pas toujours les raisons de ce dégoût du patient face à la nourriture, ou à l’absence de faim. Le soignant a un rôle d’éducation, d’information, mais aussi de remise en question de ses pratiques. Le triangle patient-famille-soignant doit rester en équilibre. Il ne faut pas rester sur le focus “alimentation”, mais sur la prise en charge multidimensionnelle et pluridisciplinaire. Et comprendre que, pour chaque partie, accepter ce refus reste pour tous un soin.

BIBLIOGRAPHIE

DEAS modules 1 à 8, édition Vuibert, 2014

Cuisiner en tous temps en tous lieux, Jean-Pierre Derenne, édition Fayard, 2010

Cuisiner le plaisir, Union des ingénieurs hospitaliers en restauration, édition presses de l’EHESP, 2008

Arrêté du 22 octobre 2005 relatif au diplôme professionnel d’aide-soignant

Arrêté du 31 juillet 2009 modifié relatif au diplôme d’État d’infirmier

NOTES

(1) L’appétit vient en mangeant ! Histoire de l’alimentation à l’Hôpital, édition Doin, 1997.

(2) DMS : durée moyenne de séjour.

(3) “S’alimenter à l’hôpital : les dimensions cachées de la commensalité” p. 109 dans L’appétit vient en mangeant ! Histoire de l’alimentation à l’hôpital de Jean-Pierre Corbeau, Doin éditeurs, 1997.

(4) www.cpa.ca/publicfr/Unpsychologue, consulté le 15/04/2015 à 17 h 20.

(5) Via le lien raccourci bit.ly/1QjMxL2, consulté le 21/04/2015 à 00 h 36.

(6) “Marseille, les hôpitaux sous pression” de Camille Laplanche, revue Valeurs actuelles, n° 4089, du 9 avril au 15 avril 2015, p. 20-21.

L’IMPLICATION DES CADRES

– Le cadre de santé peut mettre des liens informatiques sur le PC des soignants de la salle de soin : fiches pédagogiques de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, les fiches techniques des soins de support…

– Former les soignants.

– Élargir les connaissances des soignants.

– Veiller au maintien du lien entre les soignants et les familles.

– Le cadre de santé réserve des temps de parole à l’équipe. -?Décloisonner les peurs.

– Les cadres formateurs veillent à transmettre les informations fiables théoriques mais aussi à faire profiter les étudiants de leur expérience de terrain.

Références

→ La Haute Autorité de santé contribue à la régulation du système de santé par la qualité, le domaine de l’alimentation du patient en fait partie.

→ Déclaration des droits de l’homme de 1948

• « Article premier : Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.

• Article 25 : Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. »

→ Charte du patient hospitalisé de 1995

« Tous les établissements de santé doivent contribuer à garantir l’égal accès de chaque personne aux soins requis par son état de santé. Aucune personne ne doit être l’objet d’une quelconque discrimination que ce soit en raison de son état de santé, de son handicap, de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de ses opinions politiques, de sa religion. »

CULTURES ET CROYANCES

• PLACE DE LA FAMILLE

Nous observons dans le service de soins que les familles apportent des dattes, des figues, des grenades, des raisins, la plupart du temps sous forme de pâtisseries, sans toujours comprendre le but de cette action. Or ces fruits ont une place de choix lors d’événements familiaux, culturels et aussi religieux.

Certains plats apportés sont préparés selon des enseignements ancestraux. Pour David Fontana, « la nourriture a de nombreuses significations positives : elle représente la fertilité, l’abondance et la communion, mais aussi la paix et l’apaisement des conflits. Cette association vient de la croyance selon laquelle les aliments contiennent une force vitale qui met les hommes et les femmes en communication avec l’énergie primordiale, les faisant ainsi participer à la vie de l’Univers »*.

La maladie d’un parent, d’un enfant, est une étape de vie difficilement négociable, quitte à transgresser des interdits. Cependant, la souffrance et l’impuissance de la famille face à la maladie est telle qu’elle trouve un rôle et une place dans l’apport de nourriture.

• LES JOURS DE SPIRITUALITÉ

Pour expliquer les démarches des familles auprès de leurs parents souffrants hospitalisés, il est nécessaire de saisir que toutes les religions se réservent un jour de prières dans la semaine, qui se termine ensuite par un moment de rencontres et de convivialité autour d’une table riche en nourritures.

Le fil de l’année est rythmé par la célébration des fêtes et des coutumes des différentes religions. Les familles apportent des plats cuisinés, leurs spécialités qu’elles veulent partager avec le parent souffrant. D’ailleurs, il est assez fréquent que les soignants se retrouvent conviés et partagent ces moments.

Pour autant, un patient croyant peutêtre exempté des périodes de jeun : si sa vie est en danger, les interdits alimentaires peuvent être levés.

* Croyances et laïcité-guide pratique des cultures et des religions  - leurs impacts sur la société française, ses institutions socialeset hospitalières, Isabelle Lévy, édition estem, 2002, p. 189.

Les symboles et représentations autour de la nourriture

La symbolique autour du pain

De l’Antiquité à nos jours, le pain est emprunt de toute une symbolique. Symbole de nourriture de vie dans l’Antiquité, puis porté en procession à l’époque romaine, le pain porte aussi les marques des rituels religieux. Dans la religion juive, chaque fête religieuse a son pain spécifique.

Dans la religion chrétienne (christianisme), le pain est au centre de l’Eucharistie chrétienne, connu aujourd’hui sous le nom d’hostie dans le catholicisme romain. Aujourd’hui, il fait partie de la culture et on le retrouve dans nos expressions populaires.

La symbolique autour des boissons

« Les boissons sont, elles aussi, porteuses de multiples significations. L’eau figure la vie et la pureté, tandis que le lait représente l’amour nourricier de la terre et de la mère. »*

La nourrice

À une certaine époque, on faisait appel à une nourrice pour allaiter et nourrir les enfants en bas âge d’une autre femme. Présente dans les écritures religieuse, la nourrice prend aujourd’hui le sens d’une assistante maternelle ou nounou.

Représentation de la mère

La mère est la personne qui porte l’enfant, qui lui permet son développement, sa croissance. La mère donne le sein, l’enfant est au sein d’une famille. Il y a la nourriture, la protection, l’empathie, le réconfort, la croissance et la maturité. D’ailleurs, lorsqu’une personne est en fin de vie, elle fait souvent appel à sa “maman”.

* Croyances et laicité-guide pratique des cultures et des religions, leurs impacts sur la société française,ses institutions sociales et hospitalières, Isabelle Lévy, édition estem, 2002, p. 189, David Fontana.